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Charges sociales : sortons le débat des griffes du patronat

Publié le 22 février 2014 par Copeau @Contrepoints

Par Emmanuel Bourgerie.

Salaires charges sociales
S’il y a une chose qui m’agace dans les débats récents, c’est d’entendre le patronat se plaindre du montant des charges, et ce pour plusieurs raisons. Premièrement, on ne peut pas prétendre (à juste titre) que les charges soient payées par le salarié et non par le patron, puis ensuite en demander des baisses, c’est tout simplement incohérent. Ensuite, puisque c’est un problème qui ne concerne que le salarié, je ne vois aucunement pourquoi est-ce que ce serait au MEDEF de mener ce débat et non les principaux intéressés eux-mêmes.

Mais pour resituer le contexte, de quoi parle-t-on ? Chaque employé touche un salaire dit « net », c’est à dire duquel des prélèvements ont été effectués – les fameuses « cotisations » ou « charges ». On fait la distinction entre cotisations salariales et cotisations patronales, même si ce n’est qu’un jeu d’écriture comptable. C’est bien sur les épaules du salarié qu’elles reposent, car tout comme un vendeur répercute la TVA sur ses prix, un patron répercute les cotisations sur les salaires qu’il verse.

À quoi servent-elles ? A financer de nombreuses prestations sociales. Les trois les plus connues – et plus importantes – sont la santé, le chômage et la retraite.

S’il y a une réforme qu’il faudrait mener, ce serait de faire payer les cotisations par les salariés de manière directe et non plus déguisée. Pour commencer, cela aurait d’énormes vertus pédagogiques, puisque l’on verrait enfin quel est le montant réel de notre protection sociale. On ne peut décemment pas tenir un débat démocratique éclairé sur l’efficacité de notre protection sociale quand les informations sont aussi cachées qu’elles ne le sont actuellement. Entre personnes politiquement informées, chacun sait que la protection sociale vient des cotisations, mais le quidam moyen est persuadé que les hôpitaux sont construits et fonctionnent grâce à nos impôts. Confusion régulièrement entretenue par de nombreux populistes par ailleurs.

Mais est-ce que le prix que l’on paie pour ces services est trop élevé ? Malheureusement, personne ne peut le dire. Il l’est probablement, mais je suis dans l’incapacité de l’affirmer. Comme je l’ai expliqué précédemment, un prix ne peut être fixé ou deviné de façon arbitraire. Ce n’est qu’avec la concurrence que l’on peut connaître le prix d’un service. Faut-il alors ouvrir la sécurité sociale à la concurrence ? À mon avis oui, mais c’est une autre question.

Et enfin, il serait bon de ne plus avoir à supporter le MEDEF sur ce sujet. Ce qu’il demande lorsqu’il réclame une baisse des charges, c’est en réalité une baisse des salaires. C’est juste qu’il n’ose pas le dire devant les micros. C’est un vrai débat, mais ne le masquons pas derrière la question des cotisations, qui est du ressort des salariés.

Au-delà de la question des salaires, je tenais aussi à rappeler que la compétitivité est un mot bien élaboré pour désigner ni plus ni moins que le rapport qualité prix de ce que produit l’entreprise. Baisser le coût du travail, c’est vouloir améliorer ce rapport en produisant la même chose à coût moindre, ce qui est une option bien paresseuse et socialement difficile à faire passer. Une autre option serait de monter en gamme, de moderniser la production et les entreprises. Mais ne nous faisons pas d’illusions : cette option ne sera jamais considérée. Elle remet en cause la situation établie du patronat, d’une classe politique et de sa corruption légale, et surtout elle remet en cause un dogme profondément ancré sur la taxation du capital.

Que le gouvernement préfère appauvrir la population plutôt que de revenir sur la taxation de l’investissement en dit très long sur son degré de dogmatisme.

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