La rencontre amoureuse de Zweig à Mademoiselle A.
C'est un article un peu particulier qui me vient en tête. Pas trop sûre de l'assumer mais c'est le seul angle qui me vient pour parler de ce chef d'œuvre...
J'ai lu L'Amour d'Erika Ewald de Stefan Zweig et j'y ai trouvé beaucoup d'échos dans ma vie. L'auteur connaît le cœur humain. Il a su saisir la vérité des êtres, l'universalité des sentiments amoureux. Je crois que Zweig a tout dit dans cette nouvelle sur la complexité des rapports amoureux et il a percé à jour le mystère féminin, ses cas de conscience, ses prises de tête, ses angoisses lorsque le coup de foudre s'abat sur la Femme.
Elle aimait à se confier à elle-même dans ces rêves éveillés, car une pudeur quasi exacerbée ne lui permettait jamais de faire devant les autres la moindre allusion à ses sentiments, bien que son âme frémît sous le poids des paroles qu'elle ne parvenait pas à prononcer.J’ai énormément de choses à te dire mais je ne sais pas comment les dire. J’ai usé - ou abusé - d’un langage indirect, vague pour me distancer de toi afin de ne pas être au cœur d’une conversation confuse, pleine de failles, qui fatalement aurait été interrompue par une pudeur, une réserve, une gêne trop puissantes. Je ne parviens pas à exprimer ce que je pense réellement. Je n’ose pas te dire que je t’aime plus que tout au monde. Quand je te parle, j’atténue tout et tout ce que je ressens paraît édulcoré alors qu’en fait c’est bien plus fort. J’aimerais pouvoir tout t’expliquer et je voudrais répondre précisément, parfaitement et entièrement à tes questions et non y répondre qu’à moitié. Je sais que tout cela restera incompréhensible pour toi tant que cela restera inexprimable pour moi
Elle voulait le revoir en personne. Pendant plusieurs jours, elle attendit au coin des rues où il avait coutume de passer. Elle sentait simplement que s'imposait en elle le besoin de le revoir, ne fût-ce que de loin, de très loin, sans être remarquée, sans qu'il puisse même deviner qu'elle le voyait et qu'elle l'appelait de toutes ses forces
J’ai tout fait pour te voir. Je t’ai rencontré par un hasard “artificiel”. A plusieurs reprises, j’ai fait semblant de tomber sur toi par hasard alors qu’en fait j’attendais, à chaque fois, plus d’une heure quand tu apparaissais. Mon but premier était de voir sans être vue mais je me suis vite aperçue qu’à chaque fois j’étais vue sans jamais voir vraiment. Alors j’ai pensé que quitte à être repérée, autant l’être pour de bon et pouvoir à mon tour voir.Emotion inattendue quand je t’ai reconnu. Te voir n’a duré que quelques secondes. Non, une seule. Il y a des secondes qui sont vraiment intenses ; celle-ci en est la preuve. Et durant cette seconde-là, ce sont tous mes sentiments pour toi qui me sont revenus en pleine face avec toute la force qu’ils propulsent. Trop de choses se passent dans un si bref instant et c’est d’ailleurs pourquoi, je n’ai rien su contrôler. L’angoisse montait. Il y avait l’envie de bouger, de te dire : “C’est moi, je suis là, je t’aime tellement”, et au lieu de cela, m’est venue uniquement l’incapacité de respirer. Et au final, me reste l’image ineffaçable de ton visage devant mes yeux. Et c’est sans aucun doute le souvenir le plus précieux que je garde.Ils se rencontrèrent souvent au cours de cet hiver. Ce fut d'abord un hasard favorable [...]
