Une bicyclette, un appareil photo d’une valeur de 35 dollars et un œil de lynx, ce vieil homme passerait inaperçu aux yeux de tout un chacun, sauf pour ceux qui connaissent le talent de ce photographe qui à l’âge de 85 ans peut clamer haut et fort être le 1er photographe de street style 30 ans avant la naissance de The Sartorialist.
Bill Cunningham scrute et harpente depuis 50 ans le style et les tendances portées dans les rues de New York. Au contraire des paparazzis, les plus grandes stars s’arrêtent avec plaisir devant son objectif pour dévoiler leur style.
« On s’habille tous pour Bill » déclare Anna Wintour rédactrice en chef du Vogue américain et grande prêtresse de la mode.
Après quelques mois d’études à Harvard, avec l’intention d’assouvir sa plus grande passion : la mode, il devient d’abord chapelier sous le nom de William J., et il reçoit entre autre Marilyn Monroe qui tombe sous le charme de ses créations féeriques. N’ayant pas froid aux yeux, il n’hésite pas à faire le serveur dans des restaurants et drugstores pour financer la fabrication de ses délirants chapeaux. Il s’est improvisé journaliste mode dans les années 50 mais sa réelle passion voit le jour lorsqu’un ami lui fait cadeau d’un appareil photo. Il commence alors à photographier le look des gens dans la rue.
« Les célébrités et leur robe ne m’intéressent pas… mais les vêtements eux, oui! » Bill Cunningham.
Un matin de 1978, alors qu’il cherche des sujets à photographier, il remarque un manteau de fourrure, “simple mais avec une très belle coupe”, porté par une dame. Il enchaîne les clichés de ce manteau, mais ce n’est que quelque temps après qu’il réalise que la femme ainsi mitraillée n’est autre que… Greta Garbo. Il décide alors de présenter cette image à l’éditeur du New York Times qui décide de la publier sur une demi page. Cette publication marque le début de la rubrique “On the Street“, considérée comme véritable référence, qu’il composait chaque semaine.
“Je ne suis pas un bon photographe, confesse Cunningham. Je suis trop timide, pas assez agressif.”
Il aura fallu 8 ans au documentariste Richard Press pour convaincre Bill, et 10 ans pour réaliser ce film exceptionnel sur ce photographe arpentant les rues de New York depuis un demi-siècle. L’un des personnages les plus respectés et influents de l’industrie de la mode, mais aussi l’un des plus mystérieux. Car, même si Bill Cunningham a passé toute sa vie parmi la tribu de la mode, il n’en fait pas partie.
A 83 ans, il continue aujourd’hui sa passion et est toujours à la recherche des meilleures silhouettes. Il apparaît comme un moine ayant fait vœu de pauvreté comme si quelque chose provenant du monde réel l’avait déçu pour toujours. Il vit seul dans un minuscule appartement et refuse presque toute forme de médiatisation.