L’avantage d’une bande dessinée revenant sur les débuts de la Genèse avec la création du premier homme –le Prototype Adam- relève de son nombre réduit de personnages : Dieu, le serpent et l’homme. Autrement dit : une voix sortie d’outre-tombe, un lacet parlant et un primate mal éveillé.
L’avantage d’une bande dessinée réalisée par Ralf König consiste aussi en la probabilité accrue de lire ce genre de dialogue :
- « Adam, aujourd’hui je vais activer ton système digestif. Pour cela, tu vas devoir apprendre à manger. Devant toi, le meilleur de l’agneau : du gigot ! Rosé à cœur, moelleux en bouche.
- Heu, ça c’est… l’agneau ?!
- Oui, et tu l’introduis dans la bouche maintenant.
- Dans la… bouche ? L’agneau … ?!
- Fais ce que je te dis ! »
Où l’on voit que les premiers temps de l’humanité ne peuvent encore se targuer d’aucun acquis indubitable. Le Prototype créé, il faut lui apprendre à utiliser son système digestif, son appareil reproducteur et les organes de la parole. Le serpent tient ici un rôle novateur puisqu’il assiste Adam et Dieu à la fois, dans une position de médiateur qu’on ne lui connaissait pas. Tempérant d’une part la mégalomanie de Dieu et d’autre part la passivité crétine d’Adam, il ne peut toutefois empêcher l’ingestion de la connaissance. Malheureux évènement qui se solde par l’expérience de la caverne des ombres, la philosophie kantienne et la pensée athée.
Relevée par des scènes épicées et surprenantes, cette histoire de la Genèse revisitée –l’histoire de « Dieu et du serpent qui parle »- nous paraît beaucoup plus attirante que celle de la « soupe originelle et de la formation des premiers nucléotides » -à moins que nous fassions confiance à Ralf König, maître de la transsubstantiation narrative, pour un prochain numéro qui satisferait notre faim de bande dessinée où l’absurde se mêle à la métaphysique.
Galère d'un temps où le prototype était encore unique :
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La caverne des ombres de Platon -remake :
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