L'UMP cherche le bon moment pour supprimer les départements

Publié le 13 mai 2008 par Olive
Souvenons-nous, le 23 février, Jacques Attali rendait en fanfare un rapport où il envisageait, entre autres, la suppression des départements. Tollé à droite, cris et chuchotements ici et là, le Président trancha en saluant la qualité du rapport mais en écartant la mesure.
Début mai, tout semble avoir changé: Jean-François Copé, dont le groupe UMP au Parlement s'est approprié le rapport, remet le couvert à propos de la rationalisation des niveaux de collectivités locales.
Et pourtant, surprise, on n'observe pas de levée de boucliers, très peu de diatribes enflammées, tout juste quelques prurits à propos d'une question, somme toute éloignée et périphérique: la suppression des numéros de département sur les futures plaques d'immatriculation.
Que penser, alors que nous sommes un certain nombre à avoir exprimé des arguments, fondés intellectuellement ou scientifiquement, face à l'absurdité technocratique et l'erreur socio-économique que représenterait cette réforme? Il y a fort à parier que la réponse tienne dans une notion: la conjoncture.
D'abord, nous ne sommes plus en période électorale, mais dans une phase où la mise en place, sur agenda, de la politique de Nicolas Sarkozy est à nouveau la priorité.
Ensuite, il faut bien le dire, les départements et les cantons ne sont plus ces "chasses gardées" où la sociologie rurale assurait à certaines élites de droite, plutôt conservatrices, des majorités indétrônables.
En 2004, la gauche était majoritaire dans 51 départements, désormais elle en préside 58, ce qui représente 62,4% de la population française. La droite quant à elle, n'en préside plus que 39. La majorité parlementaire UMP est donc encore moins pieds et poings liés face aux élus départementaux de droite.
Et puis, au mois de février, les réactions très vives étaient surtout venues des parlementaires qui analysaient le rapport Attali comme une manipulation propre à "shunter" le Parlement. Corrélativement, à gauche, les socialistes, anesthésiés par leur victoire historique aux régionales de 2004 (20 régions sur 22 sont présidés par la gauche), avaient presque oublié l'autre élection (celle des cantonales), moins spectaculaire, mais beaucoup plus structurelle.
Claudie Lebreton, président de l'Association des départements de France, était bien seul pour protester, quelque peu gêné face à la puissance de ses collègues présidents socialistes de région. Aujourd'hui, les nouveaux exécutifs départementaux sont occupés à réorganiser leurs services, une forte réaction est donc peu probable de leur part.
Enfin, il subsiste dans l'opinion publique, une forme larvée de populisme "anti-élus" qui verrait d'un bon oeil la suppression des conseils généraux, car peu de gens connaissent l'importance des compétences sociales qu'ils assurent.
Malheureusement donc, la conjoncture, la rencontre de certains événements dans le même point, pourrait permettre au gouvernement de réaliser ce qui paraissait impossible il y a deux mois et demi, et sans que l'opinion ne s'en soucie!