Je suis tout juste de retour du Tchad où j'ai passé la semaine passée un voyage à la fois très riche, en découvertes, rencontres et admiration, et aussi plutôt douloureux car je n'étais vraiment pas en forme pour le Treg. Je dois bien dire que cette grosse fatigue m'inquiète un peu et rentrer malade comme je le suis en prime depuis hier soir ne dope pas mon moral.
Mais je vous raconterai mes déboires, tout de même relatifs, plus loin.
Car j'ai tout de même fait un beau voyage et pu profiter des nombreuses beautés de cette région vraiment étonnante. En effet, au-delà du "grand rien", un désert presque tout plat et parfaitement aride que nous avons traversé depuis notre arrivée à l'aéroport de Faya Largeau, l'Ennedi révèle bien des surprises. D'immenses formes rocheuses, concressions, arches et canyons aux formes surprenantes, de couleurs ocres rouges, s'élèvent comme sortis de l'imagination d'un peintre surréaliste au-dessus du plateau et des dunes de sables jaunes. La végétation-certes clairsemée- n'est pas tout à fait absente de la région, où l'eau affleure parfois. Il y a longtemps, très longtemps, la mer s'étendait ici et les hommes qui ont tracés les peintures rupestres qui ornent encore les grottes voyaient s'étendre devant leurs yeux une vaste forêt. C'est bien sûr l'eau qui a creusé, à l'aide du vent aussi, ces formes fantasmagoriques. Le spectacle est vraiment surprenant, on a bien souvent l'impression de fouler le sol d'une autre planète là-bas.
Grâce aux visites organisées après la course, j'ai pu bien profiter de ces beautés, notamment du spectacle fascinant de la delta d'Archéi, où des centaines de dromadaires viennent s'abreuver. De ce point de vue aussi, le TREG s'est révélé une réussite organisationnelle. J'ai donc pu tout de même apprécier ce beau voyage malgré mes déboires sportifs et une forme plus que modérée. Le groupe, la qualité de l'organisation y a également beaucoup contribué et même si j'étais soucieux je n'y ai pas perdu totalement le sourire. Participer à une "première", surtout sur un tel terrain et dans un bout du monde quelque peu redouté (de ce point de vue, il faut bien souligner que la région m'a paru sûre, calme et que l'événement était tout à fait sécurisé, les autorités tchadienne du tourisme regrettant amèrement et à juste titre la désinformation du ministère des affaires étrangères français, les zones de conflits étant situées à plus de 3000 kilomètres de là, soit à peine plus près finalement que...la France) offre toujours la chance de rencontrer un groupe de "pionniers" et des baroudeurs bien intéressants. En plus, avec un groupe assez réduit (20 coureurs, quelques accompagnants, l'équipe technique et médicale, les photographes, vidéastes et journalistes), une "sauce" qui prend bien, on forme vite une petite famille et de ce point de vue le séjour fut vraiment réussi. Mais je pense que le TREG conservera sans peine cet aspect convivial et de partage, si le public reste celui de coureurs "aventuriers" plus tourné vers la découverte et le défi que la pure compétition. Il ne faut pas y être trop regardant non plus sur le confort (même si le camp était franchement bien de ce côté là, ça reste roots) ni sur la gastronomie. En tous cas j'ai rencontré ou revu des gens bien sympathiques et intéressants. J'ai eu le plaisir de partager cette aventure avec mon ami Marco, qui a dû abandonner aussi, de retrouver Christian Ginter, monsieur marathon des Sables qui transporte sa gentillesse dans les désert depuis un bon quart de siècle, et de rencontrer bien d'autres belles personnes. J'ai éprouvé une certaine admiration aussi pour les deux vainqueurs du jour, Albert, le catalan passionné de course à pied depuis son plus jeune âge (ça me rappelle quelqu'un et nous avons eu, avec lui et la jeune médecin Marie, de belles discussions de passionnés d'athlé), qui a bien inauguré le palmarès et Elodie, une bien jolie maman et femme décidée, qui m'était apparu bien sereine à l'abord de la course et a bien dominé son sujet, avançant régulièrement jusqu'à la ligne d'arrivée avant