Stockées non pas dans des bibliothèques mais dans des carothèques, les carottes se lisent différemment selon le matériau dans lequel elles ont été prélevées. On ne lit pas de la même manière un roman policier, le programme télé ou la Critique de la raison pure…
Sédiments lacustres : les varves
à droite : varves déposées dans Canoe Brook, Dummerston, dans le Vermont (Etats-Unis) (crédit photo)
En hiver, le lac est généralement couvert de glace : la couche de sédiments foncée se formera dans un milieu dépourvu d’oxygène (anoxique). En été, des tas de particules viennent se déposer sur la surface du lac puis précipitent au fond, conférant à la strate estivale une couleur claire. Parmi les particules emprisonnées dans le sédiment figurent en grandes quantités des poussières et du pollen, à partir duquel on peut retrouver les espèces végétales présentes à une époque donnée. Une telle démarche permet de reconstituer le climat passé (Plus de 13 000 ans en arrière) ou encore de dater des grandes perturbations comme les incendies, ces événements entraînant des successions de végétation particulières.
Sédiments de lit de rivière
ci-dessus : portion d’une carotte sédimentaire. On peut y lire qu’une période de calme relatif a été suivie par une période où le débit a brusquement augmenté (limon en bas puis sable en haut)
Carottes de glace
Ces carottes-là permettent de reconstituer le climat passé (jusqu’à 800 000 ans pour la plus grande carotte jamais prélevée !). Changement d’échelle pour l’interprétation.
On appelle « isotopes » des atomes dont les noyaux ont la même charge (même nombre de protons) mais un nombre de neutrons différent. Par exemple, le 12C de tous les jours (le plus abondant sur Terre) a deux isotopes « lourds », le 13C et le fameux 14C. Nos carottes de glace font intervenir deux isotopes de l’oxygène : 16O le plus abondant, et 18O assez rare (qui possèdent tous les deux 8 protons, et respectivement 8 ou 10 neutrons). Ces deux frères atomiques ont les mêmes bandes de copains, c’est-à-dire qu’ils sont engagés dans les mêmes molécules. Ici justement, leurs copains sont des hydrogènes : les voilà devenus H2O. Malgré leurs similitudes, l’isotope lourd 18O (légèrement enrobé, pardon) aura un comportement différent de son frangin 16O svelte et athlétique.
Et voilà, maintenant vous savez que les carottes ne sont pas uniquement pleines de vitamines, elles permettent aussi de retracer le débit d’un cours d’eau, les types de végétation autour d’un lac, le climat ou encore la composition de l’atmosphère sur plusieurs millénaires !
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Sources :
Vostok, célèbre site de carottage en Antarctique : http://www.cnrs.fr/cw/dossiers/dosclim1/rechfran/4theme/paleo/vostok.html
Delta 18O : http://tristan.ferroir.free.fr/index.php/2012/01/18/ce-quil-faut-comprendre-et-retenir-du-delta-18-o-en-tant-quindicateur-paleoclimatique/ et http://planet-terre.ens-lyon.fr/article/temperature-des-glaces.xml et https://sites.google.com/site/bantegnies/chap-1-theme-1-les-changements-du-climat-au-cours-des-700000-dernieres-annees
Varves : http://paleolithique.free.fr/ et Wikipédia
Sédiments de rivière :
- C. Vella, maître de conférences
- Bruneton H., Arnaud-Fassetta G., Provansal M., Sistach D., 2001. Geomorphological evidence for fluvial change during the Roman period in the lower Rhone valley, Catena (Elsevier)
- Ollive V., Petit C., Garcia J.-P., Reddé M., 2006. Rhine flood deposits recorded in the gallo-roman site of Oedenburg (Haut-Rhin, France), Science Direct (Elsevier)