Buenos Aires compte 48 quartiers (ou barrio), dans lesquels on sent à chaque fois une atmosphère particulière, et où il est possible de découvrir un nouvel aspect de la ville.
La Boca est le quartier le plus populaire, connu pour ses maisons colorées et son stade de foot, La Bombonera.
Présenté comme n’étant pas le plus recommandable, surtout à la tombée de la nuit, il règne en pleine journée une atmosphère festive et agréable dans quelques rues touristiques. Il est facile de s’y rendre par de nombreuses lignes de bus à partir de la Plaza de Mayo. Nous optons pour le bus 152, ses pilotes de bus, et ses arrêts fictifs (car les gens hèlent le bus en pleine rue).
Installé en bordure du Riachuelo, qu’enjambent deux ponts désormais abandonnés, le quartier accueille les visiteurs avec ses façades peintes, et ses couleurs vives.
Le peintre Quinquela Martin, né à la Boca, d’origines modestes, acquiert une renommée internationale exposant dans de nombreuses villes à l’étranger. Il exporte alors les images de son pays, et de l’activité portuaire qu’il dépeint majoritairement, en présentant les conditions de vie et de travail particulièrement difficiles à la Boca.
Il invite les habitants du quartier à peindre avec lui la façade de sa maison, et il est imité par bon nombre d’autres habitants dans les rues les plus fréquentées autour de Caminito.
Il est aussi à l’origine de nombreuses fresques murales qui se déroulent sur la route de Caminito jusqu’à la fin du quartier de la Boca. Ses fresques renommées, lui ont aussi été commandées pour d’autres villes comme à Santiago del Estero (Grand Chaco), ou à Mendoza. On caractérise le plus communément son travail à sa palette et aux couleurs qui sont si typiques du quartier.
Désormais les quelques rues colorées, regorgent de cafés à terrasses, d’artistes de rue, et de peintres qui vendent leur petites toiles représentant les lieux, et qui tirent volontiers le portrait des touristes.
Comparé pour cela à Montmartre, le quartier possède néanmoins un petit plus : la forte influence du tango. Le quartier est en effet occupé par une majorité d’immigrants étrangers au 19ème siècle, italiens, mais aussi africains, espagnols, et gauchos qui vont voir émerger le tango à la fois comme musique et comme danse. Pratiquée par les immigrants qui métissent leur danses avec les danses de salon européennes, et les blancs qui se moquent en caricaturant leur pas.
Danse de la sensualité et du métissage, le tango est une danse “nomade” comme le dit Nathalie Clouet dans Histoires de Bal, “Le Tango est une tradition qui se déplace. Cet état déplacé le différencie des folklores pour en faire une culture du voyage. Voyage des immigrants qui écrivent leur roman, pas à pas, dans la ville de Buenos Aires. Ce roman est un livre ouvert à la structure déchirée. Même dans cette ville, les Argentins vivent comme des gens du voyage. Avec un instrument sous le bras ou un air siffloté au coin des lèvres, ils mettent en pratique la théorie du voyage.”
Sur les terrasses des cafés et des restaurants, des couples de danseurs professionnels hypnotisent le public qui s’arrête pour observer leur démonstrations, la lenteur calculée des mouvement, la précision des poses, et la sensualité des gestes.
Mais les balcons aussi sont animés, décorés par des statues de personnages qui s’amusent à saluer les passants, et occupés par des enfants qui jouent ici à nous faire coucou.
Les courettes sont aussi bien remplies par des musiciens, saturées par des boutiques de souvenirs et d’artisanat, tandis que dans la rue principale les restaurants laissent s’exhaler les odorantes effluves des “biffe de lomo ou de chorizo”. Ce fut notre premier contact avec les fameux steack, entrecôtes et autres morceaux de viande de boeuf généreux typiques d’Argentine.
Un peu plus loin de l’agitation des rues principales on croise le sillon envahi par la végétation d’anciens rails d’une voie ferrée.
Ce fut agréable de s’accroupir à la hauteur des voies, pour prendre quelques photos, en souriant de la familiarité avec la Petite Ceinture parisienne que j’affectionne. Ici les façades colorée et les chateaux d’eau apparents donnent un autre cachet à la voie.
On distingue d’ailleurs les arrières-cours des restaurants, d’où émanent les effluves odorantes des grillades.
De belles fresques occupent les murs, la vie éclate de toutes parts,
des devantures de maisons ou de commerces, des terrasses, ou de la rue elle-même.
Partout il est possible de lire la volonté du quartier à revendiquer son indépendance. Ainsi on peut lire “Republic de la Boca” autant dans les pochoirs sur les murs, qu’au fond du fameux terrain basket.
Une jolie prise de contact avec la capitale argentine, haute en couleurs et en émerveillement. Nous repartons au centre-ville par le bus 152 qui nous redépose à la Plaza de Mayo.