Après le chef d’œuvre Rising Stars, les éditions Delcourt ont décidé de publié l’intégrale d’un autre récit passionnant de JM Straczynski, le sombre et passionnant Midnight Nation.
Cet « entre deux monde» qui pourrait être vu comme le purgatoire n’est pourtant pas traité comme tel, ne donnant pas vraiment le choix entre le Paradis et l’Enfer. Il est justement le reflet d’un aspect de notre société individualiste qui est aujourd’hui toujours d’actualité. Car ce monde n’est habité que par les personnes qui ont été oubliées par le systèmes, leurs proches, effacées des regards de tous. Il regroupe des âmes égarées, celle que l’on ne croise que dans les ruelles vides en pleine nuit et que nos regards évitent en plein jour que l’on nomme donc Nation de Minuit (et formidablement exprimée par l’auteur dans la post-face de l’ouvrage mais aussi au travers de témoignages de personnages rencontrés au film du récit).
Ce monde abandonné est donc le moyen pour Straczynski de parler de la facilité avec laquelle nous oublions les nôtres, un constat amer mais aussi humaniste qui touche et peut nous faire alors réfléchir sur notre comportement sans non plus être donneur de leçons.
Mais le road trip dans ce monde presque intangible et ce combat que devrait mener David Grey pour sauver son âme et ne pas devenir l’un de ces Walkers est aussi l’histoire d’un homme qui doit apprendre à se connaitre, à retrouver la foi en lui-même, en ses proche, en ses sentiments alors qu’il s’enfonce dans les ténèbres. Un véritable chemin de croix qui permet à l’auteur d’aborder le sujet de la religion sans lourdeur et, au contraire va développer mine de rien la spiritualité de quiconque lira ses lignes.
Pour l’accompagner dans cette confession particulièrement sombre et pessimiste mais toujours guidée par la lumière d’un espoir possible, Straczynski travaille ici pour la première fois avec le dessinateur Gary Frank (qu’il retrouvera sur Supreme Power) dont le trait expressif fait merveille pour révéler les sentiments des personnages sans minimiser les scènes d’action ou demandant à être visuellement impactantes.
S’enfonçant petit à petit dans le repère des Walkers et donc de ce que la société peut avoir de plus noir au point d’y perdre son âme, Midnight Nation n’est certainement pas un récit joyeux et dynamique, invitant volontiers à l’introspection. Mais on s’attache tout de même bien à ces personnages même si ils gardent une part de mystère et restent loin du manichéisme facile qui ne fait qu’augmenter la spiritualité de l’histoire. Avec ce récit très personnel, JM Straczynski a donc écrit un nouveau bijou qui reste en tête bien après la lecture.