- 1 mar 2014
- Gilles Rolland
- CRITIQUES
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Titre original : 300 : Rise of an Empire
Note:
Origine : États-Unis
Réalisateur : Noam Murro
Distribution : Sullivan Stapleton, Eva Green, Rodrigo Santoro, Jack O’Connell, Lena Headey, Callan Mulvey, Ashraf Barhom, Andrew Tiernan…
Genre : Peplum/Action/Adaptation/Suite/Saga
Date de sortie : 5 mars 2014
Le Pitch :
Alors que Leonidas et ses 300 spartiates combattent les hordes commandées par le Roi perse Xerxès aux Thermopyles, le Général et stratège grec Thémistocle tente d’unifier son pays face à l’envahisseur. Ayant du mal à fédérer, Thémistocle se lance néanmoins dans la bataille avec ses hommes. Commence alors une lutte sur les eaux entre les bateaux vétustes grecs et les puissants navires perses menés par la redoutable Artémise, la principale conseillère de Xerxès et dirigeante de toute sa flotte…
La Critique :
En voulant surfer sur l’énorme succès de 300, le techno péplum de Zack Snyder, les producteurs ont longtemps hésité. Doit-on partir sur une suite ou sur un préquel ? Le préquel fut envisagé mais c’est finalement pour la suite qu’on opta. C’est du moins l’argument de vente du film qui à l’air -si on se base sur la première bande-annonce- de se situer principalement après la lutte acharnée des 300 contre les hordes perses aux Thermopyles. La réalité est « légèrement » différente, comme pouvait le suggérer le (long) trailer le plus récent. Tout compte fait, cette « suite » n’en est pas vraiment une. Parcouru de longs flash-backs qui reviennent entre autres événements sur la naissance du Dieu Roi Xerxès, le film s’apparente plutôt à un spin-of un peu bâtard, centré sur le combat des grecs et plus généralement, des troupes de Thémistocle, un Général bourrin désireux d’unifier la Grèce pour contrer les désirs mégalomaniaques de l’envahisseur perse. En bref, 300 : La Naissance d’un Empire se déroule la majorité du temps en parallèle des événements contés dans 300 premier du nom. Les Grecs se bastonnent contre les perses, pendant que les spartiates se mettent sur la tronche contre d’autres perses. Au bout d’un moment, presque à la fin, on apprend que Leonidas est tombé sur le champs de bataille et… et voilà, la baston continue entre les grecs et les perses !
Cela dit, il faut savoir que le fait d’avoir choisi d’ancrer ce second film à ce moment précis de l’histoire, porte un sale coup au suspense. Et cela si on se réfère à l’acte final de 300 qui voyait une Grèce unifiée partir à l’assaut de l’armée perse, suggérant que oui, la Grèce allait se tourner comme un seul homme face à l’ennemi. L’important n’est donc de savoir où va se terminer le récit mais comment il va se terminer. Savoir si ce Thémistocle sera à la hauteur d’un Leonidas. Savoir si Sullivan Stapleton allait pouvoir porter le film de la même façon que Gerard Butler. Savoir si Eva Green allait tenir la dragée haute à Lena Headey… En soi un paquet de questions pour un long-métrage pas vraiment attendu, plutôt redouté, et au final, superbement bancal.
