La nouvelle est tombée cette semaine de la bouche même du Ministre du Tourisme, Le Maroc a accueilli 10.046.000 Touristes durant l’Année 2013. On serait tenté de dire enfin, mais attendons d’avoir le détail exact de ces arrivées avant de nous réjouir.
Toujours est il que la HCP confirme un raffermissement des arrivées et des nuitées en 2013, et une stagnation des recettes voyages considérant le – 0,5 % comme tel. Or, si l’on considére l’augmentation de 7% en terme d’arrivées, ce chiffre des recettes devient alarmant. En clair, nous avons plus de clients mais nous encaissons moins. Est ce parce que nous vendons moins cher, ou nous ne vendons pas assez?
Essayons alors de comprendre le pourquoi de cette situation?
En premier lieu, tout le monde s’accorde sur le fait que le mode de distribution a changé. En effet, la majorité des nuitées sont aujourd’hui réalisées à travers la vente online par l’intermédiaire des OTA ( Online Travel Agencies). Ces OTA offrent aux internautes des tarifs basés sur le BAR ( Best Available Rate) et les hôteliers mis en concurrence sur ces sites revoient régulièrement leurs tarifs à la baisse pour attirer plus de clients.
De plus, ce type de distribution coute cher, commissionnés en moyenne à 25% et en devises, c’est autant de recettes en moins pour la destination. Pour rappel, les réceptifs assuraient une distribution à moins de 15%, laquelle commission restait au Maroc et servait à soutenir les emplois, à maintenir l’investissement et à développer les produits.
De plus, la prestation touristique se résume uniquement à de l’hébergement en BB, ce qui veut dire que les clients se débrouillent pour assurer leurs transferts, restauration, excursions et autres loisirs qui constituaient autrefois le package. Toutes ses prestations annexes ne sont plus comptabilisées aujourd’hui au niveau des recettes, et pour cause: elles sont assurées par le secteur informel, payées en espèces et s’évaporent dans la nature.
Le lowcost, a également sa part dans ce dérèglement, les touristes de plus en plus nombreux qui profitent des bas tarifs pour voyager, ont de moins en moins tendance à avoir recours a de l’hébergement classé, ils privilégient les appartements, maisons, villas et autres lieux qui foisonnent en toute illégalité encaissant au noir, employant au noir et ne déclarant pas grand chose.
Les TO n’arrivent plus à assurer une offre diversifiée en matière de produits, et nous remarquons un net recul des circuits qui faisaient la promotion des villes impériales et du Grand Sud Marocain. Des régions complètement désertées aujourd’hui avec des unités d’hébergement en état d’abandon. Ouarzazate est aujourd’hui un cas d’école, mais il en est de même à Erfoud, Errachidia, Zagora, Kellaa des Mgouna , Midelt ….. la liste est longue et lorsqu’on calcule le manque à gagner dans les circuits, on comprend mieux cette baisse des recettes.
Pour ce qui est du MICE, nous sommes très loin des chiffres que nous réalisions jusqu’en 2008. La plus part des congrès organisés depuis sont de l’initiative de l’Etat et non plus des professionnels, ces grands événements sont en grande partie financés par le Maroc, donc leur impact en matière de recettes est parfaitement marginal, en devises bien sûr.
Les réceptifs ont vu ainsi leur marges de manœuvres se réduire d’année en année, suite à la crise et aux restrictions budgétaires qui ne permettent plus aux entreprises européennes de tenir leurs événements en dehors des pays de la CEE.
Parmi les dégâts collatéraux , il faut ajouter l’artisanat qui profitait du flux de touristes drainés par les agences de voyages réceptives et les guides dans le cadre des circuits et des excursions. Les bazaristes sont en train de manger leur pain noir après avoir engrangés des bénéfices dans les années 80, 90 et même 2000.
Sans parler de la multitude de restaurants étapes dans toutes les bourgades traversées par les autocars de touristes qui avaient noué des relations commerciales avec les agences de voyages.
Tous ces intervenants petits et grands sont aujourd’hui mis en dehors de l’équation tourisme et ce sont leurs recettes qui font défaut, ajoutés au bradage stimulé par les comparateurs. Si c’est le prix pour atteindre les 10 millions de touristes, avec un taux de remplissage moyen de 43% et une durée moyenne de séjour inférieure à 4 nuits, je trouve pour ma part que c’est chèrement payé.
Monsieur le Ministre, vous avez récemment dit, que nous ne devrions pas nous focaliser sur le nombre des arrivées et des nuitées, mais plus nous soucier de nos recettes qui s’effritent. Ce qui démontre que vous êtes conscient de la gravité de la situation surtout après l’alarme lancée par l’office des changes. Nos réserves en devises s’amenuisent et notre balance commerciale en prend un sacré coup. Vous nous aviez promis à Mazagan de faire les « Les états généraux » du Tourisme, faites en une résolution et passons aux actes.