Je t’ai récemment vu. Sans l’avoir cherché, je t’ai revu. Nous étions ensemble, au même moment, au même endroit et par un véritable hasard, une vraie coïncidence. Explosion interne instantanée quand mon regard s’est posé sur toi. J’étais submergée par l’émotion, la surprise, le bonheur de te voir, et bien entendu la peur précise que tu m’aperçoives. J’ai longtemps hésité à venir te voir mais pour minimiser les dégâts, éviter les dommages internes et tout débordement externe, j’ai préféré partir. C’est la première fois que le hasard nous réunissait, et je n’ai pas bougé. Le destin était en train de me faire un signe et j’ai gentiment ignoré son petit coup de pouce. Fuir c’est bien ; c’est lâche mais c’est nettement plus facile. J’ai évité le pire. C’est ce que je me dis pour légitimer mon immobilité, pour me rassurer et me persuader d’avoir réagi raisonnablement et le mieux possible. Je me raccroche à cette idée pour ne pas regretter… Pour ne pas regretter de n’avoir rien fait car je suis sans aucun doute passée à côté d’un grand moment, unique et sublime. Je vais d’immobilité en maladresses. Le destin s’est acharné : je t’ai revu, une fois encore par pure coïncidence. Mais le choc frontal était inévitable. Je t’ai vu, je t’ai reconnu immédiatement. J’ai baissé la tête en me demandant ce que je devais faire : aller te voir ou bien faire comme si je ne t’avais pas vu, pas reconnu. Après une fraction de seconde, j’ai décidé de lever la tête pour te regarder et t’admirer. Et oui, tu m’as reconnue et tu es venu me parler. Il n’y avait aucune issue, pas moyen cette fois-ci de m’enfuir. Prise au dépourvu, prise au piège. Rétrospectivement, je mesure l’étendue exacte de ma démesure et de mon ridicule. Je ne me suis pas jetée à ton cou. Je n’ai pas éclaté en sanglots. Loin de là. Je suis restée de marbre, glaciale et distante. J’étais pétrifiée et gênée. Je n’ai pas été capable d’affronter ton regard, ni te parler. J’acquiesçais à tes paroles. Je t’écoutais sans jamais lever la tête, sans jamais oser te regarder. Pourquoi ai-je réagi ainsi ? Parce que j’avais peur de ne pas me contrôler ? Ou tout simplement parce que je redoutais de défier ce regard voulu de toutes mes forces quelques mois auparavant, et qui était en train de me juger là, à cet instant précis ? Ou bien parce que je voulais maîtriser mon euphorie intérieure, cacher ma désintégration interne en adoptant une espèce de dureté?
... puis vinrent les rendez-vous.Parfois, quand je sens mon portable vibrer, je me rue sur lui car je sais que c’est toi. Je le souhaite et y crois si fort que cela ne peut être que toi. C’est indubitable ! La plupart du temps, je suis déçue. Lorsque je comprends que ce n’est pas toi qui essaies de me joindre, ma déception est au final aussi intense que mon espoir du début. Et c’est ainsi à chaque fois que mon portable vibre ou sonne. Et puis, même quand ni il ne sonne ou ne vibre, je crois l’entendre alors qu’il n’y a rien. C’est comme quand quelqu’un passe devant ma fenêtre, je crois toujours que c’est toi. Même quand c’est improbable, voire impossible, je crois tout de même t’apercevoir. C’est devenu une habitude désormais de rebaptiser chaque passant *******. Je vois toujours un *******passer mais ce n’est jamais toi. Le vrai, le seul, l’Unique. Une seule fois (sur environ plusieurs centaines), je ne me suis pas trompée. Je t’ai vu et me suis dit : “Oh *******!” et j’ai ensuite pris conscience que ce n’étaient pas des paroles en l’air. D’habitude, l’impression de t’entrevoir ne dure qu’une seconde, mais là c’était différent, l'effet a persisté puisque je ne cessais de répéter : “c’était vraiment lui !” jusqu’à ce que le retentissement de ma sonnette interrompe mon monologue. On sonnait à la porte et je savais précisément qui je trouverais derrière en l’ouvrant. Je savais que c’était toi.“Le visage que j’avais follement craint de ne jamais revoir se trouvait tourné vers moi.”, André Breton. Et ce n’était pas n’importe quel visage puisqu’il s’agissait du tien. Cette rencontre capitale n’était pas le résultat d’un de mes stratagèmes lamentables, minables, et forcément foireux, ni le fruit du hasard. Cette rencontre avait pour origine ta volonté d’être là. Je me moque des raisons qui t’ont poussé à venir. Même si ce n’était pas désintéressé, la force de l’émotion d’avoir enfin pu immobiliser mon regard sur toi est incommunicable. Cette rencontre “marque le point culminant de mon agitation intérieure” (André Breton).
