DEBAT D’ORIENTATION BUDGETAIRE 2014
ROMAINVILLE LE 19 FEVRIER 2014
Intervention de Chantal GUYARD
Au nom du groupe des élus communistes
Madame Le maire,
C’est avec intérêt que nous avons pris connaissance du rapport d’introduction au débat d’orientation budgétaire qui consacre une large place à la présentation du contexte économique et financier auquel est confrontée la ville.
Ce débat, le dernier de ce mandat, est l’occasion de tenter de voir où nous conduisent les décisions et les reculs politiques gouvernementaux!
C’est l’occasion également de constater que Romainville n’est pas dans une bulle. Ce qui se passe et se décide ailleurs interfère directement sur les finances de la ville et donc, par conséquent, sur le quotidien des Romainvilloises et Romainvillois.
Nous débattons aujourd’hui dans un contexte de crise financière, sociale, politique et même morale,sans précédent récent dans notre vie nationale :
Chômage de masse,
Baisse du pouvoir d’achat des familles,
Montée de l’extrême-droite et de sa xénophobie,escortée par la perte de repères d’une droite revancharde,
Et enfin désaveu populaire d’un pouvoir qui apparaît impuissant et déçoit sa propre base électorale.
Ne vous trompez pas sur mon propos. Même si ma critique de la politique gouvernementale est vive, et on le serait à moins au vue des choix qui sont faits, je n’adhère pas pour autant à la récupération démagogique et mal placée de cette crise par une droite amnésique qui en est largement responsable. Cette droite réactionnaire qui hier se mêlait aux bonnets rouges, indûment ressuscités par la FNSEA et le MEDEF et qui, aujourd’hui défile en rang serré lors de la manif pour tous.
Si il y a effectivement un ras-le-bol populaire, ce n’est pas le même. Ce n’est pas celui de l’impôt utile qui fait vivre le service public, ni celui des cotisations qui nous rendent un peu plus égaux devant la santé et l’âge. Non, c’est le ras-le-bol devant l’injustice sociale et fiscale.
Avec, notamment, l’augmentation de la TVA, d’ailleurs applaudie par le Président du MEDEF, c’est la grande majorité de la population qui doit supporter douloureusement les politiques d’austérité. Ce sont la majorité des biens et des prestations de service qui sont touchés : les charges locatives, le gaz, l’eau, l’électricité, le transport, la restauration. Quel coût cela va représenter dans le budget des familles?
Pour le budget de notre ville, j’ai fait un calcul approximatif sur les éléments que j’avais en ma possession, à savoir le budget primitif 2013. A budget constant, cette augmentation impactera les dépenses de fonctionnement à hauteur de 40 000€ et d’investissement à 60 000€. Je ferme la parenthèse.
Je parlais d’injustice. Alors que les entreprises disposent déjà de nombreuses aides, qui représentent un coût de 110 milliards d’euros par an, 20 milliards d’aides supplémentaires de crédit d’impôt compétitivité-emploi (CICE) vont leur être transférés, sans contrepartie. Comble de l’ironie, ce nouveau cadeau, qui profite notamment aux entreprises du CAC 40, est financé en partie par cette hausse de la TVA .
N’est-ce pas de l’injustice lorsque, en 2014, le produit attendu de l’Impôt sur le Revenu devrait augmenter d’environ 4,4Mds d’euros tandis que celui de l’impôt sur les sociétés sera en baisse de 17,3 Mds d’euros ?
N’est-ce pas de l’injustice,lorsque les augmentations générales de salaires dépassent à peine le 1% annuel depuis 2012 (0% depuis 5 ans pour les fonctionnaires), alors que parallèlement les rémunérations (déjà colossales) des 120 plus grands patrons français continuent à augmenter de 6,3% en moyenne.
Ce sont donc toujours les mêmes qui sont victimes des politiques libérales, de l’austérité, de la pression fiscale, des licenciements et à qui on demande de payer l’addition d’une crise qui n’en finit plus et qui n’est pas la leur
Voilà les vraies causes profondes du malaise de notre société, voilà ce contre quoi il faut lutter !
Mais, malgré un changement de majorité, ce gouvernement poursuit les orientations libérales du précédent et amplifie l’asphyxie financière dont sont victimes les collectivités territoriales auxquelles on impose de contribuer activement au redressement des comptes de la Nation alors qu’elles ne représentent que 9% de la dette de l’Etat. Cet effort ne peut se faire qu’au détriment des populations.
En réduisant de 15 Mds d’euros les dépenses publiques, dont 9 Mds pour les dépenses d’Etat et 6 Mds pour les dépenses sociales,
En réduisant de 1,5 Mds la DGF des collectivités territoriales,dont 800 millions pour les seules communes et ce, pendant 3 ans soit 4,5 Mds d’euros, c’est l’autonomie même des collectivités qui est mise à mal. C’est également une baisse de moyen pour les services rendus à la population. Ce gel de dotations, représente pour Romainville,entre 2012 et 2014, une perte de 500 000€.
Même si les dispositifs de péréquation sont revus à la hausse, pendant combien de temps encore la solidarité des communes les moins pauvres pourra permettre aux communes les plus en difficulté d’assurer leur offre de service public et de répondre aux attentes sociales de leur population.
Cette réflexion peut également s’étendre aux recettes fiscales intercommunales. Avec la suppression de la taxe professionnelle, qui, je le rappelle a été décidée par la droite, celles-ci se sont vues privées de marge de manœuvre fiscale.
Ajoutons que demain, à travers le choix libéral de la métropolisation et la constitution de très vastes communautés de communes, ce sont,au nom du funeste dogme de la compétitivité des territoires, les marges de manœuvres foncières qui vont disparaître,avec la perte de la compétence en matière de plan local d’urbanisme.
Et cela, alors que les élus locaux de tous bords qui connaissent le terrain rejettent massivement ces projets. C’est le cas de 75% de ceux concernés par le Grand Paris.
Car, au final, sans ces recettes fiscales et foncières, sans cette liberté de choix,que restera-t-il des communes, sinon d’être des rouages administratifs sans aucun pouvoir réel de décision?
C’est une mort programmée voulue par Sarkozy poursuivie par François Hollande. C’est une attaque contre la démocratie perpétré sous la houlette du capital qui veut une Europe de grandes régions en concurrence les unes avec les autres.
Alors, dans ce contexte de baisse de dotations, de perte de l’autonomie fiscale et foncière, les charges s’accroissent par le transfert de compétences de l’Etat sans transfert de moyen.
Nous réaffirmons qu’il faut rompre avec l’obsession de la réduction des déficits et de la compétitivité à tout prix. Il nous faut d’urgence une véritable réforme fiscale, une réforme juste et efficace afin que les plus hauts revenus, les profits et les grandes entreprises participent réellement à l’effort.
Aujourd’hui, débattre des orientations budgétaires d’une commune tend à devenir un exercice formel de comptabilité purement gestionnaire et vide de tout sens politique et démocratique.
La commune ne peut pas être cette coquille vide. Elle doit rester le pivot central de la démocratie vivante dans notre pays, le lieu où nous, élus, qui vivons en contact permanent avec la population, puissions l’écouter, agir et réagir avec elle. Nous devons nous donner les moyens de perpétuer ce pourquoi nous avons été élus : rester les garants d’une politique solidaire et durable.
Je vous remercie de votre attention.