C’est sur la partie de trottoir située entre les écoles de Bourg et Montmorency que je l’ai rencontré. Je ne pouvais pas le manquer ! Sa longue écharpe blanche , lui qui n’en porte jamais, sa courte et ronde silhouette , toujours en déplacement aller-retour des Halles à l’Hôtel de Ville et son allure, lourde et obstinée, ne pouvaient m’échapper. Je me dirigeais donc vers le marché Saint Paul et lui en revenait ; quand j’y allais pour y acheter des légumes , il en rappliquait service fait : sa distribution de cartes postales et d'auto-collants électoraux. Il en avait plein les mains et les poches de sa veste et de son pantalon quand il m’a proposé d’en choisir une encore. Elles en débordaient ! Je lui ai suggéré de prendre un caddie la prochaine fois ! Comme le font ces petits groupes d’évangélistes de plus en plus nombreux qui se postent sur les axes piétonniers et aux abords des marchés. Ils vendent de l’espoir eux aussi ! Sur leurs présentoirs, des bibles et des revues. Pas de trombinoscopes . Du lourd, du spirituel ! Dans l’indifférence générale, ils papotent en cercle, raides comme des as de pique … Je disais donc que c’est tous les jours ou presque que je le rencontre J.Y.G : c’est mon voisin ! Mais l’occasion ne m’avait pas encore était donnée de le complimenter sur son ample foulard blanc à la mode tibétaine - un signe de bienvenu chez les bouddhistes des hauts plateaux . Il disparaîtrait presque sous son voile immaculé… Je lui est néanmoins fait observer que le Dalaï Lama était rentré dans son ashram depuis belle lurette et que cette couleur de lys convenait mal au parti de la rose. Que c’était en quelque sorte un bel oxymore symbolique ; et un joli coup de « marketing » électoral . Pas si innocent que cela ce blanc là , en effet , si j’en crois la « science » publicitaire appliquée dans nos supermarchés. Paix, virginité, pureté … mariage… seraient ainsi vendus à des électeurs saturés de promesses électorales. Du Zen pour une société en crise ! Signes aussi d’une époque où règnent images et émotions et où tout se mélange : le commercial et le politique , le marketing et le symbolique , le masculin et le féminin, le rose et le blanc …
Demain dimanche, à partir de 10 heures, défilé du Carnaval, dans les rues de la ville. Y verra-t-on, sous les masques, des avocats travestis en dealers et des présidents d’exécutifs régionaux ou locaux en contribuables au chômage, et réciproquement. Comme en ces temps lointains où les rôles sociaux et les valeurs communes étaient totalement inversées - renversées sous les tables ? J’en doute . Il m’arrive, parfois, de le regretter … et me contenterais de vieux messieurs aux jambes variqueuses déguisés en majorettes. Du classique !