La situation politique actuelle en Algérie est, je crois, inédit dans l’histoire contemporaine.
On savait que dans ce pays l’armée faisait et défaisait les présidents, malgré les constitutions, les élections, et autres simagrées politico-juridiques !
L’armée était LE centre du pouvoir de décision!
Il faudrait plutôt préciser que les généraux étaient de véritables “patriciens” détenant les pouvoirs politique et économique par le seul fait qu’ils portent un uniforme orné d’une ou plusieurs étoiles!
Contrairement à l’Egypte où l’armée en tant qu’institution contrôlait le pays et intervenait dans toutes ses activités – des usines d’armement au tourisme – l’Algérie était et est encore sous la coupe de généraux qui agissent chacun à titre individuel et non pas en tant que membre d’une grande famille ou d’une institution.
Cela a donné des situations assez spéciales, comme l’annulation des élections législatives de 1991. La peur du F.I.S. de Abassi Madani avait provoqué uns situation telle que, au sein même de l’armée, une véritable crise s’était installée entre les tenants de l’éradication et les tenants de la négociation avec les groupes armés islamistes.
En dehors de l’épisode tragique de la guerre civile de la décénies 90, toute l’histoire récente de l’Algérie est une suite de crises entre, non pas des courants idéologiques ou politiques, mais une longue lutte entre des hommes.
Haouari BOUMEDIENE a évincé Ahmed BENBELLA.
Il a gardé le pouvoir jusqu’à sa mort et depuis on a vu se succéder à la tête de l’état algérien moult personnalités, au gré du choix des généraux les plus puissants du moment : Chadli Benjedid, Mohamed Boudiaf sacrifié au nom d’on ne sait quoi, Ali Kafi et Lamine Zeroual qui n’ont laissé aucun souvenir.
Jusqu’à l’arrivée de Abdelaziz BOUTEFLIKA en 1999!
Cette arrivée n’aurait jamais pu se réaliser sans l’aval et la bénédiction des généraux. Ils ont été chercher Bouteflika oublié, exilé dans les ables sables dorés d’un émirat du Golfe.
Et Bouteflika n’aurait jamais duré depuis 1999 sans l’aval et la bénédiction des généraux.
La question qui se pose aujourd’hui est comment les généraux en sont-ils arrivés au ce point de blocage au point de cautionner la candidature d’une homme malade, impotent, incapable de s’exprimer!
Le système algérien contrairement au système égyptien est bloqué : l’armée égyptienne a joué le rôle qu’elle s’est fixé dès la révolution des officiers libres. En lâchant Moubarek, qui lui voulait changer le système en introduisant son fils dans le circuit politique, elle a jonglé avec les aspirations du peuple et dans quelques semaines SISSI reprendra les rênes du pouvoir, dans le sillage de ses prédécesseurs Moubarak, Sadat, Nasser!
En Algérie, le maintien de BOUTEFLIKA montre que les généraux ne ne jouent plus son rôle qu’ils s’étaient fixé.
Que va-t-il arriver donc?
A mon sens quelques scénarii peuvent être envisagés!
BOUTEFLIKA rend l’âme avant les élections : un haut comité d’état provisoire est alors créé comme en 1991 et des élections “sérieuses” sont organisées”.
BOUTEFLIKA est élu : la constitution est révisée dans le but de créer un poste de vice-président dans la perspective de la disparition prochaine du président qui assurer la survie du système.
BOUTEFLIKA n’est pas élu, faute d’avoir pu mener une campagne digne de ce nom. L’hypothèse est osée mais ce sera le moyen pour les généraux de trouver un nouvel homme de paille à la tête de l’état : légitime certes mais sans aucune marge de manœuvre.
Mais on peut aussi envisager qu’un des généraux, le plus ambitieux, ou le plus sanguin, ou le plus malin, ou le plus puissant, prenne les choses en mains parce qu’il considérerait que la situation dépasse le ridicule et qu’il y va de l’avenir du pays.
Quelque soit la suite des événements, la situation algérienne est l’exemple type d’un blocage politique consécutif au refus de l’élite au pouvoir d’assurer la relève.
On comprendrait s’il s’agissait d’une dictature personnelle, comme on le voit encore dans certains pays africains ou arabes.
Mais là, on observe une dictature par procuration : le dictateur mandat refuse de libérer son mandataire d’une charge que ce dernier n’est plus en capacité physique d’assumer!
Inédit, certes, mais surtout pathétique! Et peut-être dramatique pour les algériens!