Registre des mandats et nullité de l'assemblée générale de la copropriété

Publié le 25 février 2014 par Christophe Buffet

Voici un arrêt qui juge que l'irrégularité de la tenue du registre des mandats par le titulaire de la carte professionnelle portant la mention « gestion immobilière » représentant un syndicat de copropriétaires n'entraîne pas, par elle-même, la nullité de son mandat :

"Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 27 janvier 2012) que la société Romance (la société), copropriétaire, a fait assigner le syndicat des copropriétaires ensemble immobilier Le Magali (le syndicat des copropriétaires) et le syndic en annulation de l'assemblée générale du 10 juillet 2008, subsidiairement de quatre de ses décisions et en payement de dommages-intérêts ;

Sur le premier moyen ci-après annexé :

Attendu, d'une part, que la cour d'appel n'a pas violé les articles 16, 783, 784 et 910 du code de procédure civile en énonçant que l'ordonnance de clôture, initialement prise le 8 novembre 2011 avait été révoquée à l'audience, avec l'accord des parties, avant l'ouverture des débats et qu'une nouvelle clôture avait été prononcée ;

Attendu, d'autre part, que la société n'ayant pas prétendu devant la cour d'appel que les conclusions du syndicat des copropriétaires ne lui auraient pas été signifiées, le moyen ne peut être accueilli ;

Sur le deuxième moyen pris en sa première branche, ci-après annexé :

Attendu qu'ayant constaté que le syndic avait conclu « agissant en la personne de son syndic en exercice, M. X... gestion agissant poursuites et diligences de son représentant légal » et relevé que les copropriétaires avaient désigné leur syndic en la personne de M. X...exerçant sous le nom commercial cabinet X... gestion, la cour d'appel a pu retenir que la circonstance que le cabinet X... gestion ne pouvait être représenté par un représentant légal était sans conséquence et a pu en déduire que le syndicat des copropriétaires était régulièrement représenté devant la cour ;

Sur le deuxième moyen pris en ses deuxième et troisième branches :

Attendu que la société fait grief à l'arrêt de la débouter de ses demandes alors, selon le moyen :

1°/ que le titulaire de la carte professionnelle portant la mention « gestion immobilière » doit tenir, sous sa responsabilité, un registre des mandats comportant la liste des différents mandats qui lui ont été consentis ainsi que leur numéro d'inscription ; qu'en jugeant que le mandat de « gestion immobilière » n'était pas soumis aux règles relatives à la numérotation des mandats, cependant qu'un tel mandat est expressément visé par la réglementation relative à la numérotation des mandats et à la tenue des registres des mandats, la cour d'appel a violé les articles 64, 65 et 72 du décret n° 72-678 du 20 juillet 1972 ;

2°/ subsidiairement que les décisions qui confient au titulaire du registre des mandats la gestion d'un syndicat de copropriétaires, doivent être mentionnées à leur date sur le registre ; qu'en s'abstenant de rechercher, après avoir rappelé la nécessité de procéder à une telle inscription, si étaient mentionnées, dans le registre du titulaire de la carte professionnelle « gestion immobilière », et à leur date, les résolutions des assemblées générales des copropriétaires ayant procédé, chaque année, à la désignation du « cabinet X... gestion » en qualité de syndic pour une durée de douze mois, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 65, alinéa 3, du décret n° 72-678 du 20 juillet 1972 ;

Mais attendu, d'une part, que la cour d'appel a exactement retenu qu'aux termes de l'article 65 du décret du 20 juillet 1972, c'est seulement la décision confiant la gestion du syndicat des copropriétaires aux

titulaires du registre des mandats qui devait être mentionnée dans le registre et que la disposition sur la numérotation des mandats ne concernait pas la gestion immobilière ;

Attendu, d'autre part, que l'irrégularité de la tenue du registre des mandats par le titulaire de la carte professionnelle portant la mention « gestion immobilière » représentant un syndicat de copropriétaires n'entraîne pas, par elle-même, la nullité de son mandat ;

