Pour qui s'intéresse à la culture , la mort d'Alain Resnais ne peut laisser indifférent.
Nous lui devons bien des films qui appartiennent depuis longtemps à l'histoire de notre cinéma, et même à l'histoire tout court.
Le cinéaste Alain Resnais est mort samedi 28 février à Paris , à l'âge de 91 ans, a annoncé le producteur de ses derniers films, Jean-Louis Livi. Alain Resnais était un monstre sacré du cinéma.
Parmi les plus grands films de la carrière cinématographique d’Alain Resnais, on retient "Nuit et Brouillard ", sorti en 1955, "Hiroshima, mon amour ", sorti en 1959, "L’année dernière à Marienbad ", sorti en 1961, récompensé cette année là par le Lion d’Or, à Venise, ou encore "La Guerre est finie " en 1966. Alain Resnais avait le génie pour passer des films historiques voire tragiques à des comédies beaucoup plus légères, à l’exemple de "Mon Oncle d’Amérique ".
J'ai fait la connaissance de son oeuvre avec l'un de ses premiers films : "Nuit et brouillard" Et j’ai toujours suivi ses films
Alain Resnais a réalisé en 1955 "Nuit et Brouillard", premier documentaire de ce type réalisé sur les camps nazis, dont le ton met en lumière l'effrayante banalité de ces lieux de mort.
Issu d'une commande à l'occasion du 10ème anniversaire de la libération des camps de concentration, ce film de 32 minutes, mêlant images d'archives en noir et blanc et séquences en couleurs tournées sur place, reste une référence.
Il montre des arrestations, les convois, les monceaux de cheveux, de valises, de vêtements stockés à Auschwitz, les fours crématoires, les baraquements, et aussi les survivants hagards et les morts entassés. Le commentaire, écrit par Jean Cayrol, lui-même rescapé des camps, est lu par Michel Bouquet.
"Toute la force du film réside dans le ton adopté par les auteurs : une douceur terrifiante. On sort de là ravagé, confus et pas très content de soi", a écrit François Truffaut, alors critique aux Cahiers du cinéma.
A l'époque, le souvenir de la déportation était porté par les associations de déportés politiques bien plus que par les rescapés juifs.
"Nuit et Brouillard", en allemand "Nacht und Nebel", est le titre du décret du 7 décembre 41, signé par le maréchal Wilhelm Keitel, ordonnant la déportation pour tous les ennemis ou opposants au Reich. Le titre du décret était lui-même une référence à un personnage de Wagner qui se change en fumée et disparait en chantant "nuit et brouillard, je disparais"
Alain Resnais
Le film Nuit et brouillard
Paroles de la chanson "Nuit et Brouillard" interprétée par Jean Ferrat
Ils étaient vingt et cent, ils étaient des milliers
Nus et maigres, tremblants, dans ces wagons plombés
Qui déchiraient la nuit de leurs ongles battants
Ils étaient des milliers, ils étaient vingt et cent
Ils se croyaient des hommes, n'étaient plus que des nombres
Depuis longtemps leurs dés avaient été jetés
Dès que la main retombe il ne reste qu'une ombre
Ils ne devaient jamais plus revoir un été
La fuite monotone et sans hâte du temps
Survivre encore un jour, une heure, obstinément
Combien de tours de roues, d'arrêts et de départs
Qui n'en finissent pas de distiller l'espoir
Ils s'appelaient Jean-Pierre, Natacha ou Samuel
Certains priaient Jésus, Jéhovah ou Vichnou
D'autres ne priaient pas, mais qu'importe le ciel
Ils voulaient simplement ne plus vivre à genoux
Ils n'arrivaient pas tous à la fin du voyage
Ceux qui sont revenus peuvent-ils être heureux
Ils essaient d'oublier, étonnés qu'à leur âge
Les veines de leurs bras soient devenues si bleues
Les Allemands guettaient du haut des miradors
La lune se taisait comme vous vous taisiez
En regardant au loin, en regardant dehors
Votre chair était tendre à leurs chiens policiers
On me dit à présent que ces mots n'ont plus cours
Qu'il vaut mieux ne chanter que des chansons d'amour
Que le sang sèche vite en entrant dans l'histoire
Et qu'il ne sert à rien de prendre une guitare
Mais qui donc est de taille à pouvoir m'arrêter ?
L'ombre s'est faite humaine, aujourd'hui c'est l'été
Je twisterais les mots s'il fallait les twister
Pour qu'un jour les enfants sachent qui vous étiez
Vous étiez vingt et cent, vous étiez des milliers
Nus et maigres, tremblants, dans ces wagons plombés
Qui déchiriez la nuit de vos ongles battants
Vous étiez des milliers, vous étiez vingt et cent