Motoi Yamamoto : Artiste japonais , le travail du sel
Il est l'un des artistes d'art contemporain que je rêve de rencontrer.La première fois que j'ai vu son travail, je me suis assise, je n'ai plus bougé et j'ai attendu.
J'ai eu cette impression illusoire mais terriblement tenace, que dans le silence et l'observation quelque chose de bouleversant et de troublant allait se produire.
J'ai attendu.
Et j'ai aimé.
Au bout d'un certains temps, je me suis aperçu que je n'attendais plus rien, que j'étais juste là, présente, sans absences, sans rêveries, sans troubles.
Sans comprendre pourquoi, mon coeur s'est alors serré et j'ai eu mal. Cette douleur si particulière et si difficilement exprimable je la reconnaissait. C'est celle que certains d'entre nous connaissent déjà, celle qui crée une rive imaginaire entre ceux qui ont déjà vécu cette souffrance et les autres. C'est celle de l'absence. De l'absence "pour toujours" , du manque de celui qui n'est plus là, de celui dont on ne sait plus rien. De celui qu'on ne reverra jamais, car le "jamais" semble alors exister.
A ce moment je ne connaissais rien du travail de Motoï Yamamoto. Mes yeux trouvaient cela beau , mon coeur était troublé mais sans savoir comment il s'y était prit " ses petits tas de sel " avaient touché mon âme plus profondément que des mots ou une rencontre.
Un peu plus tard quelqu'un m'a expliqué que la soeur de Motoi Yamamoto était morte suite à un cancer du cerveau et que pour soulager son chagrin, vivre son deuil Motoi a donnait pour fil conducteur à son travail d'artiste " la renaissance entre la mort et la vie " . Son choix pour le sel comme matériel de travail et d'exploration vient de la tradition japonaise qui l'utilise après les funérailles. Les personnes ayant assisté à la cérémonie lancent alors du sel sur elles avant de rentrer dans leur maison afin de se purifier et de chasser les mauvais esprit qui roderaient autour d'eux.
Par la suite j'ai appris que Motoi Yamamoto pensait que le sel avait le pouvoir de soulager et de guérir la douleur liée au deuil. Une bien belle idée mise en pratique avec un talents hors norme et une délicieuse délicatesse.
J'aime tout particulièrement le sel de Yamamoto quand celui ci se multiplie en minuscules ravines et se transforme en un labyrinthe monumental. Il est difficile de ne pas y voir les nombreux chemins de vies, de morts, de méandres , de solitude, d'errance ou d'ignorance liés à la condition humaine.
Son travail fragile, délicat , éphémère ne pouvait que m'attraper. Utiliser un médium si corrosif et pourtant dont nous avons un besoin vital porte à lui seul toute l’ambiguïté humaine ; y ajouter un thème si profond et commun à tous : la mort , l'absence , sa douleur et ses questions sans réponses était déjà une belle idée mais Yamamoto ne s'est pas arrêtait en chemin, il nous livre à chacune de ses créations , un spectacle à couper le souffle. Chez cet artiste , la forme , le fond, l'intensité... Tout y est .
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