Même dépressif, un archéologue ne peut s’empêcher de se passionner pour une nouvelle découverte, qui plus est si elle est mystérieuse. C’est ce qui arrive à Ivo Varmon qui pour tenter d’échapper à la détresse qui le ronge depuis le décès de son épouse décide de prendre la route et de traverser la France, en passant par des routes ignorées, si possible dans des coins perdus. Il n’a pas besoin d’aller bien loin, car il découvre au hasard d’une pause pipi le long d’une petite route traversant la forêt un bâtiment ancien qui ressemble à une chapelle, fermé d’un gros cadenas et qui a l’air à peu près entretenu. Il est intrigué par sa présence au milieu des bois et décide de pousser jusqu’au village voisin pour en savoir plus.
Est-ce l’isolement du village, sa petitesse ou bien son propre état dépressif, il ne saurait trop dire, mais les gens sont tous un peu bizarres par ici, à commencer par l’aubergiste, au départ peu amène, et qui pourtant l’accueillera bien vite dans son lit, ce dont il ne se serait jamais cru capable. Après avoir arraché du bout des lèvres au maire du village la permission d’effectuer des sondages à l’intérieur de la chapelle, il s’arme de ses outils, de sa patience et commence son labeur délicat, intrigué, dérangé même par une sorte de présence sur les lieux, une aura qui l’envelopperait, mais une aura à la lueur néfaste.
Mais Ivo est un chercheur et il est vite fasciné par ce qu’il découvre sous le crépi : des tableaux, des dizaines de tableaux formant une immense fresque, mais qui ont été peints non pas en une seule fois par un seul artiste, mais par plusieurs personne, et ce sur plusieurs siècles ! Une découverte à nulle autre pareille, et le voilà bientôt qui ne pense qu’à ça, même s’il a promis de n’en parler à personne, et si cette sensation de malaise, cette impression d’être observé, jaugé ne cesse de grandir, ainsi que d’étranges crises de grattements convulsifs.
Brrr… déjà le lecteur le ressent aussi, ce malaise et a vite fait de tourner les pages de plus en plus vite pour voir de quoi il retourne ! Le climat est pesant, angoissant même et ce n’est pas la rencontre de Ivo avec la jeune et très jolie Lucy, une punkette prise en stop par un heureux hasard qui va alléger l'ambiance. Parce que notre chercheur ne l’a pas encore compris, mais le hasard n’a pas grand-chose à faire dans cette forêt…
J’ai beaucoup aimé ce roman que j’ai lu d’une traite et qui m’a vraiment tenue en haleine. Le sujet est très original et donne envie de se plonger dans des livres d’histoire et de peinture pour en savoir plus, car l’auteur semble plutôt pas mal documenté (cela dit, je n’y connais pas grand-chose). La plume de Samuel Gance est agréable à lire, efficace, même si certains dialogues m’ont au départ un peu étonnée, presque déplu. C’est bien évidemment seulement à la fin que j’ai compris le pourquoi du comment, dans un dénouement qu’on attend presque avec terreur, tant on sent qu’il va se passer quelque chose de vraiment Mal. L’ensemble est très mystérieux et le personnage devient passionnant au fil des pages, pris par sa découverte et happé par cette chapelle étrange qui le fascine de plus en plus, l’attire comme un aimant alors qu’il sent qu’un danger rôde.
Voilà donc une belle découverte, et je ne peux que vous conseiller ce huis clos angoissant si vous aimez vous faire peur et les mystères, ainsi que plonger dans les tréfonds de l’histoire.
La chapelle des damnés - Samuel Gance – Editions Ex-Aequo – 161 pages – 12.35 EUROS.