Le genre "Mondo" effectue sa toute première apparition au cinéma en 1962 avec le film Mondo Cane. Avant d'entrer davantage dans les détails de ce long-métrage, il est nécessaire de définir ce qu'est le "Mondo". Il s'agit d'un genre réunissant des films d'exploitation tournés sous forme de documentaires. A priori, tout ce qui nous est montré est réel. Mais en réalité, tout est faux !
Autrement dit, le "Mondo" est un documenteur dont les thématiques tournent essentiellement autour de la mort, du sexe, de la violence et de bizarreries en tout genre et ce, à travers une caméra qui filme les soi-disantes coutumes de peuplades diverses, mais pas seulement.
C'est par exemple le cas de Mondo Cane, réalisé par Gualtiero Jacopetti, Franco Prosperi et Paolo Cavara. Le film sera présenté au Festival de Cannes en 1962. Il déclenche immédiatement une immense polémique. L'histoire ? Le film traite tout simplement des rites et des pratiques culturelles à travers le monde, mais avec une vraie fascination pour le voyeurisme et le morbide.
Le genre "Mondo" est né et le succès du film engendrera une suite, donc Mondo Cane 2, sur le même principe l'année suivante, en 1963. Qu'on le veuille ou non, Mondo Cane reste le film précurseur. C'est grâce ou à cause (vous choisirez...) de ce film que le "Mondo" sera décliné bien des années plus tard sous la forme du found footage. Le principe du found footage est quasiment identique et consiste à présenter une partie ou la totalité d'un film comme étant un enregistrement vidéo authentique, la plupart du temps filmé par les protagonistes de l'histoire.
La seule différence, c'est qu'il ne s'agit pas d'un documentaire d'exploitation mais d'une pseudo vidéo d'exploitation. Dans le genre found footage, les exemples sont nombreux, les plus connus se nommant Cannibal Holocaust, C'est Arrivé près de chez vous et Le Projet Blair Witch.
Encore une fois, tous ces films n'existeraient pas sans Mondo Cane, qui reste donc la référence ultime du genre. En gros, le genre "Mondo" va connaître de nombreuses variations et combinaisons. D'ailleurs, Gualtiero Jacopetti et Franco Prosperi exploiteront largement le filon. En 1966, ils réalisent Adieu l'Afrique, un nouveau documenteur sur l'Afrique en pleine période de décolonisation. Tout comme Mondo Cane, le film provoque la polémique et le scandale. Toutefois, au début des années 1970, Gualtiero Jacopetti et Franco Prosperi décident de cesser leur collaboration.
Qu'à cela ne tienne, Mondo Cane, sa suite et Adieu l'Afrique ont trouvé leurs fans dans les vidéos clubs. Ensuite, ce genre de film ne coûte pas cher à réaliser. De ce fait, de nombreux producteurs et cinéastes se lancent eux aussi dans le genre "Mondo" et copient le fameux Mondo Cane.
C'est par exemple le cas de Shocking Asia. Le principe est peu ou prou le même: une voix-off, un film tourné sous forme de documentaire, un dépaysement total, du sexe et de la violence. A la seule différence que le film se concentre exclusivement sur les bizarreries asiatiques, tout du moins, sur la face cachée de l'Asie. Shocking Asia rencontrera lui aussi son public. De plus, le long-métrage écope d'une interdiction aux moins de 18 ans.
Les fans de films trashs se précipitent dessus. De ce fait, Shocking Asia engendre plusieurs suites avec Shocking Asia 2 et Shocking Asia 3. Le public est de plus en plus friand de ce genre de documentaire incongru et en veut pour son argent. Le réalisateur, John Alan Schwartz, décide d'aller encore plus loin. En 1978, il signe Face à la Mort.
Ce documenteur gore et horrifique est interdit dans de nombreux pays. Paradoxalement, pour John Alan Schwartz, c'est le jackpot assuré. Pendant longtemps, Face à la Mort sera considéré comme le film le plus violent et le plus malsain jamais réalisé. Le principe du film est simple: il s'agit d'une compilation d'une série de décès, que ce soit des animaux ou des êtres humains.
Meurtres, chutes, accidents de voiture, animaux découpés en rondelles et même une exécution sur la chaise électrique font partie du menu fretin. La supercherie fonctionne: John Alan Schwartz sera même accusé d'avoir encouragé certaines morts durant le tournage de son "documentaire".
Evidemment, et heureusement, tout est faux. Toujours est-il que le film se transformera en une véritable saga horrifique avec de nombreux épisodes. Tous, sans aucune exception, seront interdits, censurés ou au mieux interdits aux moins de 18 ans. Dans la même veine, mais en moins trash tout de même, Romano Vanderbes réalisera L'Amérique Interdite.
Le film reprend le même principe que Shocking Asia, à la seule différence que ce documentaire revisite la face cachée des Etats-Unis. L'Amérique Interdite remporte un vif succès et attire plus d'un million de spectateurs en France. Romano Vanderbes signera même une suite, donc L'Amérique Interdite 2 dix ans plus tard, en 1990. Toutefois, d'autres producteurs vont encore plus loin dans le grand n'importe nawak. C'est par exemple le cas de Je Ne Suis Pas Un Monstre.
Comme l'indique le titre de ce... euh... "film", il s'agit d'un documenteur sur la vraie vie des monstres humains, donc des Freaks. C'est ainsi que le documenteur nous présente la vie quotidienne de la femme la plus grosse du monde, d'une femme à barbe ou encore du digne héritier d'Elephant Man !
Encore une fois, il faut flatter le voyeurisme du public. Sur ce dernier point, le public français participe largement aux succès de la vague Mondo. Certains réalisateurs décident donc eux aussi d'exploiter le filon. C'est par exemple le cas de Paris Secret et de sa suite, Paris Top Secret, le tout commenté par Philippe Bouvard ! Tout un programme !
Il y aura même un Saint-Tropez Interdit dans les années 80. En résumé, les villes touristiques françaises sont elles aussi victimes du "Mondo", en tout cas de producteurs prêts à tout pour gagner beaucoup d'argent facilement, d'autant plus que les tournages sont courts et les budgets particulièrement modestes. Bref, ce ne sont pas les exemples qui manquent !
Aujourd'hui, le genre "Mondo" reste encore d'actualité. Certes, plus personne ne pense à produire des films tels que Mondo Cane, Face à la Mort ou encore Shocking Asia, la faute à l'arrivée d'internet et de ses nombreuses vidéos qui exploitent l'idée de la violence filmée en temps réel.
De ce fait, Mondo Cane et ses nombreux dérivés paraissent complètement dépassés aujourd'hui. Paradoxalement, Mondo Cane reste un film précurseur. En un sens, il dénonce notre société voyeuriste, individualiste et de grande consommation avant l'heure. Enfin, à l'heure actuelle, le genre "Mondo" a été finalement décliné sous la forme du found footage, comme je l'ai déjà expliqué dans l'introduction. C'est aussi pourquoi il reste plus que jamais d'actualité. Il est aussi le reflet de notre société actuelle, focalisée sur l'image, l'apparence et le sensationnel.
Alice In Oliver