Réduire l'Etat. On en parle beaucoup. Jusqu'ici cela semblait l'idée de quelques revanchards. Ils voulaient liquider les systèmes d'assurance sociale, histoire de remettre le pauvre dans la poubelle dont il n'aurait pas dû sortir. De nouvelles thèses émergent.
Contrairement à ce que l'on pense, la France n'a pas un amour aveugle pour l'Etat fort. Les Radicaux, qui ont longtemps dominé notre politique, voulaient un Etat maigre. Car l'Etat peut être agent d'oppression. Ce que les Anglais appellent un "Etat nounou" a émergé après guerre. L'Etat s'est mis à décider pour nous. Or sa capacité de penser est celle d'un tout petit nombre d'hommes politiques (et peut-être même quasi exclusivement du président de la République). Ils s'agitent beaucoup et réfléchissent peu. Surtout, ils sont totalement coupés des réalités. Résultat : tendance à céder aux idées qui passent, et qui ne rencontrent pas de résistance, sans trop se préoccuper de leurs conséquences. Et Etat démagogue, qui vit d'expédients et qui ne cesse de grossir à mesure qu'il nous infantilise.
Quelle alternative ? Etat stratège d'Augustin de Romanet ? Il prend à contre le cercle vicieux de l'Etat nounou. Le pouvoir sous-traite ce qu'il ne fait pas bien, et se concentre sur un cœur de métier, qui pourrait être la stratégie.
Ce qui ne va pas de soi. La culture Anglo-saxonne tend à voir l'Etat comme un arbitre. Il s'assure que les règles du jeu sont respectées (au fond, le juge est plus important que le politique). Ensuite, à l'individu de faire ce qu'il veut. Cela marche pour une société stable. Mai si elle doit évoluer, comme une entreprise, ou comme les Hébreux en Egypte, elle doit choisir un cap. Ce cap n'émerge pas spontanément de la consultation du peuple. Ce qui émerge c'est un malaise, un besoin mal formulé. Il faut un travail supplémentaire créatif, de synthèse, de modélisation et de construction d'une stratégie dans laquelle le peuple va voir une solution à des attentes muettes. Etat stratège, donc ?
The Economist propose une alternative. Voilà comment je l'interprète. Un renforcement de la démocratie directe, en ce qui concerne la formulation du besoin ; le retour de la technocratie, afin de transformer le besoin en stratégie. L'Etat a pour rôle de faire fonctionner ce dispositif et d'en mettre en oeuvre les résultats.