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Saut à la perche : le tsar Bubka est tombé

Publié le 16 février 2014 par Copeau @Contrepoints

Par Alexandre C.

Renaud Lavillenie à Göteborg (Crédits : Giåm, licence Creative Commons)

Renaud Lavillenie à Göteborg l’an dernier.

Stade de Donetsk en Ukraine, hier, 17h39, heure de Paris, un symbole vient de tomber. Un record du monde aussi, celui de Sergueï Bubka, l’un des plus grands perchistes de l’histoire, grand dominateur de sa discipline dans les années 80 et 90. Sa marque, 6,15 m, vient d’être effacée. Presque 21 ans jour pour jour après avoir avoir été établie – Bubka avait établi ce record le 21 février 1993. Le Tsar, comme il est surnommé, est tombé de sa statue. Pas celle qui trône devant le stade de Donetsk, mais celle des tablettes de l’athlétisme mondial. Et pour que la boucle soit bouclée, il faut ajouter que c’est dans ce stade que Bubka s’entraînait sous le regard bienveillant de Vitaly Petrov, sur un vieux sautoir.

Le responsable de ce crime de lèse-majesté ? Le sauteur français Renaud Lavillenie, champion olympique aux derniers Jeux de Londres, qui depuis 2009 agite la discipline et impose sa marque sur tous les concours de la planète. Et Bubka, c’est un palmarès hors normes. En près de vingt années de carrière, il a remporté une médaille d’or olympique en 1988 à Séoul, six titres de champion du monde en plein air, entre 1983 et 1997, et battu trente-cinq records du monde, que ce soit en plein air ou en salle – à noter que l’Ukrainien possède encore le record du monde en plein air, établi en juillet 1994, avec 6.14 m. À l’époque, le Soviétique battait le record du monde centimètre par centimètre afin de toucher la prime correspondante. La raison de cela est que le régime communiste lui prenait – tout du moins en début de carrière – l’argent qu’il percevait lors des concours. Pour éviter la spoliation, il a ouvert des comptes à l’étranger et engrangeait de l’argent à chaque record du monde.

Depuis quelques années déjà, le maître lui prédisait le meilleur. Lavillenie pouvait le détrôner, aller plus haut que lui. Et c’était un compliment que Bubka s’était bien gardé de faire avant, à l’époque où d’autres perchistes s’échinaient à passer avec quelques difficultés la hauteur fatidique de 6 m. Lavillenie, lui, a banalisé cette marque comme Bubka le faisait avant lui, insolent de facilité.

Depuis les championnats d’Europe par équipe de Leiria en 2009[1. À cette occasion, le Français avait passé pour la première fois les 6 m avec une marque à 6,01 m.], il tentait, dès que cela était possible, de battre l’ogre Bubka, mesurant à chaque fois les progrès qu’il avait faits et les efforts qui lui restaient à produire. En janvier dernier, il avait surpris son monde en établissant 6,08 m et échouant de peu dans sa tentative sur le record du monde. Il touchait enfin du doigt le rêve, atteignant des sommets jusqu’alors considérés comme inaccessibles par ceux qui voyaient la marque de Bubka rester encore des années voire des décennies en tête des bilans de l’athlétisme.

Présent dans la salle, Bubka s’est réjoui de ce succès, souhaitant à Lavillenie d’aller encore plus haut. Chose que le Français s’apprêtait à faire en essayant de passer 6,21 m – excusez du peu – avant qu’une perche brisée l’en empêche. Ce n’est, très certainement, que partie remise, tant il avait de la marge lors de sa tentative réussie à 6,16 m. Rendez-vous donc début mars à Sopot, aux championnats du monde en salle, où il défendra son titre et aura certainement à cœur d’aller encore plus haut. Avant, qui sait, d’aller défier la marque du roi Bubka en plein air, dès les premières lueurs du printemps.


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