Allez, soyons sérieux! et sortons notre boîte à outils si l'on veut comprendre la place réellement occupée par l’économie du « Tourisme » dans notre région.
Et commençons par la définir. Contrairement au sens commun, ce n’est pas une branche d’activités au sens classique du terme, mais un agrégat de branches d’activités: commerces , hôtels, restaurants, construction… Ensuite, les entreprises de ces branches d’activités sont classées dans le « Tourisme » en fonction de leur localisation. Exemple : un supermarché du centre ville d’Alès ne sera pas considéré comme relevant du tourisme alors que celui installé à Narbonne dans la direction des plages l’est … ; un bureau de tabac et un restaurant de Gruissan aussi, mais pas ceux du centre ville de Quillan. C’est dire son caractère très hétérogène !
Sa contribution à la richesse régionale, ensuite, est loin, très loin des discours officiels. Le ratio souvent présenté des Revenus du tourisme sur le Produit Intérieur Brut régional est un trompe l’œil . Il ne permet pas, en effet, de mesurer la richesse apportée par les « consommateurs » du tourisme régional dans la richesse totale produite en région. Un exemple parmi cent, celui du touriste qui achète une bière de 3 euros et qui, se faisant, finance au final le producteur de houblon, celui de levure et le fabricant de bouteille et de bouchons , tous situés à l’extérieur de la Région . En réalité, il ne faudrait retenir que la seule marge de 1 euro du tenancier et non son revenu pour la rapporter au produit intérieur brut régional; et encore à la condition qu’il réside en Languedoc-Roussillon et non en Andorre - qui est un paradis fiscal de proximité.
En termes d’emplois, il n’est pas besoin de développer non plus sur le caractère saisonnier du « Tourisme ». Les entreprises de ce secteur raisonnent en emplois tendus, et les conséquences sont bien connues : intérim , faibles qualifications, conditions de travail difficiles etc...
Enfin, de l'autre côté de la balance du « Tourisme », il y a les dépenses payées par l’impôt des résidents permanents, de la région et d'ailleurs, pour financer les réseaux et les infrastructures nécessaires au fonctionnement de ce secteur d'activités: eaux, assainissement, ordures ménagères, entretien des espaces naturels et des équipements publics etc...
Comme on peut le constater on est loin de l’image d’Epinal qui nous présente le « Tourisme » comme étant le moteur de la croissance du Languedoc Roussillon.
Autre remarque ! Depuis 15 ans, on entend le même discours incantatoire sur la nécessité d’allonger la saison touristique, alors que les courbes de fréquentation sont quasiment identiques. Et pour cause, cet allongement, en effet, ne se décrète pas, surtout pour le tourisme de masse sur le littoral. Outre les caractéristiques climatiques de notre région, le comportement des touristes dépend de facteurs socio-culturels sur lesquels les opérateurs du secteur, régionaux , n’ont aucune prise : fractionnement des séjours, vacances scolaires etc … À l’inverse du tourisme urbain de proximité, plus diffus, qui , lui , échappe à ses contraintes mais , paradoxalement, n’est ni promu, ni soutenu …
Alors disons le tout net, parier sur ce secteur pour en faire le vecteur de croissance du Languedoc-Roussillon en général et du Grand Narbonne en particulier, comme on peut le lire en ce moment dans certains programmes électoraux, est une profonde erreur de perspective qui ne peut que nous enfermer dans une économie de rente aux médiocres résultats économiques et sociaux. Il est donc temps de dissiper ce mirage !