Cybercriminalité en Afrique, la guerre est déclarée aux sakawas au Ghana ou brouteurs en RCI

Publié le 25 février 2014 par Busuainn_ezilebay @BusuaInn_Ezile


3 articles sont proposés, l'un du site Ouestafnews et les deux autres, respectivement Terangaweb et Jeune Afrique, afin d'avoir un aperçu un peu plus exhaustif autours de la cybercriminalité en Afrique. Phénomène en expansion...Mais comme partout ailleurs me direz vous ?Bonne lecture !
Cybercriminalité : guerre déclarée aux « brouteurs » et aux « sakawa»Ouestafnews - Le Ghana et la Côte d’Ivoire ont annoncé chacun de nouvelles mesures destinées à lutter plus efficacement contre la cybercriminels, dans ces deux pays souvent cités comme deux des principaux foyers de la cybercriminalité en Afrique de l’ouest, à côté du Nigeria
Les cybercriminels sont communément appelés « brouteurs » en Côte d’Ivoire et « sakawa » au Ghana.
Les nouvelles dispositions en Côte d’Ivoire prévoient « une peine lourde allant jusqu’à 20 ans de prison et 100 millions FCFA d’amende contre tous ceux qui se seront rendus coupables de délits de cybercriminalité », a déclaré Bruno Nabagné Koné, ministre ivoirien de Postes, des Technologies de l’Information et de la Communication.
Pour les autorités ivoiriennes, ce durcissement au niveau de loi, aura un effet dissuasif pour ces cybercriminels.
Si la Côte d’Ivoire mise sur l’armature législatif, son voisin ghanéen lui compte sur la coopération technique pour se défaire des « sakawas », nom donné aux cybercriminels à Accra.
Cité par l’agence de presse ghanéenne (GNA, publique) Edward Omane Boamah, ministre ghanéen de la Communications a fait savoir que son pays va mettre en place en mars 2014, un organe de réponses aux attaques informatiques (CIRT, en anglais).
Créé en partenariat avec l’Union internationale de télécommunications (UIT), le CIRT, selon le ministre entend jouer un rôle de prévention avant tout, mais aussi de règlement de tout incident dans le cyber-espace ghanéen.
Selon une définition de l’encyclopédie en ligne Wikipédia, la cybercriminalité est une notion large qui regroupe toutes les infractions pénales susceptibles de se commettre sur ou au moyen d’un système informatique généralement connecté à un réseau.
L’émergence de cette forme de criminalité est le versant négatif du développement des technologies de l’information et de la communication (Tic), secteur cependant jugé hautement porteur d’emplois pour la jeunesse africaine, frappée par le chômage.
« La cybercriminalité est l’une des formes de criminalité qui connaît actuellement la croissance la plus forte, de plus en plus de malfaiteurs exploitant la rapidité et la fonctionnalité des technologies modernes, ainsi que l’anonymat qu’elles permettent, pour commettre les infractions les plus diverses », lit-on sur le site web de l’Organisation internationale de police criminelle (Interpol).
Selon des chiffres officiels, en 2013, la cybercriminalité a causé en Côte d’Ivoire, un préjudice financier estimé à 3,6 milliards de FCFA contre 3,3 milliards en 2012 et durant cette période, quelque 70 personnes ont été arrêtées par la police.
Au Ghana, 80 cas de cybercrimes sont comptabilisés chaque mois, selon des chiffres publiés en juillet 2013 par le ministère de la Communication.
En Afrique de l’ouest, la cybercriminalité se réduit principalement à des cas d’escroquerie au préjudice des particuliers, contrairement au monde développé où les pirates s’attaquent aux grandes entreprises et aux gouvernements.
La faiblesse des législations constatée au niveau des pays par les experts, sévit aussi au niveau continental. Au sein de l’Union africaine, une convention sur la cybercriminalité est en projet depuis 2009, mais ce projet se heurte selon certains observateurs à un manque criard d’experts africains en cybersécurité. 

Vendredi 21 Février 2014Lu dansOuestaf News
et un autre article très complet lu dans Terangaweb  

Comment lutter contre la cybercriminalité en Afrique ?


