Le marketing évolue sous l’impulsion d’Internet et des mutations et des nouveaux usages que le réseau engendre. Le marketing mix traditionnel avec les 4P (prix, produit, distribution, promotion) évolue en e-marketing et même marketing 2.0 ou 3.0. Ayant été directeur marketing de ColiPoste de 2000 à 2003 (avec entre autres le lancement de la gamme rapide avec suivi et sans signature pour répondre au développement attendu du e-commerce et son corollaire le site de suivi des colis), j’ai souhaité faire un point sur les tendances structurantes du marketing à venir grâce à la vision croisée de 7 spécialistes via 3 questions. Les deux premières font l’objet de ce billet. Une troisième en rebond suivra dans un prochain billet. Le sujet est d’autant plus important que le système d’information et le marketing se retrouvent tous les deux sur le terrain du numérique avec des questions de périmètre.
Les questions sont :
1. Comment définiriez-vous l’évolution du marketing avec le numérique, les réseaux sociaux, le big data et les autres facteurs structurants ?
2. Quelles seraient selon vous les évolutions du marketing à venir à moyen/long terme ?
Enfin, en bonus la vision résumé et pertinente du professeur Jean-Pierre Helfer, Directeur de l’IAE de Paris, auteur d’ouvrages sur le marketing et la stratégie d’entreprise. J’avais suivi ses cours à l’IAE et avais apprécié une de ses phrases : « On est bien dans une institution que si on se l’approprie ».
1. L’information et le pouvoir ont changé de camp. La crise obscurcit tout. L’expérimentation (presque toujours possible) remplace l’étude de marché. Le faisable explose (big data), le possible réaliste est stable. L’agilité nécessaire succède à l’expertise indispensable. Le temps est le maître absolu. La technologie domine
2. Le consommateur sera rebelle. Le slow succédera au fast. L’intelligence dominera. L’externe sera privilégié par rapport à l’interne de l’entreprise. Le RoI sera le maître absolu. La transversalité sera reine. Le shopper sera plus important que le consumer ou le customer.
Bonne lecture et bonne réflexion. Le débat est ouvert.
#Mercenaire 1 – Franck La Pinta, co-auteur de marketing RH
1. Le marketing s’est amélioré par sauts successifs, tous portés par une amélioration de l’information : dans les années 1950 aux Etats-Unis avec les instituts de sondages, puis quelques années après avec l’informatisation, plus près de nous, le développement de l’activité sur Internet qui a permis un enregistrement et un traitement des comportements. C’est donc bien les progrès dans le traitement des données qui font évoluer le marketing. Avec le numérique, les marketeurs disposent d’un formidable aspirateur de données, et aujourd’hui de capacités de traitements qui allient puissance et intelligence.
2. Les usages récents des médias sociaux sur mobile ont vu naître de nouvelles données avec la géolocalisation. Deux autres tendances devraient impacter le marketing : un nouveau rapport avec le temps : l’immédiateté des réponses aux sollicitations et des interactions motivées par le sentiment plus que par le raisonnement : c’est l’instantanéité et l’émotion du « like ». Il est certain que le marketing sera demain de plus en plus pertinent, performant, personnalisé. L’optimiste y voit moins d’intrusion et une meilleure adéquation des offres faites avec les besoins et les profils des clients ; le pessimiste s’inquiète d’une collusion entre information et marketing et d’un appauvrissement résultant de la disparition de la curiosité, de l’aventure, du hasard, de l’imprévu.
#Mercenaire 2 – Jean Watin-Augouard, historien des marques/rédacteur en chef de la revue des marques
1. Nous passons du marketing de la domination au marketing de l’humilité. Le nouveau monde, celui de l’ubiquité, de l’immédiateté, de la réactivité et de la connexion, place les consommateurs au cœur de la révolution, non seulement en tant que récepteurs, fonction traditionnelle, mais aussi en tant qu’émetteurs. Ils peuvent, d’un clic, détruire la réputation d’une marque et de l’entreprise. Ils peuvent, avec ce même clic, fortifier, consolider cette même réputation.
Le marketing doit donc, en particulier, maîtriser, interpréter et transformer en actions pertinentes toutes les informations collectées sur les consommateurs.
Pour autant, face à la multiplication des canaux et la volonté de multiplier les points de contact, la marque doit conjurer quatre pièges : le bavardage, le mensonge, l’intrusion et le panurgisme. Elle doit plus que jamais avoir dans son jeu les quatre cartes de la transparence, de la vérité, de l’authenticité et de la singularité. Elle doit se méfier du temps de l’euphorie qui peut, vite, devenir temps de l’ivresse. Méfions-nous des peaux d’âne !
