Voici déjà la conclusion de cette trilogie qui rend hommage à la nature et aux grands espaces, tout en pointant du doigt les dérives d’une colonisation outrancière. L’action de cette saga dont l’ambiance n’est pas sans rappeler celle du far-west au temps de la ruée vers l’or, se déroule dans le Grand Nord, quelque part entre l’Alaska et la Sibérie, au sein d’un territoire sauvage où vivent les derniers représentants d’une réserve indienne. Malheureusement pour ces derniers, leur vallée devient subitement la convoitise de plusieurs vautours attirés par l’appât du gain.
Après avoir mis en avant l’amitié entre un jeune autochtone animé par un sentiment de vengeance et personnifiant une population locale peu encline à céder aux convoitises de l’homme blanc, et un aigle géant qui règne sur le territoire et qui incarne cette nature hostile et indomptable, Benoît Sokal effectue un bond de près de quarante an. Le lecteur se retrouve ainsi propulsé en 1963, dans une mégapole de Klontown plongée sous une bonne couche de neige. Il y retrouve Emily, devenue médecin, qui, au travers de son journal intime, se souvient de cette époque où elle vivait en autarcie dans cette vallée menacée par l’émergence de la cité Klontown et l’ambition de businessmen sans scrupules, prêts à tout pour exploiter les matières premières découvertes dans le sous-sol de ces terres.
C’est donc à travers le regard d’Emily que l’auteur dévoile la fin de son histoire. Livrée sous forme de long flash-back, cette fin de triptyque tient toutes ses promesses. Opposant le progrès et la cruauté humaine à la rudesse de la nature, Sokal livre une fresque émouvante qui mêle western, amitié, vengeance et spiritualité, au sein d’une Amérique en pleine mutation, où les intérêts économiques prennent le dessus sur les valeurs humaines et écologiques.
Visuellement, Benoît Sokal propose un crayonné nerveux, rehaussé d’une colorisation directe de toute beauté. À l’aide d’un dessin qui se passe volontiers de textes, il livre des paysages splendides, souvent recouverts d’une légère brume qui enveloppe le récit d’une atmosphère pesante. Des envols majestueux de Kraa aux décors somptueux, en passant par des protagonistes aux trognes particulièrement expressives, l’auteur livre un nouveau sans-faute visuel.
Notons finalement qu’un coffret (avec calle !!!) est disponible afin de pouvoir ranger cette splendide saga avec tout le soin qu’elle mérite.
Retrouvez cette conclusion dans mon Top de l’année !