Un film de Kathryn Bigelow (2013 - USA) avec Jessica Chastain, Jason Clarke, Jennifer Ehle, Kyle Chandler, Harold Perrineau, Mark Strong, Joel Edgerton, James Gandolfini, Edgar Ramirez
Passionnant.
L'histoire : Après les attentats du 11 septembre 2001, la CIA est sur les dents. Il faut retrouver les auteurs de ces actes ignobles et la tête de la pyramide al-Qaïda : Oussama Ben Laden. Une filière est implantée au Pakistan où les agents tentent de dénouer les fils, un par un, de remonter des pistes, une par une, pour détruire la toile d'araignée et arriver en son centre...
Mon avis : L'histoire est vraie de bout en bout et le film, qui se déroule comme un thriller, nous mène au coeur de la CIA, auprès des équipes qui ont enquêté des années durant pour retrouver la trace de Ben Laden, le Grand Satan, et le tuer. On apprend beaucoup de choses, sur les méthodes et sur les hommes : l'enquête minutieuse, qui s'apparente à celle des policiers, à l'affût du moindre indice, les interrogatoires, la torture aussi, forcément ; les coups de génie, les coups de blues, les collègues qu'on perd, la fierté du devoir accompli...
Jessica Chastain est extraordinaire dans le rôle de cette jeune femme ultra déterminée, talentueuse, courageuse, mais aussi très dure. Et la réalisatrice ne tombe pas dans le piège en essayant de la rendre plus sympathique. Non, pas de sentiment, pas de scrupules. Ce sera pour après, une fois la mission terminée (scène où le collègue de Maya lui dit qu'il va rentrer aux Etats-Unis ; il a besoin de se mettre au vert après tant d'horreurs). Et c'est sûr qu'il en faut des gens comme ça pour nous "protéger". On ne peut nier l'évidence.
Les scènes de torture sont très difficiles... et posent un vrai problème. Comment, sans elle, faire avouer l'ennemi pour pouvoir avancer dans son enquête ? Pour les personnages qu'on nous présente, membres aguerris et sans complexes de la CIA, la question ne se pose pas ; on est obligé d'en passer par là. Scène terrible où le supplicié voyant une femme débarquer (et la supposant donc plus sensible) tente de l'amadouer : "Votre ami est un animal... je vous en supplie aidez-moi..." et la belle, que l'on voit pourtant frémir devant le traitement qu'on inflige à cet homme, de lui répondre froidement les yeux dans les yeux : "Parlez... et on vous traitera bien". Lorsqu'on change de président et que les agents entendent Obama annoncer que la torture ne pourra plus être utilisée, ils sont un moment désemparés : ben, il est fou lui ou quoi, on fait comment nous ? Et ils repartent vaquer à leurs "occupations" comme avant...
C'est dur, très dur. Mais "c'est la guerre petite mat'moiselle", comme disait ma maman en se souvenant des soldats allemands...
Le fond et la forme sont parfaits. De quoi apprendre, de quoi s'instruire, de quoi s'interroger, et des comédiens qui vivent leur truc. La dernière scène, l'attaque sur la maison de Ben Laden, est incroyablement réaliste. Bigelow arrive à insuffler un côté suspense à son film, alors qu'on en connaît l'issue ! Quelle maîtrise et quel talent ! Par ailleurs, elle ne porte aucun jugement, elle montre.
A noter :
- Zero dark thirty est une expression militaire qui désigne les trente minutes suivant minuit, une période où il fait toujours "nuit noire", privilégiée pour certaines attaques.
- Le scénario était écrit lorsque Ben Laden a été pris... la production a donc dû modifier la fin du film.
- Le film a fait polémique aux Etats-Unis, comme étant "pro-Obama"... puisque c'est sous la présidence Bush qu'a commencé tout ce travail de longue haleine, dont Obama n'a récupéré que le moment le plus glorieux.
- Les personnages sont fictifs, mais la production avait un dossier suffisamment solide pour pouvoir "reconstituer" cette équipe et son fonctionnement.
J'avoue toutefois que je n'ai pas été totalement séduite. J'ai eu davantage l'impression de voir un documentaire sur l'opération Geronimo qu'un film de cinéma. J'ai appris des choses, c'est bien, mais j'ai trouvé tout ça un peu trop didactique.
Et puis j'avoue que je commence à être fatiguée d'entendre parler du terrorisme musulman et de la guerre occident / proche-orient. Mon mari a dit à un moment "Ben c'est pas comme ça que les Américains vont redorer leur blason aux yeux du monde..." et je me suis surprise à répondre "Ben oui, mais on nous attaque, faut bien se défendre ! On ne peut pas les laisser faire !" On NOUS attaque. Je suis dans le camp de l'Occident, donc. Et cela ne me plaît pas de faire partie d'un camp... je me suis découverte belliqueuse, moi qui me clame pacifiste... Tu m'attaques, je t'attaque, on n'en sortira donc jamais ?
Et j'en ai tellement marre de voir les pays du Proche-Orient résumés à leur seule image de terroristes, mais tellement marre aussi de voir une poignée de neuneus arriérés enfermer les femmes, interdire l'école aux enfants, condamner à mort tous ceux qui ne croient pas en Allah... et veulent maintenant venger la mort de leur leader.
Peut-être faudrait-il interdire la religion... Interdire. Le début du fascisme.
Ras-le-bol.
Heureusement, Poutine est en train de donner un coup de sang neuf dans tout ça ; la guerre froide renaît, une bonne guerre de conquête comme autrefois !
C'est pas drôle, je sais. Humour noir.