Attendu que l'arrêt relève que la société produit la copie du registre des mandats du syndic ne mentionnant qu'un seul mandat pour le syndicat des copropriétaires en date du 27 mars 2003 ;

Que par ce motif de pur droit, substitué à ceux justement critiqués, la décision se trouve légalement justifiée ;

Mais sur le troisième moyen :

Vu l'article 14-3 de la loi du 10 juillet 1965, ensemble l'article 2, alinéa 2, du décret du 14 mars 2005 ;

Attendu que les charges et produits du syndicat, prévus au plan comptable, sont enregistrés dès leur engagement juridique par le syndic, indépendamment de leur règlement ;

Attendu que pour rejeter la demande d'annulation de la décision d'approbation des comptes clôturés au 31 décembre 2007, l'arrêt retient que si l'indemnité allouée au syndicat par le jugement du 20 avril 2007 ne figurait pas dans les opérations exceptionnelles, cela n'affecte pas la régularité de la situation comptable effective du syndicat des copropriétaires dès lors que les sommes ne lui ont été réglées que postérieurement à l'exercice approuvé ;

Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute la société civile immobilière Romance de sa demande d'annulation de la décisions n° 3 de l'assemblée générale du 10 juillet 2008, l'arrêt rendu le 27 janvier 2012, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée ;

Laisse les dépens à la charge du syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier Le Magali et de M. X...exerçant sous l'enseigne X... gestion ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier Le Magali et M. X...exerçant sous l'enseigne X... gestion à payer la somme de 1 500 euros chacun à la société Romance ; rejette les autres demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du cinq février deux mille quatorze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par Me Haas, avocat aux Conseils, pour la société Romance

Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR débouté la SCI Romance de l'ensemble de ses demandes ;

AUX MOTIFS QUE l'ordonnance de clôture, initialement prise le 8 novembre 2011, a été révoquée à l'audience, avec l'accord des parties, avant l'ouverture des débats et une nouvelle clôture a été prononcée ;

ALORS, 1°), QUE, réserve faite du cas où il y a accord des parties pour fixer la clôture après révocation d'une précédente ordonnance au jour de l'audience, il est interdit aux juges du fond, après avoir révoqué l'ordonnance de clôture, de décider simultanément, dans un même trait de temps, que l'instruction sera close ; qu'en l'espèce, si l'arrêt fait ressortir l'accord des parties sur la révocation de l'ordonnance de clôture, en revanche, il ne fait pas état d'un accord des parties pour que la clôture de l'instruction soit à nouveau aussitôt prononcée ; que, dès lors, en ordonnant, le jour de l'audience des débats, la révocation de l'ordonnance de clôture puis, sans avoir ordonné la réouverture des débats, la clôture de l'instruction, la cour d'appel a violé les articles 16, 783, 784 et 910 du code de procédure civile ;

ALORS, 2°), QUE les parties doivent se faire connaître mutuellement en temps utile les moyens de fait sur lesquels elles fondent leurs prétentions, les éléments de preuve qu'elles produisent et les moyens de droit qu'elles invoquent, afin que chacune soit à même d'organiser sa défense ; que, par ailleurs, le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'en statuant au vu de conclusions du syndicat des copropriétaires Le Magali déposées le 6 décembre 2011, qui n'avait fait l'objet d'aucune signification à la SCI Romance, la cour d'appel a violé les articles 15 et 16 du code de procédure civile.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR débouté la SCI Romance de l'ensemble de ses demandes ;

