Il n’est pas inutile de rappeler que la plupart des musiques de films des années 40 à 60 disponibles aujourd’hui au disque sont des interprétations et des enregistrements récents à partir de partitions composées à l’époque ; d’où la qualité acoustique évidente des CD. Assurément, il s’agit d’un précieux travail de prospection en hommage à tout un pan de l’histoire du cinéma : la musique de film.
La bande originale de « L’aigle des mers » reçut un Golden Globe pour la meilleure musique de film, en 1961.
Pour la musique du film-fleuve de John Houston, il avait été pressenti de très grands compositeurs : Igor Stravinsky, qui déclina l’invitation, mais dont la collaboration aurait propulsé le film dans l’Histoire de la musique avec un grand H. Puis l’Italien Goffredo Petrassi, qui avait été le professeur de composition d’Ennio Morricone. Puis Morricone lui-même, qui présenta quelques esquisses avant de renoncer. Enfin, la bande originale a été réalisée par le Japonais Mayuzumi, dont le métier n’était plus à démontrer en 1966.
Sunset Boulevard, monument du cinéma noir américain au succès phénoménal, a reçu des brassées de récompenses à sa sortie en 1949, y compris pour la musique du film. Mais il aura fallu attendre plus d’un demi-siècle pour que la musique de Waxman se détache du film et prenne son envol en une édition discographique. Etrange destin que celui de certaines bandes originales qui ont droit, dans le meilleur des cas, à deux naissances : une fois à la sortie du film sur les écrans, une autre fois à l’édition au disque qui leur confère leur réelle autonomie. Entre les deux, il peut s’écouler parfois un temps incroyablement long. Pour « Sunset Boulevard », le temps d’une commémoration : un demi-siècle.
Contient une étonnante citation de l’Histoire du soldat de Stravinsky et Ramuz (plages 3, 4, 9 et 12). Citation peut-être involontaire, tant les sujets du conte de Ramuz et du film de Sam Penkinpah sont dissemblables. Mais le jeu de la pêche aux citations est toujours amusant.
Contient aussi un lieu commun récurrent du langage musical cinématographique étasunien : la rutilante trompette se détachant solitaire à l’horizon. Réminiscence du clairon militaire et des hymnes patriotiques. Ce constat musical n’enlève d’ailleurs rien à la qualité des « Chiens de paille », authentique chef-d’œuvre du cinéma et prospection terrifiante des ressorts de la violence.
André Prévin : l’homme qui franchit les ponts entre les genres musicaux avec le plus absolu naturel. L’artiste qui efface les frontières stylistiques avec une élégance suprême. Une merveille. En tout cas le musicien pour lequel le vocabulaire me manque à chaque fois, quand il s’agit de dire mon admiration.
« Diamants sur canapé » est ce film qui contient une chanson devenue standard dès sa parution sur les écrans : Moon River. Elle fut rapidement reprise par Louis Armstrong puis par quantité d’autres musiciens. Mais auparavant, elle propulsa l’équipe artistique du film au firmament de la gloire. D’abord Henry Mancini le compositeur qui reçut un Oscar pour la chanson et un autre pour la superbe bande originale cool-jazz. Puis Audrey Hepburn qui obtint l’Oscar de la meilleure interprète féminine ; et finalement, Blake Edwards le réalisateur, dont le film est devenu un des plus célèbres de sa production.
Réédition pour le 50ème anniversaire du film ; une musique toujours aussi fringante, cool et enjôleuse.
La superbe musique de « l’Egyptien » est une collaboration de deux des plus grands compositeurs américains de musiques de films. Ici, la patte de l’aîné des deux - Alfred Newman – est plus perceptible, par le lyrisme et l’ampleur des thèmes musicaux. Le génie de Bernard Herrmann, qui révolutionnera le langage de la musique de film et influencera toutes les générations ultérieures de compositeurs, se révélera un peu plus tard, surtout dans sa collaboration avec Alfred Hitchcok.
En 1934, Miklós Rózsa visionnait à Paris Les Misérables, dont son ami Arthur Honegger avait signé la musique. Cette séance fut un événement décisif pour Rózsa qui découvrait ce jour-là le potentiel créatif et lucratif de la musique de films. Cette séance conditionna toute la suite de la carrière du compositeur d’origine hongroise à Hollywood.
Attention. Il s’agit bien ici de la musique du seul, de l’authentique King Kong de 1933, tout en carton-pâte doublé de poils de vaches. (Pauvres vaches). Le King Kong qui arrachait des cris d’effroi aux nombreux figurants du film. La musique est signée du grand Max Steiner, véritable King Kong de la musique de film hollywoodien. Version somptueusement restaurée et interprétée par l’orchestre symphonique de Moscou (qui en a vu d’autres !).
Paul Kristof