Fréquence de publication sur les réseaux sociaux : quelle martingale ?
En presse, on n’ignore pas le fait que la régularité de diffusion contribue largement à l’attachement du lecteur. Avec le transfert d’audience vers les réseaux sociaux, cette réalité se duplique-t-elle ? Peut-on en user durablement ? Faut-il publier rarement ou fréquemment sur les réseaux sociaux ? Le dilemme est le suivant : si on ne publie pas assez, les fans ne vous voient plus et vous oublient. Si on publie trop, les fans vous voient trop et arrêtent de vous suivre.
Publier plus ou publier mieux ?
Dans l’exercice de l’animation de communautés, nous sommes confrontés à deux « idéologies » persistantes. D’un côté, le marketing « à l’américaine » qui publie le plus possible. Ces tenants du chaos proclament qu’on ne sait jamais totalement à qui s’adresse un message de marque et que, pour cela, il convient de faire feu de tout bois en proposant la plus grande variété de contenus possible à une audience. Comme la pêche au filet, plus on est large, plus on attrape de poissons. Ils sont anglo-saxons et appuient leurs propos sur des brands si massives que toute stratégie de communication ne vient que prolonger un patrimoine tellement riche que rien ne peut plus l’atteindre défavorablement. Même si Coca tuait des dauphins au lance-missile, cela ne pourrait avoir un effet négatif durable…
De l’autre, le marketing « à l’européenne » prétend que la qualification d’une audience passe par l’analyse continue de l’impact des messages, des relations et des relais au cœur de la communauté. Pour elle, il est préférable de produire moins de contenus, en les appuyant sur une stratégie précise de discours et de publication. Nous nous attachons, chez Editoile, à chercher les preuves tangibles de cette approche vertueuse. Nous utilisons plusieurs outils de suivi de nos comptes sociaux, rarement d’accord entre eux. Nous concevons des grilles de publication qui positionnent des horaires et des formats. Sans trouver « la » martingale…
Depuis 2013, quelques praticiens du community management s’orientent vers un propos moins tranché : « produisons le plus possible de contenus diversifiés, très diversifiés, et attachons nous à enrichir, à angler, à pré-qualifier les messages pour notre audience idéale », disent-ils. Exemples à l’appui, ils décrivent des séquences de publication durant lesquelles la notoriété digitale est engendrée par des salves de messages courts et percutants, peu ciblés, proches du produit et donc de son auditoire potentiel. Le message crée-t-il l’audience ?
Fréquence de publication = capacité de production ?
Le « temps de cerveau disponible » de l’audience en ligne ne nous est pas connu. C’est le jeu : les analytics donnent des approximations, les plates-formes affichent des valeurs mais, au fond, sait-on ce qui se passe de l’autre côté des écrans ? Quand bien même le saurions-nous, la diversité de l’offre fait qu’il serait osé de bâtir des stratégies durables fondées sur ces valeurs. Tout change si vite. Il suffit qu’un chat tombe d’une armoire sur YouTube pour que l’audience potentielle d’une journée s’évapore.
Nous sommes condamnés à être ponctuels, prévisibles comme le sont les grilles de programmes des grands médias pour les cœurs de cible réellement attachés à la marque ou au produit mais aussi surprenants. Dans un large part, la fréquence de publication est dictée par la capacité de production. C’est ce piège invisible qui déroute encore aujourd’hui beaucoup des enthousiasmes à être présent sur les réseaux sociaux. Tant d’entreprises, d’organisations se confrontent à la production d’un message en « temps long » – campagne de pub, rapport d’activité, plaquette – et ne peuvent d’elles-mêmes fabriquer des contenus diversifiés, courts, propres à capter quelques fractions d’audience.
La cadence, c’est la bonne ambiance !
C’est donc en quelque sorte la performance durable de la régularité qui s’impose, plus que toute autre stratégie. Si la marque engendre 5 messages par jour, c’est que sa diversité intrinsèque est en mesure de capter une audience variée. Si le seul message possible ne se présente qu’une fois par semaine, peut-être vaut-il mieux le poster le mardi soir ou le jeudi à 6 h du matin. Connaître un auditoire, c’est suivre farouchement ses traces au quotidien. Combien de personne ont parlé d’un contenu ? Que peut-on savoir de leurs autres intérêts ?
Pour le producteur de roquefort Gabriel Coulet, Editoile a élargi au maximum du raisonnable le territoire de communication de la marque sur Facebook. Résultat ? Une communauté de « pros » du fromage et de l’hospitalité qui privilégient la marque et ses produits sur la base d’une image renouvelée, à la fois souriante et distincte. Ne nous leurrons pas : les deux tiers de cette communauté ont été acquis par le biais de jeux-concours. Même si ceux-ci étaient dotés de prix modestes et peu nombreux, ils ont contribué à enrichir la discussion au point que plus de 96 % des nouveaux « amis » sont resté captifs et partagent désormais les élucubrations diverses du tenancier moustachu de la page.
Le contenu pertinent fait l’audience
Nous avons tenté de traquer des « comportements prévisibles » dans la douzaine de communautés que Editoile anime à l’année. Il ne ressort de ces heures d’Excel que la certitude liée à la pertinence du contenu, un doux mélange d’informations exploitables, mémorisables et d’effets de surprise. Dès lors qu’on sert le fond et la forme, qu’on obtient une belle alliance de rigolade intelligente ou d’information plaisante, alors on captive assez d’attention initiale pour que la diffusion s’opère et que le message touche.
Nous voudrions que les ficelles soient moins subtiles, plus programmables. On peut montrer une fesse ou donner une Twingo, c’est évident, mais la communication en réseau est avide de belles choses à partager et ce n’est que le contenu qui, au final, fait ou pas l’audience.
Crédit photos : Photos Libres