de devenir la "star de l'Ennedi" et de bénéficier d'un large succès auprès de la population locale. Albert, Elodie, et tous ceux qui sont allé au bout de leur course, avaient en tous cas cette aventure bien dans la tête et dans les jambes. C'était loin d'être simple car le parcours était plus que difficile, creusé par les dunes, le sable mou et plombé par la chaleur. Je n'étais pas dans ces dispositions. Loin de là, même. Je dois revenir sur ma course à moi et je dois dire que je ne peux guère en tirer des conclusions positives. J'étais objectivement H.S. et je voudrai bien comprendre pourquoi. Comme je le disais déjà dans mon dernier post avant de partir, je sentais bien en abordant l'épreuve que je n'étais pas en forme; une fatigue bien prononcée, et en prime une petite blessure au mollet, diagnostiquée sur place comme une bonne contracture. Je doutais donc et même si j'avais vraiment envie de boucler la course, j'étais loin d'en être capable et ce qui m'inquiète un peu. En effet, j'ai dû abandonner au 55e kilomètre, vraiment épuisé et presque incapable de me tenir plus longtemps debout. Des maux d'estomac intenses, des crampes comme je n'en avais jamais eu, qui m'assaillaient au moindre mouvement, j'ai passé une partie de la nuit couché (heureusement bien entouré par Jean-Philippe, l'organisateur de ce beau TREG, de l'infirmier Luc qui m'a bien soigné, de Souleiman et du photographe Pierre-Emmanuel, qui m'a "décrampé" pendant trois heures, je les remercie encore pour leur sollicitude) au sommet d'une majestueuse dune, où j'étais parvenu en compagnie de Yann, un français habitant le Maroc avec qui j'ai partagé ce bout de course et qui m'attendait depuis un bon moment. Une nuit sur une dune, éclairé par la pleine lune et en plein désert, cela pourrait être un beau souvenir mais en l'occurrence, entre deux crampes et haut-le-coeur, ce n'était pas un moment bien agréable. Comme nous étions encore à la 5e ou 6e place au moment où j'ai vraiment senti que je ne pouvais plus faire un pas de plus, j'ai pu entre-apercevoir les autres concurrents, qui se sont tous gentiment inquiétés de mon sort. C'était bien entendu dur pour eux aussi et je n'ai certes pas été le seul à devoir laisser tomber mais bon je crois que personne n'était dans mon état... Alors certes il avait fait chaud dans l'après-midi (mais ce n'était pas insoutenable), certes le parcours était difficile mais tout de même. Je n'étais même pas parti bien vite (nous avons surtout marché) et ne plus être capable de faire 50 kilomètre à un rythme moindre (objectivement) que celui sur lequel j'en avalais sans m'en rendre compte ou presque autant tous les jours il y a deux mois me préoccupe. Je dois sans doute être "victime" de l'accumulation depuis cet automne (depuis le TAM je n'ai pas arrêté et la moyenne kilométrique de mes semaines doit dépasser les 260 kms), j'ai eu le sentiment d'être fatigué depuis le début janvier, mais tout de même. Je vais déjà essayer de me reposer, de trouver les causes de cette fatigue (si il y en a de métabolique) et sans doute réfléchir pour la suite. C'est vrai aussi que mes projets personnels, mes "grands chemins" me prennent aussi beaucoup d'énergie et que je risque avoir du mal à faire des courses, surtout longues, entre. Mais je vais tout de même essayer de répondre aux invitations qui m'ont été faites et d'y prendre plaisir. Enfin là, il me faut un petit temps de repos, de reprise et de réflexion sur comment gérer tout ça. Cela dit, même si oui, je suis embêté par mon état de mauvaise forme, je vais garder un beau souvenir de ce TREG et j'espère surtout être de nouveau de l'aventure pour les prochaines éditions car je pense que cette course a de l'avenir. Dans un premier temps, je vais tenter de retrouver la forme en vue d'être serein pour partir sur mon prochain chemin, retrouver mon bâton de pèlerin (j'espère encore "express") sur la Via de la Plata, à travers l'Espagne. J'ai prévu mon départ de Séville pour les premiers jours du printemps et je vous préciserai ici la semaine prochaine mon plan de marche.