J’ai trouvé cet essai tout à fait passionnant. Il est à la fois riche en notions juridiques, en anecdotes historiques, en réflexions philosophiques et même en références littéraires. On part d’un procès, au Moyen Age, dans lequel le juge a autorisé le chien à être confronté au meurtrier supposé de son maitre, étant le seul témoin du crime. Cette anecdote beaucoup reprise permet de poser la question de la relation entre le maître et le chien: a-t-il des sentiments? des désirs? Au travers de scènes de romans, de faits divers, d’évolution des lois, l’auteur s’applique d’abord à décrypter l’animal-objet, celui pour lequel on n’a aucune considération parce qu’après tout, ce n’est qu’une bête. Expériences médicales sur chien vivant (schéma à l’appui), chiens chargés d’explosifs et envoyés en première ligne sur les champs de bataille, combats de chien donnant lieu à des manipulation génétiques pour créer des machines de combat, jusqu’au destin tragique de la petite Laika envoyée dans l’espace par les Russes, on ne nous épargne rien et c’est un crève-coeur pour tout amoureux des bêtes que de lire ces choses considérées comme normales dans certains contextes.
Pour autant, on n’oublie pas l’autre extrême, celui de ces chiens rois, que les dames dans les salons gavent de sucrerie et qui prennent parfois la place du mari. De manière étonnamment juste, l’auteur démontre que le chien n’est autre qu’une création de l’homme pour être un réceptacle à amour inconditionnel, une créature à qui l’on donne les restes à manger, qui dort dehors sous la pluie, mais qui pour autant vouera à son maitre une soumission et un amour total.
Il est alors plus facile de comprendre pourquoi le statut de l’animal est si difficile à définir: peut-on accepter qu’un animal hérite de ses maîtres, fasse l’objet d’une garde alternée, soit enterré avec ses maîtres, sans lui octroyer les mêmes droits que l’être humain? Les preuves abondent sur l’importance qu’un chien prend dans une famille, dans une vie et à quel point les souffrances animales peuvent émouvoir l’opinion publique. L’affection portée à un chien n’est plus perçue, comme il a pu longtemps l’être, comme un caprice de bonne femme qui gâte un cabot comme elle gâte un enfant.
Ce livre m’a fait beaucoup réfléchir. Je ne suis pas férue de politique, pourtant sur ce sujet j’ai tendance à m’interroger. J’ai un chien et un chat, les deux sont identifiés à mon nom, vaccinés, déclarés à l’assurance et éduqués (même le chat, oui-oui) pour être des compagnons et non des fardeaux pour moi ou pour mon entourage. Je leur ai aménagé ma maison, je paye pour leur santé et leur nourriture. Et ça me parait tout à fait normal. Alors si la loi doit s’insinuer dans notre vie privée pour certaines choses, pourquoi pas pour cela…
En attendant que le sujet soit tranché, voici toujours mon objet de compagnie à moi:
La note de Mélu:
Très instructif et accessible. Un grand merci à Babelio pour cette découverte!
Un mot sur l’auteur: Victoria Vanneau est historienne du droit et des institutions.