Alors que les cybercafés fournissent l’accès à l’internet à une bonne partie de la population africaine, le taux de pénétration du mobile et les perspectives de déploiement des réseaux 3G ou 4G laisse présager qu’un nombre plus important d’africains seront connecté au monde dans les prochaines années.[1]
Cette situation est de nature à favoriser l’émergence des paiements électroniques de même que l’accès aux crédits et à l’assurance par des moyens électroniques. Par ailleurs, davantage d’opportunités s’ouvrent à des entrepreneurs africains pour établir des partenariats avec leurs homologues sur les autres continents grâce à la connexion à internet. Cependant, ces opportunités risques d’être compromises par l’incidence de la cybercriminalité en Afrique. Alors que les Etats s’activent à mettre en place à l’échelle nationale des lois punissant les délits commis sur internet, cet article propose des solutions complémentaires basées sur une analyse économique des incitations à frauder en ligne.[2]
Quelques faits sur la cybercriminalité
Même si la dégradation de la situation économique peut être un facteur incitatif à la cybercriminalité, l’augmentation du nombre d’utilisateurs d’internet constitue la principale tendance qui favorise l’accroissement de la cybercriminalité. Les données existantes à l’échelle mondiale montrent une forte corrélation entre l’évolution du nombre d’utilisateurs et le nombre de délits révélés dans les médias.[3] Quoique la cybercriminalité soit un phénomène mondial, les types de délits diffèrent selon les continents. Selon un récent rapport de l’UNDOC (figure 2.1.), ce sont surtout les fraudes en lignes qui prédominent en Afrique, principalement au Nigéria qui concentrent 7,5% des cybercriminels à l’échelle mondiale.
Ce pays a gagné la réputation d’être le principal hub des cybercriminels les plus actifs avec yahooboys et scams 419 comme leurs marques reconnues à l’échelle internationale. Ainsi, chaque jour les boîtes électroniques sont inondées de lettres dites « nigérianes » proposant un partenariat en affaires, le transfert ou le retrait d’un fonds. Ces pratiques existent également sur les sites de ventes et d’achat en ligne entre particuliers comme « leboncoin.fr ». Elles sont peu à peu étendues aux transferts d’argent sur mobile. Le Ghana avec ses sakawaboys, la Côte d’Ivoire, le Bénin et bien d’autre pays Africains n’échappent pas à ce phénomène. Un paramètre qui reste inconnu est le profil des cybercriminels.La réponse juridique et policière…Dans ce contexte, les gouvernements Africains envisagent la mise en place de cadres juridiques permettant de garantir la sécurité sur internet. Par ailleurs, une initiative de l’Union Africaine vise également à faire adopter une convention de lutte contre la cybercriminalité par les États Africains. A l’échelle internationale, le Conseil de l’Europe a élaboré une convention qui fait office de référence en matière de lutte contre la cybercriminalité. En Afrique, seul l’Afrique du Sud a signé cette convention sans pour autant la ratifier. Dans les autres pays, notamment au Nigéria, des voix s’élèvent pour réclamer une mise en place rapide du cadre juridique de lutte contre la cybercriminalité. De façon générale, ce cadre devrait créer une loi qui punit les délits commis sur internet et former la police à l’identification et à l’arrestation des cybercriminels. Si la répression peut être un moyen de dissuader de potentiels cybercriminels, elle ne change pas les causes qui les incitent à commettre le délit. Par ailleurs, l’anonymat que confère internet combiné aux moyens d’investigation limitée de la police jette des doutes sur l’efficacité de la solution juridique.La nécessité d’une solution économiqueLa problématique de lutte contre la cybercriminalité peut être vue comme le problème d’une autorité de gestion d’un marché de vendeurs ambulants (une foire par exemple) composé de deux types de vendeurs : les « vrais » et les « faux ». Les acheteurs n’ayant pas les moyens d’identifier le type de vendeur, l’autorité doit s’assurer que seuls les « vrais vendeurs » sont présents sur le marché. En effet, les acheteurs sont intéressés à venir sur le marché uniquement si le risque de rencontrer de « faux vendeurs » est très faible.[4] La foire est équivalent à la plate forme internet limitée à un pays, les vendeurs sont des opérateurs économiques du pays en question. Parmi ces derniers, on distingue les « faux vendeurs » (les cybercriminels) des « vrais vendeurs ». Les acheteurs représentent les potentielles victimes de cybercriminalité dans le monde entier. L’autorité en charge de la gestion de la foire peut être vue comme un État qui bénéficie des échanges sur internet soit à travers les taxes ou soit à travers les emplois que ces échanges créent dans l’économie nationale.En suivant les résultats de la théorie économique des contrats, le problème de l’autorité revient à proposer un menu de contrats aux vendeurs pour leur accès au marché de nature à révéler leur type.