Son impatience s'accrut au point que parfois elle envisageait de façon très timide et vague, il est vrai, de se rendre chez lui et de s'excuser pour sa conduite. Convaincue que tu avais mal interprété ma réaction, je n’ai rien trouvé de mieux que venir te présenter mes excuses, directement, en face. J’ai laissé ma peur, mes angoisses, et surtout ma dignité de côté ! Pour toi, “il n’y avait aucun souci” (citation de mon interlocuteur qui aurait mieux fait de me dire de m’en aller !), ce qui, visiblement, n’était pas mon cas. Ce n’était qu’un moment à passer... mais il était chargé d’une angoisse tellement intense. Je savais que tout basculerait dès que j’aurais décidé d’appuyer sur cette sonnette. Tout ne tenait plus qu’à ce petit geste si infime mais si déterminant. Rien n’avait alors, à ce moment-là, plus d’importance que ce qui m’attendait derrière cette porte. La question la plus cruciale de mon existence tenait en peu de mots : j’y vais ou non ? J’aurais peut-être dû prendre le temps de me poser la question au moins deux fois avant d’agir. Quand j’ai réalisé que je m’étais trompée de réponse, c’était trop tard... J’avais sonné ! Pire, on venait de m’ouvrir ! Grand moment de solitude... Grand moment de solitude qui s’est fortement développé au moment même où j’ai dû te donner une justification de ma présence. J’ai senti que je touchais le fond quand je me suis entendue te dire : “Je voudrais m’excuser...” A cet instant précis, plus rien ne pouvait me sauver de cette situation pathétique et grotesque dans laquelle je venais de plonger les yeux fermés, et quoi que je dise, j’étais de toute façon ridicule. Au-delà des excuses fragiles, d’une faible répartie, il y a l’image perpétuelle et définitive de ton visage que je garde en mémoire.
Les images défilaient de plus en plus vite, la ramenant à elle-même, chez elle, pour s'envoler de nouveau vers le passé, vers le jour où elle avait fait sa connaissance. Et bientôt elles firent éclater le cadre étroit du temps et de l'expérience vécue, devinrent de plus en plus extravagantes et confuses. C’est par bribes que ton visage me revient d’abord et puis soudain : plus rien, plus rien que ton visage. Penser à toi est le moyen idéal de cristallisation car une fois reconstituée intégralement, l’image que j’ai devant les yeux me fait accéder à un enchantement absolu. Je fais prolonger durablement ce bonheur tant attendu en visualisant indéfiniment ce visage tant adoré. Cet arrêt sur image est un luxe car je fais apparaître l’absent. Même si te voir ne relève que d’un mécanisme mental, virtuel et non réel, je profite, malgré tout, pleinement de cet instant auquel je retarde au maximum la fin. Si je parle peu, de manière définitoire et par conséquent définitive, de ce bonheur c’est que celui-ci ne se raconte pas. Ce sentiment convulsif, impalpable demeure inexprimable. Cette vision à vide est comme quelque chose qui reste en suspens et qui attend de manière fatidique une conclusion. L’acte même de l’imagination à la fois prolongée, discrète et néanmoins absorbante, suppose malheureusement une cessation brusque de ce moment, produite par un retour à la réalité. La réalité… c’est que tu n’es pas là. Le moment intermédiaire qui relie le présent à l’absent est une communion de fragments combinés mais non fondus de ce qui préexiste à ce que j’imagine –ton existence- mais qui ne demeure visible que dans l’imagination –ton image-. C’est pour ainsi dire un assemblage de deux mondes à la fois solidaires et séparés, qui allie un juste équilibre entre ta présence réelle, momentanée et l’image intemporelle que je garde de toi. Tu es toujours là où que j’aille et quoi que je fasse. J’aime cette omniprésence devenue spontanément primordiale. Je pense à toi tout le temps. Je ne t’effacerai jamais de ma mémoire, tu t’y enfonceras tout simplement car n’oublie pas que tu as été, tu es et tu continueras d’être mon plus beau souvenir.
