En Corée du Nord a eu lieu dimanche 9 mars 2014, « l’élection parlementaire » du pays. Pourquoi des guillemets ? Tout simplement car ce terme n’a pas la même définition en Corée du Nord. En effet, les citoyens nord-coréens n’ont pas vraiment le choix d’élire le candidat qu’ils souhaitent. De plus, comme dans toute dictature à proprement parler, chaque élection s’accompagne d’un grand processus de propagande et autres chantages, menaces. Explications.
L’illusion du choix
Voici comment s’est déroulée l’élection du 9 mars 2014 : pour les 687 circonscriptions du pays, les citoyens doivent voter pour un candidat. Seulement voilà, le parti de Kim Jong-un, le seul parti autorisé, a désigné un candidat unique dans chacune de ces circonscriptions. Donc lorsque les médias affichent des titres tels que « Journée de vote en Corée du Nord », ils ne parlent en fait que du choix entre « oui » et « non ». Il est aisé de comprendre qu’on est bien loin des élections démocratiques d’Europe occidentale ou d’Amérique du Nord. Mais que se passe-t-il si une circonscription affiche plus de « non » que de « oui » ? Et bien cela ne risque pas d’arriver : en théorie, c’est possible, mais si on regarde les chiffres précédents (99,98% de participation et 100% de « oui » en 2009), on réalise que le Parti du travail de Kim Jong-un n’a pas de souci à se faire.
Mais alors, pourquoi organiser des élections ?
La réponse parait évidente dans le cadre d’élections traditionnelles, mais ici, c’est une question légitime. En fait, le gouvernement nord-coréen s’en sert pour recenser les défections à l’étranger : lorsque l’on regarde des reportages sur ce pays, on peut s’étonner de voir que les citoyens semblent adorer leur chef d’Etat et tolérer leur situation. Pour certains, cette admiration du gouvernement nord-coréen est sincère, pour beaucoup d’autres, elle est fausse, contrainte par la propagande et les menaces constantes. C’est pourquoi beaucoup de personnes tentent et arrivent à sortir du pays, pour aller chez leurs voisins du Sud ou en Chine par exemple. Les élections permettent alors à Kim Jong-un de compter le nombre de personnes ayant quitté le territoire et parfois d’avoir leurs noms. Ainsi, il est facile de faire pression sur ces fuyards en kidnappant et en torturant leurs familles.
Finalement, ces élections sont davantage un bilan qu’un tournant dans la vie politique nord-coréenne. Comme dit précédemment elles jouent le rôle de recensement mais également de mise en place de candidats choisis minutieusement, les autres sont bien entendu morts, exécutés par le gouvernement. Tout le monde peut y passer, demandez à Jang Song-thaek, l’oncle de Kim Jong-un…
Yannick Setboune