Les travaux de cette équipe de L’Université de Chicago montrent l’ampleur de l’impact de la solitude sur la santé. Un facteur de risque décrit comme majeur pour leur santé, comparable à celui d’un statut socio-économique défavorisé et deux fois plus critique que l’obésité. Un facteur qui va accroître le risque de décès prématuré de 19% chez les plus âgés. Plusieurs études, présentées à la Réunion annuelle de l’AAAS, l’Association américaine pour l’avancement des Sciences, montrent que le sentiment d’isolement va perturber le sommeil, augmenter la pression artérielle, augmenter les niveaux de cortisol, de stress et de dépression, réduire l’immunité et le bien-être perçu.
Les relations sociales favorisent un vieillissement réussi, explique le Pr Cacioppo, professeur de psychologie à l’Université de Chicago et expert reconnu sur les effets de la solitude. Il plaide pour un maintien, en fin de vie, à proximité de la famille, des amis ou des anciens collègues de travail. « Partir finir ses vieux jours au soleil, loin des siens, n’est pas forcément une bonne solution. Les personnes d’âge mûr doivent réfléchir à la façon de se protéger contre la dépression, de protéger leur bien-être et… de prévenir le décès précoce ».
Chez les personnes âgées, les chercheurs ont relevé des différences spectaculaires dans les taux de déclin de la santé physique et mentale au fur et à mesure du vieillissement. Au nombre des facteurs, les relations sociales qui, lorsqu’elles sont suffisantes et satisfaisantes permettent d’améliorer la résilience, la capacité à rebondir en cas d’adversité et de trouver une qualité de vie en dépit des contraintes.
· 3 dimensions essentielles à des relations aux autres réussies :
- Avoir quelqu’un d’intime dans sa vie qui vous accepte et vous apprécie comme vous êtes,
- Avoir des relations sociales mutuellement enrichissantes et gratifiantes,
- Faire partie d’une communauté qui donne le sentiment d’appartenir à un groupe et d’avoir une existence « collective » au-delà d’individuelle.
Ce n’est pas la solitude physique elle-même, mais le sentiment subjectif d’isolement qui peut être si profondément perturbateur. Ainsi, la cécité et la perte d’audition chez des personnes pourtant bien entourées entraînent un risque bien particulier de solitude.
L’isolement modifie fondamentalement le cerveau : Lors d’une autre présentation, Robert King, un ancien prisonnier détenu à l’isolement -c’est-à-dire seul, dans l’obscurité, dans une petite cellule et 23 heures par jour-, et cela depuis 29 ans en Angola dans la prison d’État, décrit comment son expérience a déformé de façon permanente sa vue et son sens de l’orientation.L’isolement semble modifier fondamentalement le cerveau et provoquer de nombreux effets psychologiques et physiques, confirment les chercheurs, dont Craig Haney, professeur de psychologie à l’Université de Californie à Santa Cruz. Le chercheur évoque des troubles de l’identité et la paranoïa, l’automutilation, l’hypersensibilité au son, à la lumière et au toucher et un dysfonctionnement cognitif sévère.
· Connexions sociales et connexions neuronales : Une grande partie de ce que nous sommes dépend de nos relations avec les autres et lorsque disparaissent ces relations, c’est la perte d’autonomie. Le manque d’interaction physique avec le monde, d’interaction sociale et de contact et de stimulation visuelle, un seul de ces éléments suffit à changer radicalement le cerveau et notamment la manière dont les neurones communiquent les uns avec les autres.
Quel que soit l’âge ou la situation, se sentir relié à d’autres personnes est essentiel pour le bien-être mental comme pour la santé physique. Le sentiment de rejet ou d’isolement perturbe non seulement les capacités cognitives, la volonté et la persévérance, mais aussi les processus cellulaires clés du corps humain. John Cacioppo montre que la solitude est aussi associée,
· à une moindre fluidité de l’écoulement du sang à travers le système cardio-vasculaire,
· à des hausses, au matin, plus élevées dans les niveaux l’hormone du stress, le cortisol,
· à l’expression altérée de certains gènes dans les cellules immunitaires et à un appauvrissement de la fonction immunitaire,
· à une pression artérielle plus élevée,
· à un niveau accru de dépression,
· à la difficulté à atteindre un sommeil profond,
· à une progression plus rapide de la maladie d’Alzheimer.
Ces conclusions sont issues de l’imagerie fonctionnelle par résonance magnétique (IRMf).
Inviter les autres à sa table ? Le problème de l’isolement social va croître alors que les structures sociales traditionnelles s’estompent et le nombre d’enfants par foyer diminue. Les sociologues constatent déjà une diminution des relations intimes par rapport aux précédentes générations. Cette étude de John Cacioppo montre comment la solitude renforce l’anxiété sociale, la peur et autres sentiments négatifs. Il faut donc « surmonter la peur et trouver des moyens de se reconnecter », conclut le chercheur, » redécouvrir ces sensations physiologiques positives qu’on éprouve dans les moments de contact humain les plus simples. Les personnes seules ont comme une faim, la clé est de comprendre que la solution ne réside pas dans un bon repas, mais est en cuisine, pour préparer et partager un repas avec les autres ».
Sources: AAAS
Science of Resilient Aging Loneliness undermines health as well as mental well-being
Solitary Confinement Fundamentally Alters the Brain, Scientists Say
University of Chicago Loneliness undermines health as well as mental well-being
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