2. L’urgence, pour la marque, est de durer, de savoir se projeter dans l’avenir, de maîtriser son destin. Le marketing doit donc s’interroger sur les raisons de la longévité de certaines marques ? L’alchimie entre quatre savoirs qui fondent sa singularité et sans le respect desquels sa pérennité n’est pas assurée. C’est par son savoir-être, établi dès sa création par le fondateur, que la marque définit sa finalité, sa raison d’être, sa vocation. Le « connais-toi-toi-même » est un impératif catégorique oublié. Un acronyme doit disparaître du langage marketing : ADN !!!! C’est une mauvaise réponse à une bonne question : « qui suis-je ? ». C’est ensuite par son savoir-faire, sa gouvernance, que sa modalité s’exprime et crée le sillon duquel elle ne doit jamais s’égarer mais qu’elle doit creuser pour y trouver les clés de sa modernité. Combien de papillonnages et diversifications hasardeuses, orgueilleuses ! C’est par son savoir-offrir, sa matérialité, que la marque apporte une valeur ajoutée distinctive dans ses produits, créatrice d’attachement, de fidélité des consommateurs et de recommandation de ces mêmes consommateurs. Combien de produits inutiles, lancés et mort-nés ! C’est enfin par son savoir-dire, ou son langage propriétaire, que la marque exprime sur le plan publicitaire, ses trois premiers savoirs. Combien de messages publicitaires mensongers, insipides, sans résonnance ! Au reste, qu’est-ce qu’une grande marque ? Celle qui peut répondre, sans crainte, à la question : « Si je disparais, vais-je manquer à mes consommateurs ? ». Posons également la question à ces mêmes consommateurs.
#Mercenaire 3 – Denis Failly, Inbound Marketer
1. Malgré les prophéties auto réalisatrices, le recours à la pensée magique (et autres memes) qui rassurent et encouragent « entre soi », l’activité et l’innovation, on constate dans les entreprises beaucoup de décisions différées, d’inertie, de pensées en silos, de fondamentaux que l’on pensait acquis et qui le sont surtout dans nos cercles « d’initiés ». Plutôt que de parler des buzz words du moment je vais parler d’Inbound Marketing.
A court et moyen terme je pense qu’il y a énormément de chantiers dans le domaine de l’omni-canal, de l’expérience client qui passent notamment par l’appropriation et la mise en oeuvre de stratégies d’Inbound Marketing. Ce marketing d’attraction (par opposition à l’Outbound, marketing d’interruption) part de la réalité qu’une expertise se prouve plus qu’elle ne se proclame. Il repose sur trois piliers (contenus, SEO et médias sociaux) et sa finalité est la lead generation, la conversion client et… la fidélisation.
Le carburant de cet écosystème est le contenu, expert, « storytellé », multi, voire transmédia, appelant de nouvelles compétences et organisations (« content room » ?) et propulsé idéalement via des solutions de marketing automation, selon le contexte, la bonne cible (Personas…), et en phase avec l’état d’avancement du prospect dans le tunnel de conversion.
2. · Faire toujours plus ou un peu mieux la même chose ; le client demeure finalité des processus et non pas générateur : l’Outbound marketing
· Litanie des « CO », le client est un partenaire, un co-laborateur pour co-produire la proposition de valeur, l’offre : Marketing collaboratif
· L’avènement de l’ATAWADAT (AnyTime, AnyWhere, AnyDevice Anything) avec l’Internet des Objets ET des Sujets (Humanware) où clients et marques sont « augmentés », dans un bassin numérique de réseaux pervasifs, d’interfaces flottantes, fluides, temps réel: le U-Marketing (U comme Ubiquitaire)
Mais au-delà des outils, algorithmes, buzzword du moment, réductionnisme de certains modèles linéaires, je dirais comme Michel Serres, nous sommes condamnés à devenir intelligents et à intégrer la responsabilité, l’éthique à sortir de l’allégeance à des paradigmes dépassés et à prendre en compte la complexité dans nos réflexions et nos actions marketing.
Enfin je crois à l’avènement du Géné-cialiste, une fonction trans-face (et non pas inter-face), un marketer hybride apte à réfléchir et à agir de façon modulaire et adaptative ; à la fois généraliste (approche holiste et écosystémique) et un spécialiste d’un domaine (outil, process, technique), un chef d’orchestre apte à dialoguer « en connaissance de cause » avec toutes les parties prenantes.