AUX MOTIFS QUE la société civile immobilière Romance affirme qu'« il est impossible de déterminer qui est réellement le syndic de la copropriété Le Magali, et que ni M. X...ni la société X... Gestion ne peuvent valablement représenter le syndicat copropriétaires » ; qu'il résulte des écritures prises devant la cour que le syndicat des copropriétaires a conclu, le 6 décembre 2011, « agissant en la personne de son syndic en exercice M. X...X... Gestion ...agissant poursuites et diligences de son représentant légal demeurant audit siège » ; qu'il est établi, par la production du procès-verbal de l'assemblée générale du 24 mars 2011, qui n'est pas annulée même si elle est à ce jour contestée, que les copropriétaires y ont désigné, aux termes de la résolution numéro 4, leur syndic en la personne M. X...exerçant sous le nom commercial cabinet X... Gestion pour une durée de 12 mois, de sorte que le syndicat des copropriétaires, qui a conclu dans les termes ci dessus rapportés, est régulièrement représenté devant la cour ; que la circonstance que le cabinet X... Gestion, qui n'est qu'un nom commercial pour M. X..., ne puisse être représenté par « un représentant légal » ainsi que mentionné dans l'entête de ses conclusions est inopérant ; qu'enfin, la société Romance invoque le non respect des dispositions de l'article 65 du décret du 20 juillet 1972 relativement à la numérotation des mandats et à la tenue du registre et elle produit la photocopie des pages du registre des mandats qu'elle a obtenus en se rendant chez le syndic avec l'assistance d'un huissier le 6 octobre 2011 ne mentionnant qu'un seul mandatpour le syndicat des copropriétaires Le Magali en date du 27 mars 2003 ; que ce moyen est toutefois vain au soutien d'une demande de nullité du mandat du syndic, dès lors qu'aux termes de ce texte, c'est seulement la décision confiant la gestion du syndicat descopropriétaires aux titulaires du registre des mandats qui doit y être mentionnée, que les dispositions sur la numérotation des mandats ne concernent pas la gestion immobilière (voir article 72 alinéa 1er du décret), qui a d'ailleurs un régime particulier (voir article 64 du même décret) ;

ALORS, 1°), QUE la contradiction de motifs équivaut à un défaut de motifs ; qu'en retenant, pour juger que le syndicat des copropriétaires était valablement représenté devant elle, d'un côté, que la société X... Gestion, dotée de la personnalité morale, avait la qualité de syndic, de l'autre, qu'une telle qualité était revêtue par M. X...en sa qualité de personne physique, la cour d'appel a entaché sa décision d'une contradiction de motifs et violé l'article 455 du code de procédure civile ;

ALORS, 2°), QUE le titulaire de la carte professionnelle portant la mention « gestion immobilière » doit tenir, sous sa responsabilité, un registre des mandats comportant la liste des différents mandats qui lui ont été consentis ainsi que leur numéro d'inscription ; qu'en jugeant que le mandat de « gestion immobilière » n'était pas soumis aux règles relatives à la numérotation des mandats, cependant qu'un tel mandat est expressément visé par la réglementation relative à la numérotation des mandats et à la tenue des registres desmandats, la cour d'appel a violé les articles 64, 65 et 72 du décret n° 72-678 du 20 juillet 1972 ;

ALORS, 3°) et subsidiairement, QUE les décisions qui confient au titulaire du registre des mandats la gestion d'un syndicat de copropriétaires doivent être mentionnées à leur date sur le registre ; qu'en s'abstenant de rechercher, après avoir rappelé la nécessité de procéder à une telle inscription, si étaient mentionnées, dans le registre du titulaire de la carte professionnelle « gestion immobilière », et à leur date, les résolutions des assemblées générales des copropriétaires ayant procédé, chaque année, à la désignation du « cabinet X... Gestion » en qualité de syndic pour une durée de douze mois, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 65, alinéa 3, du décret n° 72-678 du 20 juillet 1972.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR débouté la société Romance de sa demande tendant à voir prononcer la nullité de la résolution n° 3 de l'assemblée générale du 10 juillet 2008, portant approbation des comptes clôturés au 31 décembre 2007 ;

