Quatre nouvelles dans ce recueil. Dans la première, deux
hommes marchent vers l’océan. Autour d’eux, le silence et la désolation. Devant
eux, la terre s’est ouverte par endroits. Des gouffres vertigineux qui leur
tendent les bras et qu’ils vont tenter de contourner. La seconde met en scène
Wagram, employé de « La fabrique » dont le job consiste à éviter
que le cours des choses ne s’arrête. La 3ème se passe dans un camp. Trois
prisonniers mal en point veulent rendre un dernier hommage à une mathématicienne
de génie. Dans la dernière, on suit un homme poussant un orgue de barbarie dans
les rues d’une ville déserte. Arrivé sur la place centrale, il va tourner la
manivelle et commencer à jouer. Pour qui ? Pour quoi ?
Étrange recueil, traversé par une certaine forme d’angoisse.
L’univers décrit est déshumanisé, irréel. Partout la solitude. Des personnages
qui errent, sans véritable but. Pour moi, c’est l’absurdité du monde qu’Antoine
Choplin veut souligner. Des hommes fragiles, vulnérables, dépassés, perdus. Mais
aussi des hommes solidaires, unis dans les pires moments par un fil aussi
invisible qu’indestructible. Une fraternité, certes peu démonstrative, mais qui
tient en de petits riens. Une main sur un bras ou sur une épaule, un geste discret
et réconfortant.
Pour autant, je ne ressors pas emballé de ce recueil. Il y a
comme un goût de trop peu. Dans la nouvelle éponyme, j’aurais bien accompagné
plus longtemps les deux personnages, dignes de Beckett. Pareil pour le dernier
texte, j’aurais aimé rester davantage avec le joueur d’orgue. Et puis je n’ai
pas retrouvé la magnifique écriture de Choplin, sa petite musique susurrée
comme dans un souffle dans « La nuit tombée » et « Le radeau ».
A tel point que je me demande si ces nouvelles ne sont pas des œuvres de
jeunesse tant elles me semblent « inabouties ». Bref, même si j’ai
passé un agréable moment, ce n’est pas un coup de cœur, loin de là.
Les gouffres d’Antoine Choplin. La fosse aux ours, 2014. 132
pages. 16 euros.
Une lecture commune que je partage avec Leiloona et
Noukette.