#Mercenaire 4 – Pierre Klifa, fondateur et dirigeant de SKERZO M & C.
1. L’homéostasie est la faculté d’auto-régulation d’un système à conserver son équilibre de fonctionnement quels que soient les facteurs extérieurs qui peuvent/pourraient le déréguler. C’est pourquoi, je retiens bien volontiers cette analogie pour définir l’évolution actuelle du marketing dans un écosystème numérique perpétuellement innovant, changeant et mouvant.
C’est à présent un marketing “adaptif” qui émerge fort des valeurs ajoutées techniques du digital actuel qui lui permettent d’élargir l’horizon des possibles. Ainsi un Big Data, des SI, du crowdsourcing, des réseaux sociaux qui mesurent, analysent, détectent des attentes à satisfaire, identifient des tendances, créent, communiquent pour in fine permettre aux marketeurs de proposer aux marchés une offre produits ou services davantage pertinente.
Nous n’oublierons pas de rappeler que ce marketing adaptif intègre comme jamais les notions clefs de customisation, de one to one et ce jusqu’à la production (imprimantes 3D obligent). Ajouter à cela, la montée en puissance inexorable du e-commerce qui bouleverse irrévocablement les fondamentaux du commerce physique. Mercedes n’hésite plus et teste à présent son concept de concession numérique… Conclusion, c’est pour une majorité de secteurs d’activité toute leur chaîne de valeur qui est appelée à muter ou a déjà muté. Bien entendu, l’enjeu essentiel pour nombre d’entreprises est/sera de réussir leur adaptabilité digitale pour assurer leur pérennité technique et commerciale. Le champ des possibles du marketing s’est en moins de 10 ans élargi comme jamais dans le passé. L’homéostasie marketing est à présent établie !
2. Je répondrai bien volontiers à cette question d’un point de vue strictement conceptuel en pensant que les évolutions marketing à venir ne pourront bien entendu faire abstraction des apports et mutations structurelles profondes du digital. Plus rien ne sera comme avant ! tout simplement du fait de ce changement radical que représente ce que j’appellerai bien volontiers “la réalité globale augmentée” à laquelle sont à présent soumis (sic) tous les acteurs économiques et sociaux. Créer, communiquer, entreprendre, vendre, choisir, voter, … tout change ou changera. Sachant que la génération Y et sa “connect attitude” représentera 75 % des effectifs des entreprises en 2020 ! la conception marché des entreprises et des services publics ou para publics se fera sur la base de nouveaux modèles industriels, serviciels ou sociétaux. J’ajouterai que ceci n’est pas sans poser comme on le sait déjà des questions fondamentales qui deviendront encore plus cruciales à court, moyen ou long terme sur la liberté (face au contrôle voire la censure), la sécurité des données (NSA, Facebook où êtes-vous ?), la faculté de discernement (question d’éducation comme toujours), la capacité de choix éclairé (face à des systèmes/outils d’influence toujours plus nombreux), … Le marketing devra agir dans un écosystème digital dont la complexité naissante et les maîtres du jeu laissent augurer que Orwell n’est peut-être pas loin. La “réalité globale augmentée” produira-t-elle des consommateurs et des citoyens “amoindris” ? Est-ce que Big Data engendrera Big Brother ? Tel est l’enjeu essentiel que le marketing (dès aujourd’hui et demain davantage) ne pourra ignorer pour être honnête et efficient !
#Mercenaire 5 – Anthony Poncier, social business directeur europe chez Publicis Consultants
1. A travers un renforcement de plus en plus important du digital (réseaux sociaux, big data…) la connaissance des cibles du marketing est de plus en plus importante. De ce fait, cela conduit à une relation de plus en plus one to one (avec la mise en place de programme e-ambassadeurs) en lieu et place du one to many. Cela générant une relation plus forte de l’engagement client, car à l’aide du big data, cela permet de savoir beaucoup plus de choses sur ce dernier. Mais cela permet aussi de savoir là où il se trouve, quand il souhaite être contacté et comment. Avec comme conséquence possible un renforcement de la loyauté et de la rétention client. De plus, cela va permettre de rentrer dans un cycle de progrès continue et d’amélioration de la stratégie marketing grâce aux différents feedbacks récoltés (à condition de savoir trier, analyser et ordonner les nombreuses données. Et là il y a encore du boulot). Ce qui sous-entend bien sûr, dans un cadre d’évolution de repenser en interne vos processus, revoir vos silos, votre management… bref repenser votre organisation.