Superbement, car mine de rien, il a quand même de la gueule ce nouveau 300. Et pourquoi 300 d’ailleurs ? Les 300 spartiates sont tous morts non ? Pourquoi avoir gardé ce titre si ce n’est pour s’assurer de la fidélité d’un contingent de fans acquis à la cause de ces virils guerriers glabres et forts en gueule ? Ouais, c’est certainement pour cela, mais on s’égare…
Oui, 300 : La Naissance d’un Empire est quand même plutôt bien foutu. Sur le modèle établi par Zack Snyder (qui reste au scénario et à la production), Noam Murro narre son histoire dans un univers crépusculaire, sublimé par des effets-spéciaux plus perfectionnés qu’il y presque 8 ans. Et c’est d’ailleurs peut-être pour cela qu’il a opté pour une action en majorité navale. La mer est ici le théâtre de combats à la sauvagerie outrancière et le budget (presque deux fois plus élevé que pour le premier film) permet justement d’offrir un spectacle grandiose. Visuellement abouti, La Naissance d’un Empire s’apparente à une suite de tableaux léchés, où les corps mutilés flottent dans des eaux tumultueuses et où la chair rencontre le bois et le métal de navires monumentaux éventrés par des explosions de feu. Contemplatif, le métrage l’est assurément. Trop d’ailleurs tant le dit spectacle est souvent gâché par un trop plein de ralentis franchement plombants. Les gouttes d’eau, de sang,les vagues, la sueur, tout marche au ralenti du côté de la Mer Égée. Les soldats se battent aussi au ralenti, les bateaux progressent lentement et à tout bout de champs nous sont imposées des séquences en slow motion durant lesquelles la barbarie se veut poétique et lyrique. N’ayant finalement pas grand-chose à raconter, le film donne l’impression de vouloir jouer la montre.
Et le pire, c’est que ces ralentis abusifs s’empilent dès le début au point où il est légitime de se demander si le mec en cabine n’a pas merdé à un moment ou à un autre quand il a fait les réglages de son projecteur. On peut penser ce qu’on voudra de Zack Snyder, mais lui au moins, avait su proposer une réalisation efficace où le ralenti, utilisé avec parcimonie, n’avait pour but que de souligner des passages clés de l’action, tout en conservant, cela dit, un petit côté clinquant qui explose ici.
À l’instar de nombreuses suites, 300 : La Naissance d’un Empire en fait des caisses, tout en ne proposant rien de neuf. Le récit s’articule sur le squelette du premier épisode et voit donc des soldats en infériorité numérique affronter des ennemis mieux armés et plus nombreux. Un fils va à la guerre avec son paternel, il est question de liberté, de vengeance, de gloire, d’honneur, etc… Sous le soleil voilé de Grèce, rien de change, y-compris les dialogues, copiés collés et bas de plafond, et tout est multiplié par 10. Mais curieusement (ironie), à la fin, c’est moins bien. Principalement parce qu’en voulant se caler sur les nouveaux standards des blockbusters pleins de fric, le réalisateur orchestre des scènes un peu débiles, comme ce faux plan-séquence final, à base d’un cheval à la fois ignifugé et quasi-amphibien, et d’un combat où d’un coup, la poésie s’invite entre deux gerbes de sang, par le biais d’un laïus plein de souffle censé titiller une dernière fois la fibre patriotique.
Étonnement gore, 300 cherche à en mettre plein les yeux. Les corps ne contiennent pas 5 litres de sang mais une bonne quinzaine. La moindre blessure déclenche un torrent d’hémoglobine numérique ressemblant à s’y méprendre à de la confiture de fraises. Non seulement c’est trop, mais en plus, à l’écran, c’est moche. C’est comme cela, par une accumulation de choix hasardeux et par une tendance à ne jamais opter pour la demi-mesure, que La Naissance d’un Empire se plombe lui-même.
Un peu à l’image du remplaçant de Butler, Sullivan Stapleton, certes un petit peu charismatique, mais dont le jeu se limite à une crispation continue de la mâchoire. Même si la présence convaincante de Jack O’Connell, un transfuge de la série Skins (Cook), égaye un poil une distribution trop fade.
Heureusement, la spectaculaire Eva Green assure le show, avec une générosité en somme toute admirable. Dans le ton, elle aussi en fait des caisses, mais c’est plutôt drôle et complètement raccord. Surtout qu’ici, c’est elle le vrai bad guy et non le Roi Xerxès, dont le rôle se limite presque à un luxueux caméo. Ah ben tiens, ça aussi c’est décevant…
@ Gilles Rolland