Ce mardi 11 février, le Conseil des ministres de l'Union européenne, en formation "Affaires générales" est appelé à voter sur la proposition de décision qui lui est présentée par la Commission européenne, destinée à autoriser la mise sur le marché aux fins de mise en culture, du maïs génétiquement modifié 1507, développé par la société Pioneer. Une décision qui peut relancer la vive controverse sur les OGM (Photo : Conseil de l'Union européenne).
La proposition de décision de la Commission européenne ("proposition de décision concernant la mise sur le marché à des fins de culture, conformément à la directive 2001/18/CE du Parlement européen et du Conseil, d’un maïs génétiquement modifié (Zea mays L., lignée 1507) pour le rendre résistant à certains parasites de l’ordre des lépidoptères"), datée du 12 novembre 2013, peut être téléchargée ici.
Je vous propose de lire l'exposé des motifs de cette proposition de décision pour avoir connaissance des enjeux et de la chronologie des évènements de ce dossier. Pour mémoire, la demande d'autorisation de la société Pioneer date de 2001 et a fait l'objet de plusieurs avis de l'Agence européenne de sécurité alimentaire. Le Parlement européen s'est prononcé contre l'autorisation de mise en culture de cet OGM résistant à certains parasites. L'évolution de la position de l'Allemagne sur ce sujet risque de priver les Etats opposants d'une majorité permettant de rejeter la proposition de la Commission.
A défaut de majorité contre, ce qui semble devoir se produire, la Commission autorisera la mise en culture de cet OGM.
Du point de vue du droit, cette autorisation posera, à court terme, deux questions principales.
En premier lieu, il serait utile de réactiver le processus de révision de la directive 2001/18 qui fait montre de ses limites. Ce processus de révision a été engagé en 2008 mais, depuis, peu de nouvelles le concernant sont disponibles.
En deuxième lieu, il conviendra de savoir si un Etat, par exemple la France, peut, sur son territoire, s'opposer à l'exécution de cette autorisation européenne. Le Gouvernement français, par la voix de son ministre de l'Agriculture, s'est clairement exprimé contre la mise en culture, tant du maïs MON 810 de la société Monsanto, que du maïs 1507 de la société Pioneer.
Il convient en effet de rappeler que, par un arrêt en date du 1er août 2013, le Conseil d'Etat a annulé "l'arrêté du ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche, de la ruralité et de l'aménagement du territoire en date du 16 mars 2012 suspendant la mise en culture des variétés de semences de maïs génétiquement modifié (Zea mays L. lignée MON 810)".
Le législateur doit-il intervenir pour venir "en aide" au pouvoir réglementaire" ?
C'est sans doute ce pensent les auteurs de cette proposition de loi relative à l'interdiction de la mise en culture du maïs MON 810. Cette proposition de loi, qui sera débattue en séance publique au Sénat ce 17 février 2014, comporte un article unique ainsi rédigé :
"Article unique
I. - La mise en culture des variétés de maïs génétiquement modifié est interdite sur le territoire national.
II. - Le respect de l'interdiction de mise en culture prévue au I est contrôlé par les agents mentionnés à l'article L. 250-2 du code rural et de la pêche maritime. Ces agents disposent des pouvoirs prévus aux articles L. 250-5 et L. 250-6 du même code.
En cas de non-respect de cette interdiction, l'autorité administrative peut ordonner la destruction totale ou partielle des cultures. "
Sous réserve d'un examen approfondi, je ne suis pas certain que cette loi soit compatible avec les exigences du droit de l'UNion européenne, la directive 2001/18 ne prévoyant pas de possibilité d'interdiction générale mais une procédure d'autorisation cas par cas des semences transgéniques. Inutile de rappeler qu'en cas de recours, le Juge administratif peut écarter l'application de la loi contraire au droit de l'Union européenne.
Arnaud Gossement
Selarl Gossement Avocats