par Karim Renno
Je vous écris assez régulièrement pour "critiquer" certains jugements en matière de liberté d’expression et de protection de la vie privée afin de faire valoir qu’ils sont trop restrictifs à l’égard du droit fondamental de toute personne de s’exprimer librement. Reste qu’un grand nombre de décisions importantes réaffirment et protègent cette même liberté d’expression. C’est le cas de l’affaire Trudeau c. AD 4 Distribution Canada inc. (2013 QCCS 2678) où l’Honorable juge Hélène Le Bel réaffirme de manière claire le fait que la liberté d’expression permet la critique par voie de caricature et parodie.
Cette affaire implique la production d’un film pornographique parodiant la policière maintenant bien connue sous l’appellation "matricule 728". Cette dernière demande l’émission d’une injonction permanente pour bloquer la distribution dudit film alléguant une atteinte à son droit à la vie privée et le grand préjudice que cette distribution lui causerait.
La juge Le Bel rejette la requête introductive d’instance de la Demanderesse, soulignant que ni son nom, ni son image ne sont utilisés. Elle ajoute que la liberté d’expression protège le droit de critiquer via la caricature et la parodie:
[44] Il n’appartient pas aux tribunaux d’adjuger du mérite artistique ou du simple mérite de l’œuvre produite par AD4 ou de distinguer les mauvaises caricatures des bonnes ou de sanctionner les parodies qui seraient de mauvais goût.
[45] Dans la sphère publique, la liberté d’expression autorise et permet la critique, le commentaire, le débat, la contestation, par des procédures ou des manifestations ou par l’humour ou la caricature ou la parodie, des faits et gestes de ceux qui nous gouvernent ou qui, comme les policiers, se trouvent en position d’autorité.
[46] Le Tribunal conclut donc que, dans le présent cas, le recours de la demanderesse est mal fondé. Le présent cas est manifestement différent de ceux soumis à l’honorable Pierre Nollet qu’invoque la requérante. En effet, dans ces affaires, on avait fait fi des termes d’une entente pour publier la photo de jeunes femmes dans la page centrale d’un magazine pornographique. Il s’agissait purement et simplement de l’utilisation non autorisée de l’image de quelqu’un et la faute était aggravée par la nature de la publication.
Le texte intégral du jugement est disponible ici: http://bit.ly/12VKutL
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Note: Veuillez prendre note que Me Renno n’écrit pas sur le Journal de Vérité Justice mais qu’étant un ami personnel, il m’autorise à copier les écrits de son blogue A Bon Droit