Et l'amour qu'Erika éprouvait pour le jeune homme était lui aussi empreint de crainte et de soumission.
J’ai toujours refusé de montrer mes faiblesses et refusé de m’attacher à quiconque et d’en dépendre. Mais là, je suis en train de lâcher prise puisque face à toi, je ne réussis pas à montrer, ni à garder d’ailleurs, une once de force. Face à toi, je suis décontenancée. J’ai toujours passé un temps impensable à lutter contre des faiblesses que je pensais étouffées et qui sont en ce moment même en train de prendre le dessus. Je me suis laissée submerger par elles et je suis incapable de les surmonter. A cause de toi –ou grâce à toi- je faiblis et pire, je l’avoue… J’ai toujours tout fait pour résister à éprouver un simple et primaire attachement afin d’éviter toute douleur. Mais là, je crois que je craque : je suis carrément accroc alors que j’ai toujours clamé que je n’avais besoin de personne ; et toi, tu es venu mettre un sacré bordel dans ma vie et dans ma façon de voir les choses car s’il y a une personne dont j’ai absolument besoin, c’est bien toi. J’ai toujours été fière de cette liberté de ne me soumettre à personne. Mais là, ce n’est pas que je me soumets à toi… Non, je suis à genoux devant toi et je rampe à tes pieds, tu en as pleinement conscience et tu en profites largement. Tu sais très bien qu’il suffise que tu claques des doigts pour que j’accourre vers toi. Tu sais également que je ferais tout pour toi, que je serais prête à tout plaquer pour toi, pour te voir ou passer un moment avec toi. Je suis prête à tout.Je suis en train de faire tout ce que je m’étais formellement interdit, tout ce à quoi je m’étais promis de ne pas céder. Tout cela répond visiblement à ma volonté de faire tout dans l’absolu : soit je ne fais strictement rien, soit je fais tout dans le trop ou du moins dans le domaine de l’inimaginable. Pour toi, rien que je puisse faire ne saurait être trop car je considère que tout te donner n’est pas encore suffisant, et tout te donner n’est absolument pas le plafond du trop seulement le plancher.
Intuitivement, elle comprenait à quel point elle était sous son charme, à quel point il savait la dominer par la grâce de son art aux sonorités envoûtantes, porteuses de souffrance et de jubilation; elle se sentait désarmée [...]Au début, je croyais que cette adoration soudaine s’en irait aussi vite qu’elle était venue. Sur ce point, je m’étais totalement trompée. Non seulement, mes sentiments pour toi persistent mais aussi et surtout, deviennent de plus en plus forts. Et j’ai alors compris que j’étais en train de tomber raide dingue de celui qui a illuminé mes journées comme personne. Tout a pris rapidement de l’ampleur. En l’espace de quelques jours, tout a pris des proportions considérables. En quelques secondes, je me suis attachée à toi. En quelques jours, l’envie de t’entendre est vite devenue une nécessité. Au bout d’une semaine, je t’adorais. Le lendemain, j’étais amoureuse de toi. Et aujourd’hui au bout de deux mois et demi? C’est encore plus fort que ça.
Et son âme tourmentée s'abîmait dans cette souffrance étrangère pour perdre et oublier la sienne propre, mais parfois elle était prise d'un effroi mêlé de fierté.
