Kees van Dongen (1877-1968), Ba-rah, Persian Dancer
***Né en 1957 dans la vallée du Nil, Alaa El Aswany exerce le métier de dentiste au Caire,en parallèle d'une carrière de chroniqueur et de romancier traduit dans le monde entier. Après le célèbre Immeuble Yacoubian, porté à l'écran par Marwan Hamed, paru en 2006, Actes Sud a publié Chicago (2007), J'aurais voulu être égyptien (2009) et Chroniques de la révolution égyptienne (2011). Actes Sud
Kees van Dongen (1877-1968), Café with two women and one man
ExtraitL’affaire avait commencé deux ans plus tôt, au cours de la soirée que l’Automobile Club organisait tous les ans à l’occasion de la nouvelle année. Assistaient à la réception le haut-commissaire britannique, les ambassadeurs étrangers, les ministres ainsi que de hautes personnalités et des princes de la famille royale. Tout à coup, vers une heure du matin, Sa Majesté le roi fit aux invités l’honneur de la surprise de son éminente présence. Il souhaita une bonne année à l’assistance puis prit sa place autour du tapis vert et se mit à jouer aux cartes jusqu'au matin. Comme d’habitude, tant pour les hommes que pour les femmes, la fête reflétait les dernières tendances de la mode : fourrures, robes de soirée, smokings, c’était un vrai concours d’élégance. Une invitée attira l’attention de Mr Wright. C’était une femme dans la quarantaine, mince, claire de peau, les cheveux fins d’un brun anthracite coiffés à la garçonne. Elle fumait sans arrêt et portait une simple robe bleue qui n’était pas du tout à la hauteur de l’événement. Wright se mit à l’observer avec étonnement. Il se demandait comment cette femme osait venir à une soirée de ce niveau avec une robe qui, au plus, aurait pu convenir pour aller prendre le thé. Le plus étonnant était qu’elle parlait et riait avec les invités d’une manière, comme si elle ne se rendait pas compte de l’anomalie de son apparence. La curiosité de Mr Wright redoublait et finalement il interrogea Chaker, le maître d’hôtel : - Qui peut bien être cette femme avec sa robe bleue ? Le maître d’hôtel s’inclina : - C’est Mme Odette Fattal, Monsieur. - Est-elle une parente de M. Henri Fattal ? - C’est sa fille, Monsieur. Cela rendait la chose encore plus incompréhensible. Le millionnaire Henri Fattal était un des plus grands marchands de coton d'Égypte. Pourquoi sa fille apparaissait-elle sous cet aspect misérable ? N’importe quelle secrétaire de son père portait à n’en pas douter de plus beaux vêtements. Qu’est-ce que cela voulait dire, et pourquoi les personnes présentes semblaient accepter sans problème la présence parmi elles de ce lapin sauvage ? Wright ne fut pas capable de dominer plus longtemps sa curiosité. Il demanda un verre qu’il avala d’une seule traite, puis, mettant fin à son hésitation, s’avança vers la femme. Traduit de l'arabe (Égypte) par Gilles Gauthier
Kees van Dongen (1877-1968), Nil