We Like Travel (agence social média spécialisée dans le secteur du tourisme et des voyages) a récemment partagé une étude consacrée aux destinations de montagne françaises et internationales sur leur présence et leur animation des sites de réseaux sociaux. Stations de ski, domaines skiables, territoires de montagne… comment ces organismes de promotion touristique surfent aujourd'hui sur le 2.0 ? Une interview de Nicolas de Dianous pour apporter une deuxième lecture à l'infographie (jointe à la fin de l'article).
→ [etourisme.info] Nicolas, si tu peux te présenter en quelques lignes.
[Nicolas de Dianous] Je suis un passionné de voyage et de tourisme depuis toujours, avec une grande partie de ma vie vécue à l’étranger. J’ai été responsable marketing de MonNuage.com pendant 5 ans. Avec une partie de l’équipe, nous avons lancé We Like Travel fin 2012, dont je suis directeur digital, afin de nous consacrer à 100% à l'accompagnement des acteurs du tourisme sur les médias sociaux.
→ Les objectifs de l’étude ?
Depuis plus d’un an, We Like Travel analyse les performances Facebook des destinations françaises et internationales en publiant des baromètres mensuels. En 2014, cette analyse s’oriente vers des études plus approfondies, afin d’évaluer la dynamique social media de secteurs d’activités tels que le tourisme de montagne, et bientôt l’aérien, le balnéaire, les tour-opérateurs… Ces études permettent de montrer le champs des possibles à nos clients et nos prospects, et de fournir une analyse pointant du doigt les bonnes pratiques, qui justifie les investissements des marques du tourisme sur les médias sociaux.
→ La base de sondage ? Les critères mesurés ? Sur quelle période ? Avec quels outils et garantie de pertinence ? etc.
L’étude est composée d’une partie France et d’une partie internationale. Pour les 2 catégories, nous avons cartographié l’ensemble des stations et destinations de montagne ainsi que la plupart de leurs réseaux sociaux (Facebook, Twitter, YouTube, Instagram, Pinterest). Cette cartographie a demandé des semaines de travail, et a permis d’étudier plus de 1000 acteurs. La liste est exhaustive même si nous ne sommes jamais à l’abri d’un oubli. En plus des stations de ski et des domaines skiables, les territoires pris en compte sont : les départements de montagne, les pages de régions dédiées à la montagne (ex. Côte d’Azur Montagne) et les regroupements territoriaux de type Montagnes du Jura ou N’PY Nouvelles Pyrénées.
A partir de cette liste, le relevé du nombre de fans et d’abonnés de chaque acteur a été effectué du 7 au 14 février 2014. Le taux d’engagement des pages a été calculé avec notre outil Sonar et notre partenaire Graphinium.com : il concerne les pages de plus de 5000 fans et a été calculé sur les réactions visibles des fans aux publications de chaque page entre le 1er décembre 2013 et le 15 février 2014.
Réseaux sociaux
→ En nombre de journées skieurs la France se classe première alors qu’elle est plutôt au milieu du tableau en terme d’animation et de résultats sur les réseaux sociaux. Comment l’expliquer ?
Les acteurs français de la montagne ne sont pas si mal classés, mais il y a effectivement des progrès à faire. Le nombre de fans par station de ski est par exemple 2 à 3 fois inférieur à celui des Etats-Unis ou du Canada. Ces pays ont une vraie culture des réseaux sociaux et les placent au coeur de leur stratégie de communication, avec des moyens, des équipes, et surtout une stratégie. En France, quelques destinations et stations de montagne ont une vraie stratégie social media, mais la majorité des acteurs se contentent “d’animer” des réseaux sociaux sans qu’ils ne soient au coeur d’un dispositif médiatique, et surtout sans réel objectif derrière.
→ Plus des 2 tiers des destinations de montagne (stations + domaines + territoires) présentes sur les réseaux sociaux sont dans les Alpes. C’est une différence importante ! Due principalement à la notoriété du massif ?
Oui les Alpes concentrent les 2 tiers des stations et destinations de montagne en France, et logiquement cette proportion se retrouvent sur les réseaux sociaux. Le nombre de “petites” stations est plus important dans d’autres massifs tels que le Jura ou le Massif central, qui ont parfois choisis de se regrouper pour être plus forts. C’est une stratégie qui fonctionne, à l’image de Montagnes du Jura qui est très bien classé.
→ Plus que le nombre de fans, on sait que l’algorithme Facebook favorise davantage la visibilité des publications qui génèrent de l’interaction. Comment est calculé le taux d’engagement dans cette étude ?
Pour chaque page Facebook de plus de 5000 fans, notre outil a analysé les réactions visibles des fans (j’aime, commentaires, partages) de chaque publication effectuée. La somme des interactions sur ces publications est divisée par le nombre de fans au moment du post. L’engagement final est la moyenne des réactions aux publications de chaque page Facebook.
→ As-tu constaté que les destinations de ski qui achetaient de la visibilité sur Facebook (Facebook Ads) avaient en conséquence une augmentation du reach (utilisateurs atteints) sur les publications “naturelles” ?
Toutes les pages Facebook de plusieurs milliers de fans ont investis des budgets de recrutement, en Facebook ads, opérations spéciales, etc. Quand le recrutement est bien effectué et que l’animation de la page est qualitative, la portée des publications est bonne et l’audience forte (Val d’Isère…). Nous avons noté plusieurs cas de grandes pages où le ciblage des fans recrutés était parfois “approximatif”, ce qui plombe effectivement d’emblée le reach. Le problème pour moi ne se situe en fait pas au niveau du recrutement (sauf fans pakistanais !) mais bien au niveau de l’animation, souvent trop soutenue (68 pages soit 35%, publient plusieurs fois par jour) ou inégale.
