Par Fabrice Copeau.
« Si tu veux que quelqu’un n’existe plus, cesse de le regarder. »
— Proverbe Arabe.
Ajoutez à tout cela les journalistes de cour, héritiers de la noblesse de Versailles, qui se plaisent à publier les portraits, presque toujours élogieux, des principaux hommes politiques de leur temps. Les exemples sont tels qu’on trouve chaque mois plus d’une dizaine de biographies dans les rayons, qui toujours collent promptement à l’actualité politique du moment. À l’heure où j’écris ces lignes, on trouve pêle-mêle sur les étals et de manière non exhaustive NKM l’indomptable de Julien Arnaud, Le Roman vrai de DSK de Michel Taubmann, Lionel raconte Jospin entretiens avec Pierre Favier et Patrick Rotman, Mon dictionnaire autobiographique de Jean-Louis Borloo, et beaucoup d’autres. Notez au passage que tous ces ouvrages ont comme point commun de servir la soupe à nos gouvernants, lorsque ce ne sont pas eux-mêmes – ou plus exactement leur nègre – qui prennent la plume pour vanter leurs propres mérites.
Mais certains trouvent que ce n’est pas encore assez. Qu’il y aurait quelques réfractaires, incapables de courber suffisamment l’échine devant la grandeur de leurs maîtres. Daniel Mahoney, dans De Gaulle, statemanship, Grandeur and Modern Democracy, accuse ainsi ses semblables de ne pas admettre qu’il y aurait une sorte de déterminisme appelant certains à gouverner, et d’autres à être gouvernés. Il les accuse de voir petit le grand homme. Jacques Julliard, dans son lamento Que sont les grands hommes devenus ?, n’a pas de mots assez durs pour mettre en cause notre médiocrité face au génie du grand homme. George Sand n’écrivait-elle pas : « Dieu eût départi à tous les hommes une égale dose d’intelligence et de vertu s’il eût voulu fonder le principe d’égalité parmi eux ; mais il fait les grands hommes pour commander aux petits hommes. »
Parfois le discours est plus modéré. Il n’est pas fondé sur un déterminisme biologique ou sociologique, mais sur l’expérience particulière vécue par un individu confronté à une circonstance exceptionnelle. C’est l’objet de la formule du Parrain de Coppola, pour qui « les grands hommes ne naissent pas dans la grandeur, ils grandissent. »
Des fariboles comme celles-ci, qui trahissent essentiellement le refoulé d’auteurs qui se rêvaient grands mais qui, à l’âge adulte, ne sont que de médiocres Bollandistes, il y en a à la pelle.
Il est désormais temps de passer du Capitole à la Roche Tarpéienne. De déconstruire ces mythes pour jouvencelles effarouchées. De saisir la vraie nature du pouvoir et de ceux qui l’exercent.
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Extrait d’un futur essai consacré aux hommes de l’État et plus précisément aux hommes politiques.
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