J’approuve l’adage qui dit que lorsque l’on vit en région éloignée du lac Saint-Jean, celui-ci ne nous quitte pas. Son magnétisme ensorcelle. Sa présence nous procure un sentiment de plénitude dans ce monde qui file à toute allure et qui essouffle. Ce lac me donne envie de respirer profondément et m’inspire. Il vient chercher en moi mes émotions et m’aide à les transposer à travers récits et aquarelles. Quand je crée, je recherche cette pureté, cette transparence que reflète l’eau.
En ce dernier jour de juillet, alors que l’ondée sur les rives s’évapore, je me trouve face à lui. Je remarque que ma silhouette miroite dans le bleu rêveur de ses eaux. Je m’y baigne tranquillement en avançant sur la pointe des pieds, mon corps frémit. Encore une fois, j’ai l’impression que je ne me lasserai jamais de l’admirer. Son visage doux m’apaise. Je le connais assez pour affirmer que son humeur est changeante et l’accepte tel qu’il est, je l’aime. Les jours d’orage, il s’impatiente. Ses expressions faciales changent du tout au tout. Du bleu céruléen il devient indigo, et des vagues creusent la surface de son profil. Enfin, quand revient l’accalmie, il s’avère très accueillant. Les plus courageux, les meilleurs nageurs de l’humanité osent s’y mouiller, peu importe les conditions climatiques, et participent à la Traversée internationale du lac Saint-Jean.
Le 23 juillet 1955 s’effectua la première traversée du lac Saint-Jean. C’est M. Jacques Amyot, un nageur en provenance de la ville de Québec qui compléta le parcours. La traversée a lieu annuellement depuis cette date mémorable. Cette épreuve de nage en eau libre d’une distance de trente-deux kilomètres est réputée être l’une des épreuves sportives les plus difficiles au monde. Le départ s’effectue du village de Péribonka et relie ce dernier à la ville de Roberval.
Chaque nageur est accompagné de son entraîneur et de son guide qui prennent place dans une chaloupe. Ce dernier doit connaître parfaitement la trajectoire. Le vent et ses caprices créent des vagues parfois impressionnantes. Il lui faut connaître les courants marins et il doit suggérer des stratégies adéquates au nageur.
C’est sous les acclamations de joie des spectateurs que les nageurs franchissent la ligne d’arrivée. Les festivités prennent place. Le boulevard Saint-Joseph, fermé à la circulation automobile, se métamorphose en une tablée qui reçoit des milliers de convives le temps d’un souper. La traditionnelle tourtière du Lac est à l’honneur. Quant à son parfum de viande mijotée et de pommes de terre… il envoute les visiteurs !
La Traversée internationale du lac Saint-Jean était à la base un exploit que tous croyaient irréalisable… Le défi fut relevé et le sera encore !
Virginie Tanguay