Et si le mensonge sur la réussite d’une tâche pouvait favoriser la créativité sur la tâche suivante ? C’est ce que suggère cette étude publiée dans Psychological Science, qui conclut, que ces deux traits, créativité et malhonnêteté, qui supposent tous deux d’enfreindre les règles conventionnelles, sont souvent réunis, chez un même individu.
Les auteurs de de l’Université de Californie du Sud, suggèrent ici que » transgresser les règles » pourrait même être la base de la performance créative comme d’un comportement malhonnête.
Francesca Gino de la Harvard Business School et Scott Wiltermuth de l’Université de Californie du Sud ont conçu une série d’expériences qui ont permis et même encouragé les gens à tricher :
-Dans la première expérience, les participants ont reçu une série de matrices numériques et devaient trouver 2 nombres qui ajoutés, faisaient un total de 10 dans chaque matrice. Ils devaient être indemnisés en fonction du nombre de matrices réussies, mais devaient eux-mêmes en déclarer le nombre. Près de 60% des participants ont eu tendance à « gonfler » leur taux de succès-alors que les chercheurs étaient en mesure de contrôler leur performance réelle.
-Dans une seconde étape, les participants devaient compléter des ensembles de 3 mots par un 4è mot lié à l’ensemble des 3 premiers mots. Il s’agit d’un test d’association éloignée qui permet d’évaluer la créativité.
La conclusion est que les tricheurs se montrent les plus créatifs.
D’autres expériences apportent d’autres éléments de preuve du lien entre la malhonnêteté et la créativité, sur le même principe : Ceux qui réussissent le mieux sur des tâches créatives sont aussi ceux qui ont triché le plus lors de précédentes expériences. La tricherie semble encourager la créativité ultérieure en libérant les participants des contraintes des règles.
De précédentes études, des mêmes auteurs, avaient déjà montré que favoriser la pensée créative, définie ici comme « out-of- the-box » va, dans l’autre sens, inciter à des décisions plus malhonnêtes face à un dilemme éthique. Ici, l’étude met plutôt en avant les conséquences et peut-être les raisons de la malhonnêteté. L’auteur suggère qu’en agissant de façon malhonnête, nous devenons plus créatifs et que cette créativité nous apporte les justifications initiales de notre comportement immoral et nous protège intérieurement même si nous dépassons les limites éthiques.
C’est ce que montrait une autre étude de l’Université de Washington, les gens qui trichent n’éprouvent pas de culpabilité lorsqu’ils n’ont pas directement nui à quelqu’un d’autre et, même, ils se sentent mieux en moyenne, que ceux qui ne trichent pas.
Des génies diaboliques : Mais les auteurs vont encore plus loin, ils suggèrent que quand la malhonnêteté et la créativité sont combinées sous forme d’une sorte de tricherie particulièrement « créative », la société peut même être indulgente vis-à-vis des tricheurs. Ces tricheurs, ils les nomment –dans le titre de leur article : » Les génies diaboliques » (ou Evil Genius).
Source: Psychological Science February 18, 2014, doi: 10.1177/0956797614520714 Evil Genius? How Dishonesty Can Lead to Greater Creativity (Visuel © vege – Fotolia.com)
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