Mafalda – Tome 1 (1964) de Quino

Par Colimasson

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Il paraît qu’il vaut mieux connaître la situation de l’Argentine pour apprécier Mafalda dans toute sa subtilité et son audace politique. Si, comme moi, ces données-là sont inconnues, la lecture ne pâtit pourtant pas du moindre décalage. Quelques recherches m’apprennent plus tard quelle était la situation politique de l’Argentine lorsque Quino imagina Mafalda. Sous couvert de libération politique et d’indépendance nationale, de nombreux présidents de facto se succèdent au cours du 20e siècle pour imposer leurs dictatures, ce qui explique pourquoi Quino, voulant contourner la censure, ne pousse jamais Mafalda à évoquer ces faits. La petite fille, pourtant déjà inquiétée et prise au piège de réflexions politiques qui excèdent son jeune âge, ne peut s’empêcher de relier les méthodes gouvernementales à tous les aspects de sa vie d’enfant mais aussi à la culture et au commerce, à la place des femmes dans la société et aux questions scientifiques. Ses parents, souvent dépassés par ses questions, n’en mènent pas large. Leur détachement insouciant des faits politiques contraste avec l’ardeur comique de Mafalda et pourrait également expliquer qu’un peuple déjà habitué à la domination coloniale accepte de vivre sous plusieurs dictatures successives –mais Mafalda fait partie d’une nouvelle génération capable de remettre en question ce que ses parents semblent subir relativement bien. 


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A la fois triviaux et spirituels, mêlant soupe et réunions gouvernementales à l’ONU, les bandes de quatre cases se succèdent et amènent chute après chute –étonnement devant l’imagination naïve et pourtant pertinente de Mafalda et de ses comparses, attendrissement devant le sentiment d’un décalage individuel face au groupement collectif. Quino a su universaliser des questionnements politiques propres à la situation de l’Argentine au 20e siècle et ceux-ci entrent encore –étrangement- en écho avec nos doutes contemporains. 


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Citation :
- J’ai pris trois billets pour le cirque.
- Formidable ! 
- Je crois que Mafalda sera contente : il y a des clowns, des magiciens, des ventriloques… on dit que le spectacle est très bon. Mafalda, devine où on t’emmène ce soir !
- Je sais : à l’assemblée nationale !



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