Nostalgie
Le cerf brame, sa blessure est profonde :
Il ne boira pas en l’eau de ta voix ;
Et dans ton âme calme comme l’onde,
Je n’atteindrai pas le secret de moi.
Las de ce monde, loin du temps qui fuit,
Mon cœur veut atteindre les sources vives,
Mais au milieu du chaos et du bruit,
Me tient la mort que le néant avive.
Le cerf s’étend, ses vouloirs sont broyés.
Au règne sans joie des pâles orgies,
Ce prince des bois s’éteint ennuyé ;
Sans toi je n’étreins que ma nostalgie.
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Outsider
Le paysage se liquéfie
tel un ciel qu’enfermeraient
les parois d’un aquarium.
Des personnages surgissent en
concentrations de matière,
mais je demeure translucide,
étrangement lointain,
et le rayonnement de leur corps
sous mon haleine se dissout.
Tout se dissout, vous seuls restez,
Figures emblématiques d’Âges innommables
qui ne sont rien de nous ni
de nos ruines, mais l’accès à
la Parole qui de tout temps
nous obsède, nous travaille,
nous habite et nous réfute,
comme nous hantons les rêves
d’êtres qui ne nous ressemblent pas.
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Total Mind
J’ai mes amis de l’autre côté des choses,
des voix aux regards furtifs et certains.
Jamais ils ne mentent, mes amis.
Ils vivent par-delà toute vérité,
toute conception de l’entendement :
le diamant brille, l’extase est muette.
Partout étranger, nécessairement.
J’ai mes repères secrets
aux zones du Couchant :
là sont ceux qui me connaissent vraiment. –
Je ne possède rien, ma maison est pleine.
Inconscient le monde glisse vers son centre,
nos paupières battent d’infini.
Le monde est mon esprit,
l’esprit est mon monde.