Je voudrais être face à toi pour enfin tout te dire, pour que tu comprennes enfin. J’ai des choses à te dire, des remerciements à énumérer, des questions à te poser. Trop de questions… Beaucoup trop… Est-ce que tu m’en veux ? Est-ce que tu m’as oubliée ? Est-ce que tu me détestes ? Aurais-tu préféré que je ne te dise rien ? Qu’aurais-tu aimé que je fasse ? Qu’aurais-je dû dire ? Qu’a provoqué ce message dans lequel je te disais que je t’aimais plus fort que tout ? T’en souviens-tu ? Est-ce que j’ai tout gâché ? Est-ce que j’aurai la chance de te reparler ? A ma place qu’aurais-tu fait ? Quel est ton point de vue ? Tu trouves cela idiot ? Ridicule ? Absurde ? Stupide ? Inutile ? Est-ce que tu me détestes ? Est-ce que tu te rends compte que j’existe ? Est-ce qu’un jour tu comprendras ? Attends-tu des explications ? Est-ce que ma vision pessimiste des choses est erronée ou bien est-ce que je suis extrêmement lucide ? Comment ai-je pu en arriver là ?Je voudrais tellement te voir pourtant il s’avère que c’est ce que je redoute le plus. Je meurs d’envie de ce face-à-face mais en même temps c’est pour le moment ma plus grande crainte. Je veux la vérité mais je ne veux absolument pas être dans le vrai. Je suis allée trop loin sans être allée jusqu’au bout. Il me semble que tout est désormais trop tard bien que je n’aie abouti à rien. Je voudrais répondre à toutes tes questions mais dès que tu m’interroges, je les élude une à une. J’aimerais te dire tout ce que je ressens mais quand j’en ai la possibilité, j’évite le sujet. Je ne peux pas toujours t’envoyer ce qui est atténué car cela ne traduit pas exactement ni parfaitement ce que je ressens mais je n’ose pas t’avouer ce que j’ai sur le cœur.
Elle ressortit d'un tiroir caché sa photographie voilée par une mince pellicule de poussière et elle l'entoura d'une vénération singulière.Il suffit que je regarde les photos que j’ai de toi pour immédiatement cesser de t’en vouloir. Quand je te vois, je n’exprime même pas cette colère car j’en suis incapable. Toutes les photos de toi se voilent, je ne peux pas les regarder sans qu’elles s’embrument ; je ne peux pas les observer sans promener sur toi un regard embué. Je suis incapable de décrire cette immense émotion qui se produit à ta vue. Te voir me fait oublier tout ce qui est négatif. Je ne pense plus qu’à une seule chose : ton retour. Je ne veux qu’une seule chose : me retrouver avec toi. J’en ai marre, pas de toi, non, mais de ne plus te voir. Ce n’est pas toi que je ne supporte plus, c’est de ne plus t’avoir.En elle frémissait alors une nostalgie, un besoin de tendresse, l'espoir d'entendre murmurer de doux mots, qu'elle redoutait en réalité. Il faut que je dissémine aux abords d’une esquisse de conversation, des bribes de déclarations. Nos échanges sont rares. Je n’ose pas faire le premier pas et toi, tu manques d’envie de le faire car tu te fous de ma présence. Il faut que je poursuive en petits messages instantanés, ce long message déclinable, qui s’allonge, se prolonge ; et même s’il peut apparaître décousu, il ne sera en réalité que le déroulement du fil principal de ma sphère sentimentalo-émotionnelle. Tu es ma raison d’avoir été heureuse et d’être tout court ; tu resteras ma raison de devenir. C’est pourquoi j’ai besoin de croire inlassablement que tu vas revenirHors ligne, en ligne ou connecté absent, j’ignore lequel de tes statuts me fait le plus de mal ou de bien. Je m’agite quand tu n’es pas là ou absent mais je ne tiens pas lorsque je te vois connecté sans sollicitation de ta part. Les heures passent sans qu’à un moment tu décides de faire la démarche de faire le premier pas vers moi. Et ce, depuis des mois déjà ! Mais j’espère toujours. Ta déconnexion sans conversation entamée aboutit à mes désillusions. C’est une torture permanente faite d’espoirs déçus et d’illusions déchues.
Ainsi cette soirée se transforma pour son âme avide et inquiète en une fête pure et intense. Une seule question la tourmentait. Ne l'avait-il pas oubliée?
