Madame Marie-France Nys, en tant qu’Inspection Pédagogique Régionale Etablissements et Vie Scolaire de l’Académie de Limoges, a récemment demandé aux professeurs documentalistes des collèges et lycées "d’être particulièrement vigilants sur le contenu des ouvrages présents au CDI". Apparemment, les professeurs en question n’en savaient rien, il fallait donc le leur signaler. Mais cette tête pensante académique, dans la même circulaire du 11 février dernier, cite nommément L’Art de la bande dessinée, publié par Citadelles & Mazenod en octobre 2012.
Passons sur le fait que cet ouvrage est édité par une très respectable maison spécialisée dans le livre d’art, il y a plus grave. Ce monument de plus de 500 pages, issu des travaux et réflexions de chercheurs reconnus [1] tâche de rendre compte de la richesse et de la diversité du Neuvième Art. Et il est bien possible qu’une poitrine dénudée ou un séant rebondi apparaisse ici ou là. Rien de particulièrement choquant pour la jeunesse, qui dispose à volonté d’images bien plus spectaculaires, mais la volonté manifeste de refuser toute respectabilité à la bande dessinée est évidente.
Comme si cela ne suffisait pas, la même circulaire "conseille de feuilleter avec la plus grande attention toutes BD et mangas". On appréciera l’utilisation du féminin pour les mangas, une manie précieuse qui n’a plus cours à notre connaissance depuis une ou deux décennies, mais on regrettera la mise à l’index a priori de l’ensemble de la production de bande dessinée. Un véritable voyage dans le temps, pour le coup, qui nous ramène à l’époque glorieuse de l’après-guerre, lorsque considérait la lecture des illustrés comme éminemment suspecte et donc dangereuse.