AUX MOTIFS QUE la résolution 3 est relative à l'approbation des comptes clôturés au décembre 2007 ; que la société Romance affirme que les comptes de l'exercice 2007 « ne sont conformes ni à l'article 14-3 de la loi, ni à l'article 11 du décret du 17 mars 1965, ni aux décret et arrêté du 14 mars 1965 » ; que « les tableaux obligatoires 4 et 5 prévus au quatrième alinéa de l'article 11 du décret 67-223 (compte des charges et produits pour travaux et opérations exceptionnelles) ne sont pas produits » ; que « l'indemnité résultant du jugement du 20 avril 2007 devenu définitif le 15 octobre 2007 n'est pas portée au sous-compte 718 " produits exceptionnels " ni dans les annexes 4 et 5 qui ne sont pas produites » ; que « l'état financier après répartition (tableau annexe 1) est volontairement embrouillé par l'emploi des codes 101 inexistants ou fictifs mêlant provisions non remboursables (compte 102) et les avances remboursables (compte 103 avec ses sous comptes) » ; qu'« au même tableau, le code 40 " fournisseurs " est appliqué aux comptes fournisseurs créditeurs et aux comptes fournisseurs débiteurs » ; que d'autres codifications sont fausses, qu'il manque des honoraires de mutation et que ces irrégularités interdisent tout contrôle effectif des comptes ; que, sur ces griefs, il n'est pas démontré qu'il y ait eu des travaux exceptionnels réalisés à inclure dans les comptes, et que si l'indemnité allouée au syndicat des copropriétaires par le jugement du 20 avril 2007 ne figure pas dans les opérations exceptionnelles, ce qui n'est pas contesté, cela n'affecte pas la régularité de la situation comptable effective du syndicat des copropriétaires dès lors qu'il n'est pas contesté que ces sommes ne lui ont été réglées que postérieurement à l'exercice ainsi approuvé ; que par suite l'absence de ces comptes particuliers de charges et produits pour opérations exceptionnelles est inopérante sur la validité du vote qu'elle ne saurait avoir vicié ; que les autres griefs, qui sont tirés de la non conformité des écritures des divers sous comptes aux modèles imposés par le décret du 14 mars 2005, ou de l'emploi de codifications erronées ou encore de l'oubli d'honoraires de mutation, ne peuvent fonder l'annulation sollicitée, dès lors que la société Romance ne verse pas aux débats le détail des écritures qu'elle critique, sans pour autant contester avoir reçus les documents prévus à l'article Il du décret du 17 mars 1967, (à savoir, l''état financier du syndicat des copropriétaires, son compte de gestion générale, et le comparatif des comptes de l'exercice précédent approuvé), étant rappelé qu'il a été ci-dessus retenu que la seule absence du compte particulier « charges et produits exceptionnels », qui n'est que l'un des postes du compte général de la copropriété ne fait de toutes façons pas grief à la sincérité des comptes, ni à la validité de leur vote ;

ALORS, 1°), QUE les charges et les produits d'un syndicat des copropriétaires, prévus au plan comptable, sont enregistrés dès leur engagement juridique par le syndic indépendamment de leur règlement ; qu'en se fondant, pour juger que les comptes 2007 soumis à l'assemblée générale des copropriétaires, qui ne mentionnaient pas l'indemnité allouée au syndicat des copropriétaires par un jugement du 20 avril 2007, donnaient une image fidèle de sa situation comptable effective, sur la circonstance que ladite indemnité n'avait été réglée que postérieurement à l'exercice approuvé, la cour d'appel a violé l'article 14-3 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 et l'article 2, alinéa 2, du décret n° 2005-240 du 14 mars 2005 ;

ALORS, 2°), QUE le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'il ne peut fonder sa décision sur l'absence au dossier d'une pièce invoquée par une partie, qui figurait au bordereau des pièces annexé à ses dernières conclusions et dont la communication n'avait pas été contestée, sans inviter les parties à s'en expliquer ; qu'en l'espèce, il résulte du bordereau de communication de pièces, annexé aux conclusions de la société Romance déposées le 4 novembre 2011, qu'elle avait produit, sous la cote numéro 17, l'ensemble des pièces comptables qui lui avaient été notifiées préalablement à l'assemblée générale, communication qui n'avait pas été contestée ; qu'en se fondant, pour rejeter la demande formulée par la société Romance, sur la circonstance que celle-ci n'aurait pas versé aux débats les documents comptables critiqués, sans avoir, au préalable, invité les parties, et en particulier la société Romance, à présenter ses observations, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile."