Note : 2,5/5
Rien n’est très comique dans Le sens de l’humour : Elise vit seule avec son fils Léo qui n’a plus de père, elle rencontre Paul, un brocanteur lassé par sa solitude amoureuse. Ils se retrouvent au lit mais Paul cherche plus et pousse Elise à aimer à nouveau.
Si la réalisatrice cherchait à faire un portrait des trois personnages, Elise qu’elle interprète ne leur en laisse pas la place. Elle voudrait détenir le pouvoir de super maman mais elle reste fixée sur son nombril. Elle court d’un lieu à un autre, de son travail au musée aux devoirs de son fils, mais ne fait rien avec conviction. Marilyne Canto explique qu’Elise se remet du deuil mais la tragédie paraît très antérieure. Jamais Elise ne verse une larme, elle s’interdit toute défaillance, et Léo âgé de dix ans ne semble pas avoir connu son père. Nul photographie ne le représente dans l’appartement familial, ni aucun vêtement d’homme qu’Elise n’aurait pas encore donné. Cet homme sans nom n’est présent chez eux que sous la forme d’une clarinette et d’une montre abandonnée.
© Ivan Mathie
Le spectateur n’a alors pas d’attache pour ressentir le personnage d’Élise qui vacille de manière lunatique entre ses humeurs. Paul ne sait pas à quoi il s’accroche et est baladé entre douceur et égocentrisme fumant. Elise marche et court : que ceux qui l’aiment la suivent. Puisqu’elle ne pense jamais aimer Paul, celui-ci se rabat sur son fils en quête d’identité. Cette nouvelle relation sort le film du bourbier antipathique ; Paul et Léo captent du temps d’expression et amènent le film vers son dénouement positif.
Esthétiquement, le film s’inscrit dans une tradition réaliste à la française. Les lumières sont très crues et traduisent la froideur de l’hiver parisien où se situe le film. Ciel blanc, bitume gris et appartement d’un bleu froid, l’image va dans la direction du récit. Intention précise ou effet du hasard ? L’image reste la même lorsque le récit tente quelques légèretés. Une singularité dans le découpage est cependant très perceptible. Elise marche beaucoup et ces moments pourtant peu marquants dans la diégèse sont appuyés par l’utilisation de plans séquences en travelling. Cette fois l’intention est claire mais sa raison demeure obscure… La réalisatrice semble peiner à définir précisément les cadrages et découpages des scènes. Une scène peut débuter comme un plan séquence et être coupée dans un dialogue par un champ/contre champ apparenté à un découpage de sécurité en tournage. Ces maladresses ressemblent aux conséquences d’un montage difficile, peut-être provoqué par l’absence de la réalisatrice derrière sa caméra au moment du jeu.
Si cette mise en scène fragile ne nous convainc pas, ce premier long métrage est pourtant le fruit de quatre courts métrages reconnus en festivals. La réalisatrice-interprète ne parvient pas au bout de ses intentions narratives dans ce nouveau format.
Marianne Knecht
Film en salles depuis le 26 février 2014