→ Sur Facebook, est ce que le mutisme des community managers sur une semaine est pénalisant pour la visibilité des publications à long terme ?
Ne pas animer une page ou trop animer une page sont des erreurs à ne pas faire, mais sur l’engagement des fans et la portée de publications sur le long terme, il est préférable de moins animer plutôt que de trop animer. Certaines pages se réveillent bien d’un éventuel sommeil si lel CM est bon, alors qu’il est beaucoup plus difficile de “récupérer” une page où les fans ne sont plus engagés faute de saturation.
→ Qu’est ce qui a fait que la publication des Gréolières des neiges a généré autant d’engagement sur une seule publication ?
Voici le lien vers la publication
Ce post illustre bien le champ des possibles sur les réseaux sociaux. La viralité peut être un formidable accélérateur d’audience grâce aux partages : il faut toujours garder en tête que les amis de vos fans sont vos prospects. Dans le cas de Gréolières les Neiges, c’est une recette simple mais inégalée : une belle photo, un texte simple qui implique les fans, postée un samedi matin = à un moment où les gens sont détendus.
→ Sur Twitter, il y a un écart important en nombre d’abonnés entre la première station française et la première station américaine. Est-ce à dire que ce média n’est pas encore utilisé avec la meilleure efficience en France ?
Twitter est en forte croissance et le potentiel d’audience y est énorme. Les Français s’y mettent de plus en plus, il faut que les marques suivent le mouvement. Je constate une forte présence des acteurs de la montagne sur Twitter, mais une faible qualité de l’animation, souvent en synchro automatique avec une page Facebook par exemple. Twitter est le réseau où les community managers de montagne ont le plus d’efforts à faire et de technique à apprendre.
→ La Vallée de l’Ubaye est le compte le plus suivi sur Instagram en France alors que le massif n’apparaît jamais parmi les premiers sur les autres sites de réseau social. Est-ce à dire que leur stratégie d’animation porte principalement sur Instagram ?
Cela peut être un hasard devenu une stratégie. Le community manager reste un humain avec ses affinités et ses préférences. Quand on a plus d’affinités avec un réseau social plutôt qu’un autre il faut compenser, mais parfois le temps manque et on peut être tenté de concentrer ses efforts là où “ça marche”. Et en l’occurrence cela marche pour ce compte bien animé, qui profite d’une faible concurrence.
Youtube
→ Les chaînes Youtube les plus regardées postent des vidéos chaque semaine. C’est à dire qu’il vaut mieux miser sur des productions de clips vidéos courts et publiés régulièrement plutôt que sur la parution d’un film ponctuel à gros budget ?
Tout est une question de qualité, mais la vidéo de présentation globale- d’un territoire ou d’une station me semble être un point de départ incontournable avant de se lancer dans une production régulière qui nécessite une stratégie efficace et des moyens. Il est effectivement dommage de voir des chaines avec un seul film qui vivote après que son budget de promotion ait expiré, et de bons exemples que nous avons cité montrent la marche à suivre sur l’animation d’une chaine YouTube au moins plusieurs fois par an.
→ Seulement 164 abonnés en moyenne par station sur Pinterest tous pays confondus... Est-ce réellement pertinent pour les stations d’animer ce site de réseau social ? Quelles sont les stratégies d’animation pour générer de l’interactivité ?
Quand on a un site web vieillissant ou une difficulté à afficher sa marque de façon séduisante, Pinterest peut devenir un magnifique outil de présentation et de sélection très intuitive des choses à faire et des atouts d’un territoire, avec une capacité forte de rediriger du trafic. Le problème de Pinterest en France est pour l’instant son audience plus confidentielle, malgré des exemples qui prouvent le contraire. Si l’on doit choisir faute de moyens, Instagram est prioritaire sur Pinterest.
Recommandations
→ Globalement sur l’ensemble des médias sociaux, comment les destinations ou stations pourraient améliorer l’interactivité sur leurs propres publications ?
Quelques principes de community management simples
permettent de maintenir une audience forte :
1. avoir une stratégie éditoriale et un planning harmonieux
2. rester dans le plaisir et dans la conversation
3. choisir des contenus (vraiment) séduisants
4. ne pas trop poster
5. se former aux réseaux sociaux mal maîtrisés en s’inspirant notamment de ce que font les meilleurs CM tous secteurs confondus
→ Comment pourraient-elles favoriser davantage le contenu publié par les touristes ?
Les touristes partagent déjà des contenus, ils ne sont simplement pas canalisés et mal repérés. Il faut médiatiser des hashtags, être en veille sur les tweets, les photos, et les publications qui mentionnent la marque ou le territoire. Il y a un problème de visibilité des réseaux sociaux des marques touristiques auprès des touristes présents sur le territoire (tout le monde pourrait rajouter le hashtag de la station qu’il est en train de prendre en photo, si seulement on le savait) et un problème de temps et d’outils consacrés à la veille et à la conversation avec ces contributeurs, qui sont pourtant les premiers ambassadeurs des destinations touristiques et qui ont les contenus les plus engageants auprès des fans lorsqu’ils sont partagés.
Merci Nicolas. Et pour conclure, voici l'infographie et le lien de téléchargement vers l'étude complète ! On attend impatiemment la prochaine ;-)