Spontanément, t’as pas envie de t’occuper de ça. Genre, encore moins que la pile de paperasses urgentes-pour-avant-hier qui s’entasse sur ton bureau.
T’as passé les étapes hautement prises de tête du premier âge, sur le moment tu as cru que ce seraient les décisions les plus importantes que tu aies à prendre de ta vie: le changer ou pas le changer? Est-ce qu’il a encore faim? Le Doliprane, en suppo ou en sirop? Je fais quoi, je le laisse pleurer là ou pas?
Ca roulait à peu près. Tu as découvert que le changer quand ça fuit ou quand ça fouette, c’est un bon compromis. Quand il a faim, il va tout seul chercher la boîte à madeleines dans l’armoire, tu as juste à lui reprendre avant qu’il n’attaque la troisième alors qu’il est 11h50 et que tes rougets sont au four. Il pousse la pipette du Doliprane tout seul au fond de son bec, voire en réclame encore quand c’est fini (contrairement au suppo, hé hé). Tu le laisses pleurer le temps que tu finisses ce à quoi tu étais occupé, oui, même dormir. Enfin, presque. T’essaies, quoi.
T’étais peinard. Vraiment, les gosses, trop fastoche. S’il suffit de leur filer un coup de main pour le puzzle 1500 pièces, je veux bien en pondre encore trois. (Euh, non, en fait.)
Sauf que.
La grande rentre du collège en disant que le chauffeur du bus met la musique à fond, danse comme un dingo, et son bus avec lui. Qu’il a rétorqué qu’on peut bien rigoler, quand les ados lui ont demandé, à la troisième embardée, de garder ses douze pneus alignés. Tu appelles le conseil général.
Le gamin rentre de l’école les fesses mouillées. Comme il a légèrement passé l’âge de ce à quoi tu penses, tu sens le mammouth sous gravier. Tu questionnes. Entre ses larmes, tu comprends qu’une fois de plus, il a été jeté à terre, dans une flaque, et éclaboussé au visage. Toujours les mêmes pestes, celles-là mêmes qui trouvent hilarant de découper, jour après jour, tous ses cahiers aux ciseaux. Lui cassent ses crayons en deux. Sans que personne n’intervienne. Tu appelles le directeur.
Tu appelles le médecin, l’orthodontiste, le psychologue. Le vétérinaire, le prof de solfège, l’assurance. La banque, le proviseur, l’école de ski. Le consulat, l’avocat, le fournisseur d’accès. L’agence de voyage, la mairie, le CPE. Les parents d’élèves, l’ophtalmo, le dermato.
Alo ui cer parent. La face cachée du loupiot.