Magazine Humeur
Habileté et circonstances favorables ont permis à Madame Merkel de faire un beau trajet politique dans une période agitée économiquement.Elle est ainsi parvenue non seulement à maintenir sa barque Allemagne hors des coups de mer les plus durs pendant la crise qui dure depuis 2007, pour devenir aujourd'hui et pas qu'aux yeux de la seule presse américaine, la « femme la plus puissante du monde »Dans une Union Européenne mal en point économiquement, elle a pu faire valoir sa puissance pour que les options allemandes, notamment économiques, soient LA référence à suivre, hors de laquelle, finances obligent, il n'y aurait point de salut.Aujourd'hui, elle n'est pas à la tête de l'Union, elle EST, dans les faits, la tête de l'Union.Pendant ce temps, à quelques encablures de Berlin, les ukrainiens et leurs désirs de probité politique parmi leurs gouvernants et de liberté réelle, sans retour vers le passé, ont effarouché Poutine, qui n'avait jamais avalé la « révolution orange » ni l'équilibre précaire de la présence russe (et de sa base navale de Sébastopol, « sous contrat » limité dans le temps) en Crimée.Poutine a fait ce qu'il sait faire, en tentant de renouveler le coup de la Géorgie et met en place tout ce qu'il faut pour « annexer » la Crimée, petit lot de consolation de ne plus avoir les entrées franches dans la « petite Russie » toute entière. La banque centrale russe travaille déjà au scénario de passage de la monnaie ukrainienne vers le rouble russe en Crimée.Voilà donc Madame Merkel, à la tête du pays européen le plus engagé économiquement en Russie mais aussi dans le pays le plus dépendant du pétrole et du gaz russe, propulsée à la première place pour tenter d'amener Vladimir Poutine à plus de douceur. Pour le moment, les options diplomatiques conduites par son propre ministre des affaires étrangères, par le ministre équivalent français et par celui de la Pologne, sont encore dans la course. Avec quelles possibilités de réussite ? C'est encore trop tôt pour faire des paris, mais leurs cartes ne sont pas mirobolantes.L'étape suivante, si la diplomatie ne permet pas d'éviter une amputation de l'Ukraine, met Madame Merkel elle-même face à Poutine, avec cet énorme pari : soit elle réussi à éloigner le spectre d'une annexion et sa place de leader européen sera non seulement confirmée, mais renforcée, soit elle échoue et l'Allemagne et toute l'Union Européenne avec elle sera fragilisée. Dans un cas comme dans l'autre, le beau parcours « facile » sera terminé et l'avenir de toute l'Europe et pas seulement l'Union européenne, serait à réinventer. © Jorge