Super-héros, saints laïcs et divinités métissées peuplent joyeusement l'installation "Modestes Tropiques" d'Hervé Di Rosa, sorte de cabinet de curiosités haut en couleur, à découvrir au Musée du Quai Branly, jusqu'au 18 avril. Le plasticien y a assemblé 300 objets produits par des artisans du monde entier auxquels le théoricien de l'art modeste a mêlé quelques unes de ses œuvres.
Des vitrines pleines à craquer de figurines parmi lesquels Hervé Di Rosa a glissé ses créations : une série récente de kippas tissées, des robots perlés et objets cloutés, un bouclier peint à l'effigie du Fantôme du Bengale dans son costume de justicier masqué... Zoom sur une vitrine dédiée aux Amériques (photo) : au premier plan, un alignement de sculptures en résine polyester monochromes d'Hervé Di Rosa, que lui ont inspirés les petits soldats-jouets, derrière lesquelles se dressent un chef Sioux et un imposant buste aux traits burlesques de l'infortuné Maximilien 1er, l'empereur du Mexique. Non, nous ne sommes pas à la galerie des jouets du musée des arts décoratifs mais au Quai Branly, le musée des civilisations non occidentales.
A travers cette scénographie d'une apparente simplicité, Hervé Di Rosa fait dialoguer ses collections personnelles d'objets chinés dans le monde entier avec ses propres sculptures. Enseignes publicitaires du Ghana, porte-bonheur péruvien, masques japonais en papier mâché, tirelire Karl Marx... "J'ai récolté en 30 ans tout ce que veulent ignorer les ethnologues", commente l'artiste de 55 ans. Le titre de l'exposition, "Modestes Tropiques" fait évidemment référence à l'ouvrage "Tristes Tropiques" de Claude Lévi-Strauss. Dans son "Tour des Mondes" initié dans les années 90, Hervé di Rosa a séjourné au Viêt-Nam, au Mexique, en Espagne... "Ce qui m'intéresse, dit-il, c'est le moment où la pratique traditionnelle rencontre la société occidentale. C'est là que naît l'art modeste", explique Hervé Di Rosa, qui a fondé et préside depuis 2000 le Musée International des Arts Modestes (MIAM) à Sète. "Mon alphabet esthétique est induit par la matière, affirme l'artiste. En travaillant avec les artisans, ce que je cherche, c'est d'être colonisé par l'autre." Ses créations sont issues des mêmes fours que les céramistes de Chine, il a utilisé les mêmes matériaux que les copistes du Foumban au Cameroun, et reproduit les mêmes gestes de tressage que les artisans zulus avec leurs câbles de téléphone recyclés. Son intention : faire côtoyer les œuvres dans un dialogue d'égal à égal.
"Ma peinture est ma scène et mes personnages sont des acteurs qui y donnent une pantomime silencieuse": Hervé Di Rosa pourrait faire siennes ces paroles du peintre britannique William Hogarth (1697-1764) dont le plasticien admire particulièrement le talent de graveur. Les deux hommes ont pour point commun l'audace de représenter le sourire et la capacité à utiliser la figure populaire pour servir la peinture.
> Le site d'Hervé Di Rosa www.dirosa.org
> Hervé Di Rosa est représenté par la galerie Louis Carré www.louiscarre.fr
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