[5] Dans le cas de la cybercriminalité, deux solutions peuvent être envisagées. D’une part, un menu de prix d’accès à internet et d’autre part un menu d’investissements dans l’authentification des personnes naviguant sur internet (abonnées).Le menu de prix d’accès à l’internet ferait varier le prix de la connexion en fonction d’un certain nombre d’informations qui déterminent la nature de l’abonné. Par exemple, la fréquence de la connexion, le temps passé en ligne, les sites web visités et les mots clés utilisés dans les messages envoyés sur internet peuvent être des informations pertinentes à la révélation de la nature de l’abonné. Ainsi, le prix d’accès à l’internet serait une fonction de ces informations. Elles peuvent être collectés automatiquement au cours de la navigation sur internet comme c’est le cas actuellement avec les entreprises de publicité. Toutefois, l’efficacité de cette mesure dépend de la part de cybercriminels dans le nombre total des abonnés. Si celle-ci est trop importante, la procédure d’identification risque de commettre beaucoup d’erreur en associant les « bons abonnés » aux cybercriminels ; ce qui décourageraient la présence de ceux-ci et conduirait donc à une situation où seuls les cybercriminels seront sur la plateforme internet. C’est pourquoi, les mesures de répression sont nécessaires pour dissuader l’arrivé de nouveaux cybercriminels. D’où la complémentarité entre les mesures juridiques et celles que nous proposons ici.Si la tarification forfaitaire de l’abonnement à internet ne pourrait pas être politiquement mise en œuvre, une autre solution serait la mise en place d’un menu d’investissements dans l’authentification des abonnés en ligne. Il s’agit pour les Etats d’investir dans les moyens de sécurité informatique permettant d’identifier systématiquement la nature des messages envoyés sur internet et les estampille d’un sceau de qualité. Cela se fait déjà chez les fournisseurs de boîtes électroniques qui parviennent à identifier systématiquement les spams. En vertu de la taille du segment des acheteurs (mondiale) les bénéfices générés par les transactions devraient être suffisants pour justifier de tels investissements.En outre, il est établit que la plupart des cybercriminels évoquent l’absence d’opportunités d’emplois comme l’une des raisons de leurs actions.[6] Ainsi, derrière la cybercriminalité se cache le problème de l’emploi de jeunes. Pour cela, il faudra repenser la formation professionnelle, l’organisation des universités et l’industrialisation ou la « tertiarisation » des économies africaines.Somme toute, la lutte contre la cybercriminalité requiert une réponse globale qui inclut aussi bien des mesures juridiques qu’économiques. Alors, que les États africains s’apprêtent à mettre en place un cadre juridique de répression de la cybercriminalité, nous proposons que celui-ci soit complétés par des incitations économiques comme une tarification différenciée de l’accès à l’internet ou le choix d’investissements dans l’authentification des abonnés en ligne. Cependant, la mise en œuvre opérationnelle de ces mesures nécessite une connaissance précise du profil des cybercriminels et de la typologie de leurs communications sur internet.Georges Vivien Houngbonon
[1] L’importance des cybercafés est souvent omise dans l’évaluation de l’accès à internet en Afrique.[2] Nous excluons ici du champ de la cybercriminalité les actes comme le piratage, le phishing, le hacking qui sont moins prépondérants en Afrique.[3] Notons que les statistiques sur la cybercriminalité sont quasi-inexistantes. Ainsi, quoique les chiffres présentés ci-dessus peuvent entachés de bais de déclaration, il n’en demeure pas moins que c’est le mieux que l’on puisse donner comme information actuellement.[4] Nous supposons qu’il y a plusieurs autres marchés proposant les mêmes produits et services à la disposition des acheteurs. Ainsi, le principe de concurrence est la principale motivation de l’autorité à contrôler la qualité des vendeurs sur son marché. Dans le cas où il y aurait un seul marché pour certains produits, la présence de « faux vendeurs » va restreindre la demande ou la valeur des biens et services et donc le profit de l’autorité.[5] La théorie des contrats développés par Laffont et Tirole (1986) permet de résoudre le problème d’un principal doit rémunérer des agents dont il ne connaît pas les types.[6] Voir la page 8 du rapport de l’UNDOC cité dans le texte.Tags: