Sur la base de ce sombre constat, un article de la revue InformationWeek revient sur les commentaires et préconisations en la matière de James McQuivey, un des analystes du cabinet. En premier lieu, il souligne la persistance d'un mythe : il suffirait de déployer une application mobile et de collecter quelques centaines de « likes » sur Facebook pour entrer dans l'ère numérique. La réalité est bien plus complexe et une véritable stratégie d'innovation s'impose.
Face à cette exigence, les obstacles, nombreux, peuvent se décomposer en 3 grandes catégories : la culture, la structure et l'immobilisme procédurier. La première se traduit par des comportements fondamentalement opposés au changement, la deuxième se matérialise par une multiplication des niveaux hiérarchiques (qui sont autant de barrières entre les idées et leur exécution) et la troisième voit l'entreprise s'enferrer dans des politiques datées, sans parvenir à les remplacer par des approches plus adaptées au monde contemporain.
Pour surmonter ces handicaps, la mise en place d'une structure dédiée à l'innovation va rapidement devoir être envisagée. Dans les organisations les plus en pointe, au sein desquelles, notamment, les silos ont déjà été abolis et l'ouverture est la norme, il pourra s'agir de petites équipes spécialisées (consacrées chacune à un thème spécifique), disséminées dans tous les départements, qu'elles irrigueront en permanence tout en développant la collaboration et la communication entre elles.
Naturellement, ce sont là des exceptions. Dans les entreprises « ordinaires », le plus raisonnable est de constituer un groupe unique pour mener la transformation numérique. Et deux options s'offrent alors : une équipe interne – resserrée (6 à 8 personnes), mixant marketing, production et informatique – ou un dispositif externalisé – initialisé, par exemple, via une startup récemment acquise. Cette dernière suggestion est généralement plus appropriée lorsque les freins culturels et structurels sont particulièrement forts.
Dans les 2 cas, la principale difficulté sera d'asseoir la légitimité de la structure, afin que sa « culture » pénètre toutes les pores de l'organisation. Et, comme il est probable qu'une partie des collaborateurs souhaitent son échec, il sera préférable qu'elle soit soutenue explicitement et visiblement par la direction générale. Un moyen complémentaire d'atteindre la reconnaissance – plus efficace à long terme – est de démontrer une capacité à concrétiser les promesses, rapidement et fréquemment.
Un autre facteur important du succès de ce genre d'initiative (que n'aborde pas J. McQuivey) est la composition de l'équipe d'innovation, au-delà de la mixité des origines de ses membres. En effet, pour obtenir la reconnaissance de leurs pairs, ils doivent rester relativement proches des préoccupations opérationnelles de ces derniers : trop souvent, les « professionnels » de l'innovation s'isolent et perdent de vue les réalités de l'entreprise, produisant alors des concepts extrêmement difficiles à déployer.
Pour éviter ce phénomène, il faudra prévoir de renouveler régulièrement (au moins) une partie des personnes intégrées dans la structure (une durée d'immersion de l'ordre de 2 ans devrait constituer la limite à conserver en mémoire). Incidemment, cette pratique est également une excellente manière de propager la valeur d'innovation au cœur de l'organisation et d'en valoriser les résultats, tout autant qu'un moyen de rafraîchir les approches de l'innovation et de capter et faire émerger des idées variées.