Cela veut aussi dire que le métier se spécialise, avec de plus en plus de postes spécifiques et complémentaires (n’existant pas toujours dans les écoles) afin de couvrir l’ensemble de ces nouveaux champs. Et si votre direction marketing est de plus en plus soumise à la « tyrannie » des données, dites-vous bien que vos clients aussi sont sur-sollicités et donc mettent en place une économie de l’attention. Cela renvoie donc à la gestion et diffusion de vos contenus (brand content) afin d’attirer leur attention, amenant chacun à privilégier la qualité sur la quantité en lien avec son business (donc aussi récolter des news en interne).
2. Forcément toutes ces données vont avoir un fort impact sur le marketing prédictif. Déjà que l’âge d’or des planeurs stratégiques est passée, on peut se demander si cela ne leur met déjà pas un pied dans la tombe (ou alors l’un d’eux sera capable de démontrer que les données ne sont pas suffisantes pour tout prévoir). De même, si le terme « brand content » est sur toutes les lèvres à l’heure actuelle et représente le saint Graal des agences, celui-ci devrait aussi voir sa fin programmer tel qu’il est conçu actuellement. Les gens sont de plus en plus hyper connectés, veulent tout en temps réel. Donc prévoir une grille éditoriale, même avec du contenu de qualité, cela va devenir vraiment complexe, pour ne pas dire vain. Ou alors chaque entreprise devient réellement, à la Red Bull, sa propre agence média. Ce qui va nécessiter un vrai shift culturel, dont la majorité des entreprises n’imagine même pas le saut que cela représente (car cela est tout aussi vrai en interne). Ce qui va renforcer d’autant la nécessité du travail en réseau des entreprises.
Mais cette idée de contenu est aussi en partie contraire à la logique des médias sociaux. Le gens ne « consomment » pas réellement du contenu sur les médias sociaux (ils ne sont pas un public comme sur les médias traditionnels qui regarde de manière passive, commentaires ou non via Twitter), ils interagissent, créent leur propre grille de programme et les interactions qui vont avec en temps réel. De fait, ce sont de plus en plus les gens qui vont compter, plutôt que les contenus en tant que tels. Le marketing (agence ou entreprise) va de plus en plus être une API qui va offrir des services, de l’information et faire office de passerelle, plus que création de contenu en tant que tel. On va aller vers de plus en plus vers de la gestion de flux continu d’information, plus que de la gestion de stock de contenus programmés.
Maintenant soyons aussi réaliste, à moins d’un retournement majeur, les entreprises et les agences en sont majoritairement au balbutiement des programmes d’ambassadeurs, à la création de contenu avec des newsrooms. Bien souvent le tout est décoléré, car organisation et communication/marketing le sont aussi. Il va encore couler un peu d’eau sous les ponts avant d’en arriver là.
#Mercenaire 6 – Rodolphe Falzerana, Digital Marketing Manager de l’Institut G9+
1. L’outbound marketing est mort, vive l’inbound marketing ! la preuve en image
Les réseaux sociaux sont stochastiques, ou plutôt totalement chaotiques. Le big data nous laisse entrevoir des usages extraordinaires, inspirés par les paquets de données que représente un internaute. La mobilité est inhérente (SoLoMo). Le numérique devient un nouveau territoire qui se mêle à toutes les économies, y compris à nos plus simples objets, telle une brosse à dents, merci Kolibree.
Inévitablement le marketing qu’ont connu mes parents est définitivement mort. Le « plus blanc que blanc », la crème anti-âge « qui rajeunit vraiment »… La vérité si je mens ! Marketing sans substance… Finis les bons vieux plans marketing, finis les profils skyzo-socio-démographiques, fini le rassurant déterminisme. C’est peut-être pour cela que le big data semble si prometteur, en laissant présager qu’en exploitant toujours plus de données nous pourrions retrouver un peu de prédictibilité. Comment ? Alors que l’on nous propose toujours plus de choix, qu’il y a toujours plus d’annonceurs et que le consommateur est toujours plus rodé : il devient « consommacteur ». Non, plus de déterminisme. On vous jurera le contraire mais Numericable ne s’attendait pas à un bad buzz avec sa dernière pub considérée comme très sexiste, et ce n’était pas faute d’y avoir réfléchi. Des mois de planification peuvent être balayés par quelques posts ou tweets.
Et pourtant ! Si on en revient à sa définition même, le marketing devient d’autant plus indispensable et doit retrouver ses lettres de noblesse, sa fonction première. Il représente le lien le plus important avec les « consommacteurs », mais il se doit d’incarner également la clef de voute entre l’appareil productif et l’appareil commercial de l’entreprise.