Ce qui est exténuant, c’est ce cercle vicieux dans lequel je plonge infiniment. Chaque retour à la réalité -aussi rude soit-il- ne trouve sa parade que dans la fuite vers une perspective moins sombre. Chaque désillusion est régénérée en espoir. Je parcours le monde des possibles, je les pose dans un univers conceptuel hypothétiquement réalisable. L’espoir de ne pas avoir été anéantie dans ta mémoire, l’espérance de te revoir enfin. Espérer t’avoir manquée. Espérer entendre ces mots qui viendraient apaiser mon esprit torturé. T’attendre encore et toujours jusqu’à ce que la réalité annihile un à un mes probables et mes possibles ; et puis : c’est la chute libre dans une désillusion innommable. Jamais je n’avais autant vu Sisyphe dans mon miroir.
Les jours suivants ne furent qu'expectative et angoisse. Erika attendait en secret une lettre, un signe tracé de sa main; elle aurait même aimé qu'il lui écrive des lignes pleines de reproches, dures, impitoyables, des mots chargés de colère. Ou alors elle imaginait une lettre remplie des mots tendres, compréhensifs, qui iraient droit à son âme et la ramèneraient dans la ronde des heures heureuses qu'elle avait quittée.Et ce mail… Ce mail que je t’ai envoyé pour riposter. Soit, tu vas t’en foutre royalement en disant : « c’est trop tard. Je me contrefous de tes sentiments et de toi par la même occasion ». Soit tu le prendras dans le sens le plus positif, et tu me rassureras. Et là autant dire que ce sera le remède miracle pour me ramener à la vie, à l’espoir. Verdict dans deux jours : j’ai peur. Pas de réponse au mail. Néant total. Je t'avais dit : "STP pas de réponse. Pas de réponse qui viendrait foutre en l’air mes espoirs qui me font tenir." Et surtout pas de réponse, car je préfère me dire que tu ne réponds pas parce que je te l’ai demandé plutôt que voir que tu ne veux pas me répondre parce que tu n’as pas envie de me parler. Je n’ai pas envie de me tordre dans tous les sens en attendant une réponse qui ne viendra pas. Je te demandais certes de ne pas me répondre en espérant au fond de moi une réponse qui viendrait apaiser mon esprit tourmenté, qui viendrait me consoler. Qui sait ? Il n'y avait plus en elle que du silence, un silence morne, absolu, le calme de la mort. Car en l'espace d'un seul instant, beaucoup de choses s'étaient éteintes en elle.J’espère ce qui n’arrivera pas et j’attends celui qui ne viendra plus. Je garderai tout ce qui te concerne comme le bien le plus précieux que j’ai -même si ce n’est pas palpable, c’est intensément gravé. J’essaie de viser avec mes mots une personne qui m’a échappé et que je ne retrouverai plus. Je cherche n’importe quel prétexte pour y croire encore ; Je ne veux pas remédier à l’espérance de vivre ta présence pourtant je sais c’est une quête à vide car je t’ai perdu à tout jamais. J’essaie d’atteindre l’absent qui ne rentrera jamais. J’écris à quelqu’un qui ne me lira pas. Je passe mon temps à attendre inlassablement l’accomplissement de l’irréalisable. Alors que la réalité est simple à comprendre mais si difficile à accepter : tu es parti, tu ne reviendras pas, tu ne reviendras jamais.Je ne crois plus en rien mais je m’accroche à des petits riens, des espoirs sans doute vains. Mais il semblerait que je chercherais n’importe quelles prémices de miracle pour ne pas admettre que je viens de toucher le fond. Ce qui me retient ici-bas, c’est de savoir que tu vis, que tu existes quelque part. L’après toi est plus que difficile. Je ne suis toujours pas remise de ton départ. Je ne réussis pas à mettre des mots sur cette douleur qui me ronge à l’intérieur. Ecrire peut me soulager mais c’est à double tranchant : parler de toi sans toi c’est ressasser tout ce qui fait mal. Et cela finit toujours de la même manière : la tête dans mes mains lacrymalisées et rimmellisées.
Puisque tu pars, Goldman. ça de Zazie
ça part en vrille cet article... Publié ou gardé éternellement comme brouillon?! L'avenir répondra assez rapidement à cette question...