Braquez un flingue sous le nez de quelqu’un et vous aurez plus de chance d’en obtenir ce que vous voulez. Chez certains candidats aux municipales ça marche de la même manière.
Le thème de la sécurité, bon vieux fond de commerce électoral à droite et au FN, a refait son apparition à l’occasion de la campagne pour les municipales. Chacun y va de son couplet pour convaincre les électeurs de la nécessité de faire prêter sermon à un nouveau shérif pour nettoyer la ville. On accuse le premier magistrat de la ville de laxisme et d’incompétence, on le tient même pour responsable de l’invasion des herbes folles dans le jardin d’une résidence (Joëlle Melin, candidate FN, lors d’une visite dans un quartier d’Aubagne, à court d’arguments, dépitée de découvrir un endroit épargné par la délinquance). Exploiter la peur, la faire monter en sauce à l’approche d’échéances électorales, est devenue le sport favori d’une droite à l’affût du moindre fait divers pour vider son chargeur. La sécurité serait, assure-t-elle, la principale préoccupation des Français. Elle est beaucoup moins diserte sur cette autre sentiment d’insécurité qui taraude la société : la peur du déclassement. L’incertitude face à l’avenir, le mal-logement, le pouvoir d’achat en berne et les factures qui s’amoncellent sont pourtant des facteurs anxiogènes quotidiens et particulièrement pénibles pour une partie de plus en plus importante de la population.
Le sentiment d’insécurité est un mille feuilles
Les Français sont de plus en plus sensibles aux inégalités sociales comme le révèle une étude récente de la Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Drees) publiée le 5 février. En 2011, selon l’Insee, 8,7 millions de personnes vivaient en France sous le seuil de pauvreté, soit avec moins de 977 euros par mois. Le sentiment d’insécurité est un mille feuilles, un conglomérat de sentiments diffus fait de désespoir et d’inquiétude mêlés, d’un sentiment d’abandon et du constat d’incapacité de la classe politique à apporter des solutions. Il se nourrit de cette appauvrissement de la population et en particulier de celui des classes moyennes jusqu’alors épargnées. Une inquiétude que les vendeurs de charmes préfèrent ignorer dans leur quête du pouvoir. Pour le philosophe André Tosel, professeur émérite à l’université de Nice-Sophia Antipolis, le tour de force consiste à faire oublier d’où viennent tous les processus qui insécurisent réellement la vie des gens comme le chômage, la baisse des retraites, la fragilisation de la vie affective individuelle et familiale, la dégradation de la protection sociale, la soumission accrue à l’esclavage de la dette et de l’endettement engendrés par le mode de consommation devenu indispensable au mode de production capitaliste, bref, tout ce qui fait l’actualité sociale.
Rien ne saurait remplacer la présence policière
Dans cette démarche stratégique de conquête visant à faire oublier les politiques austéritaires qui ont mené le pays au bord du gouffre, la droite UMP-UDI veut réaliser aujourd’hui un autre tour de force : masquer son bilan lorsqu’elle était aux affaires et avait en charge la sécurité des Français. Entre 2007 et 2012, les effectifs cumulés de la police et de la gendarmerie ont baissé de 12 469 postes. Un chiffre incontestable puisqu’il émane des documents « projets annuels de performance » annexés au projet de loi de finances. La Réforme Générale des Politiques Publiques (RGPP) adoptée par la droite au pouvoir (1) et qui visait à économiser 15 milliards sur le budget de l’État sur la période de 2007 à 2013, par le biais entre autres du non-remplacement d’un fonctionnaire sur deux partant à la retraite, a eu des effets dévastateurs sur le fonctionnement des services de police et de gendarmerie. Cette diminution des effectifs et des moyens a été dénoncée par les syndicats de policiers et, fait rare, ces derniers sont descendus dans la rue en 2010 à l’appel de l’Union SGP-FO/Unité police, premier syndicat de gardiens de la paix pour crier leur « ras-le-bol » face à la « politique du chiffre », aux « quotas de contraventions » et aux « effectifs en baisse ».
Une situation également dénoncée par les élus locaux dont le premier magistrat d’Aubagne, Daniel Fontaine, qui n’a eu de cesse d’alerter les autorités publiques sur cette érosion d’un service public pourtant essentiel pour la population. Rien ne saurait en effet remplacer la présence policière pour assurer la sécurité de tous les citoyens. Un rapport de la Cour des Comptes publié le 7 juillet 2011 sur « l’organisation et la gestion des forces de sécurité publique » remet sévèrement en cause la politique menée pendant dix ans par l’UMP au pouvoir. Mauvaise répartition des effectifs sur le territoire, forte réduction des effectifs, statistiques en trompe-l’œil, recours à la vidéosurveillance couteux et sans grand résultat, désengagement de l’Etat au profit des polices municipales et au mépris de l’égalité entre les Français… la Cour des comptes a emboîté le pas à d’autres élus locaux qui exigent que l’État assure sa mission régalienne : « Le recours croissant à la vidéo-surveillance de la voie publique ne peut se substituer à l’action des forces de sécurité étatiques » écrivait-elle.
(1) La Révision Générale des Politiques Publiques est annoncée par une communication en conseil des ministres, le 20 juin 2007, et officiellement lancée le 10 juillet 2007.
(2) Enquête menée à partir d’un échantillon de 52 villes d’Ile-de-France, Rhône-Alpes et PACA auprès des préfectures, des services chargés de la sécurité publique, de la gendarmerie et des procureurs
Un nouveau commissariat pour Aubagne ?
Le maire, Daniel Fontaine, a proposé le 12 décembre 2013, un terrain pour la construction d’un nouveau commissariat en lieu et place de celui de l’avenue Jeanne-d’Arc particulièrement vétuste et parfaitement inadapté à l’accueil du public. Il s’agit du site de l’ancienne station service Shell, situé avenue de Verdun au niveau de la résidence « Le Général ». La Ville en a fait la proposition au cours d’une réunion avec la Préfecture de Police. La balle est dans le camp du ministère de l’Intérieur. Le terrain est actuellement la propriété de l’EPF Paca (établissement public foncier) qui s’occupe de la dépollution du site.