2. C’est l’approche du marketing qui doit évoluer profondément, nommée parfois l’inbound marketing. Startup Weekend, une organisation d’événements de création de start-up, l’a bien compris : l’échange plutôt que le message, être captivant plutôt que de le proclamer, passer d’un sentiment d’artifice à un sentiment fort d’adhésion. Ils ont bâti une communauté internationale avec plus de 100 000 entrepreneurs et 1 000 événements.
L’inbound marketing représente le nouveau vecteur de la stratégie : que le « consommacteur » adhère à votre vocation, parce que vous êtes crédibles et légitimes. Mais pour tenir ses promesses, c’est aussi l’entreprise qui doit se réinventer. Le pionnier de la vente de chaussures en ligne Zappos, d’abord connu pour garantir un service client hors du commun et une présence en ligne de référence, opte pour un management holistique et des méthodes agiles ; et passe à l’holacratie. Ainsi Zappos supprime tous les postes de managers. Des start-up comme Azendoo adoptent le lean startup.
De l’innovation participative à l’expérimentation itérative, avec au centre l’inbound marketing. Impulser cette organisation souple et efficace à toute l’entreprise, c’est aussi l’enjeu et l’avenir du marketing, cette clef de voute…
#Mercenaire 7 – Grégory Pouy, fondateur de LaMercatique, cabinet de conseil en marketing
1. Je suis un fervent défenseur de l’idée que le digital n’est pas une révolution marketing, ni même une révolution de la communication.
Néanmoins, pendant plusieurs décennies, nous avons fait fausse route en pensant que les consommateurs étaient idiots et que par conséquent, le marketing consistait à revamper des produits et faire croire aux consommateurs qu’ils étaient bien meilleurs et que la communication consistait à abrutir ces derniers de messages publicitaires.
Si cette formule a fonctionné un temps, les consommateurs se sont éduqués par eux-mêmes, ont défié les promesses marketing et le numérique leur a donné la capacité de le faire à grande échelle, de s’entraider, de comparer, de mieux choisir.
Finalement nous sommes redevenus des commerçants et pour de nombreuses marques qui étaient habitués à acheter du GRP en racontant n’importe quoi, c’est douloureux.
Désormais, il faut compter avec le consommateur. Toutes les marques se disent « centrées sur le client » mais la réalité est bien loin de cela, elles réfléchissent d’abord par leurs processus internes, leurs problématiques propres… Le consommateur arrive après. En cela, le numérique oblige les marques à limiter le « bullshit marketing », a mieux redéfinir leurs basiques : raison d’être et valeurs. La raison d’être est d’autant plus importante à redéfinir que le numérique permet de supprimer des frictions consommateurs qui jusque-là n’étaient pas solvables.
Cela implique qu’une marque peut se faire « disrupter » par un nouveau venu qui va redéfinir la manière de faire leur métier.
Ce nouveau venu sera souvent numérique car finalement, le « digital » c’est surtout une question d’état d’esprit, un esprit définitivement tourné vers le client.
2. Je crois que les évolutions vont se faire dans l’écoute des consommateurs, dans des propositions de valeurs plus intéressantes. Désormais les consommateurs ne s’intéressent pas seulement à votre produit fini mais à la raison pour laquelle vous le faites, ils attendent aussi que vous leur apportiez bien plus que le simple produit mais une manière de l’utiliser, de rendre la consommation de votre produit/service le plus simple possible.
Dès qu’il y a moins de frictions vous gagnez nécessairement le coeur du consommateur.
Si les QR codes n’ont pas vraiment décollé par exemple, c’est simplement que leurs lectures n’était pas natives dans l’appareil photo de leurs smartphones, ils ont encore besoin d’installer une application supplémentaire et c’est une étape de trop pour beaucoup (sans parler du manque d’intérêt derrière les QR codes en général: « scannez-moi pour avoir encore plus de pub… ».
La communication aussi évolue bien sûr. On entre dans des phases de réactivité beaucoup plus fortes, le marketing en temps réel bat son plein depuis une année avec en fer de lance Oréo et son coup d’éclat au Superbowl l’an dernier bien sûr. Mais plus que cela, je crois à un retour à des vraies valeurs, à une fin de la mise en avant personnelle.
Je crois à un usage plus respectueux du téléphone portable et des réseaux sociaux, une forme de rééquilibrage vers quelque chose de plus raisonné. Je le souhaite en tous cas.