Par arrêt du 4 février 2014, la Cour administrative d'appel de Lyon a décidé de sursoir à statuer sur la demande d'annulation d'un permis de construire un parc éolien et a donné un mois à la société bénéficiaire du permis de construire litigieux pour le régulariser au moyen d'un permis de construire modificatif. Un nouveau cas d'application de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme issu de l'article 2 de l'ordonnance susvisée du 18 juillet 2013, entrée en vigueur le 19 août 2013.
- Ma note sur la réforme issue de l'ordonnance du 18 juillet 2013 peut être lue ici.
- L'arrêt rendu ce 4 février par la Cour administrative d'appel de Lyon peut être consulté ici.
- Ma note sur un cas de régularisation d'un permis de construire post instance (art. L.600-5 du code de l'urbanisme peut être lue ici.
Au cas présent, la Cour administrative d'appel de Lyon était saisie d'un litige dans lequel l'association des opposants à la création d'un parc éolien soutenait notamment que le permis de construire était illégal (moyen d'incompétence), faute pour son auteur d'avoir dûment consulté les autorités de l'aviation civile sur le projet en cause.
L'arrêt précise ici :
"18. Considérant, en dernier lieu, que l'association X et autres soutiennent que, faute pour les autorités de l'aviation civile d'avoir régulièrement consenti, comme le prévoient les dispositions précitées des articles R. 425-9 du code de l'urbanisme et R. 244-1 du code de l'aviation civile, aux projets d'éoliennes dont la réalisation a été autorisée par les quatre arrêtés du préfet de la Drôme des 27 mars 2009 et 20 mai 2011 visés ci-dessus, ces derniers arrêtés seraient entachés d'incompétence"
La Cour relève tout d'abord que le défaut de preuve de l'habilitation de l'auteur de l'avis émis au nom de l'aviation civile est susceptible de constituer un motif d'annulation du permis de construire, la jurisprudence Danthony n'étant ici pas applicable :
"19. Considérant que l'accord émis pour chacun de ces arrêtés par le ministre de l'aviation civile, daté des 11 mai 2006 et 30 septembre 2008, émane de M.R..., chef du département surveillance et régulation ; que ni la société X, ni l'administration n'ont justifié, à ce jour, d'une délégation conférée à cet agent à l'effet de fournir un tel accord qui, contrairement à ce que soutient cette société, ne constitue pas un simple avis technique mais un acte à défaut duquel l'autorité administrative ne peut légalement délivrer un permis de construire sans entacher sa décision d'un vice d'incompétence ; qu'un tel vice présente nécessairement un caractère substantiel et ne saurait, dès lors, être régularisé par l'expiration du délai dont dispose le ministre de l'aviation civile, laquelle est insusceptible, dès lors qu'un avis explicite a été rendu, fût-il entaché d'illégalité, de faire naître un avis implicite venant s'y substituer"
La Cour rappelle ensuite la règle fixée à l'article L.600-5-1 du code de l'urbanisme, immédiatement applicable au présent litige :
"20. Considérant toutefois qu'aux termes de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme issu de l'article 2 de l'ordonnance susvisée du 18 juillet 2013, entrée en vigueur le 19 août suivant, laquelle disposition est immédiatement applicable au présent litige : " Le juge administratif qui, saisi de conclusions dirigées contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager, estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés, qu'un vice entraînant l'illégalité de cet acte est susceptible d'être régularisé par un permis modificatif peut, après avoir invité les parties à présenter leurs observations, surseoir à statuer jusqu'à l'expiration du délai qu'il fixe pour cette régularisation. Si un tel permis modificatif est notifié dans ce délai au juge, celui-ci statue après avoir invité les parties à présenter leurs observations."
Par application de ces dispositions, la Cour décide de surseoir à statuer le temps pour la société bénéficiaire du permis entrepris d'obtenir un permis modificatif de régularisation du vice d'incompétence affectant le permis initial :
"21. Considérant que le vice dont sont entachés les quatre arrêtés en question est susceptible de régularisation par la délivrance d'arrêtés en portant, sur ce point, modification ; qu'à l'initiative de l'association X et autres, les parties ont présenté leurs observations sur cette question, la Cour ayant par ailleurs demandé le 11 septembre 2013 à la société X et au ministre de l'égalité des territoires et du logement de justifier de la compétence de l'auteur de l'accord émis au titre de l'article R. 244-1 précité du code de l'aviation civile ; que les autorités de l'aviation civile ont, à cet égard, émis un nouvel avis en date du 24 septembre 2013 portant sur les projets d'éoliennes en litige ; qu'il y a donc lieu, en l'espèce d'impartir à la société X un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt aux fins d'obtenir la régularisation, compte tenu de l'accord donné par les autorités de l'aviation civile, des permis de construire initialement délivrés par le préfet de la Drôme les 27 mars 2009 et 20 mai 2011 et, en attendant, de surseoir à statuer sur le moyen d'incompétence soulevé par l'association X et autres"
Cette jurisprudence tend à démontrer que le contentieux du permis de construire éolien constitue un terrain d'accueil favorable de la réforme du contentieux de l'urbanisme issue de l'ordonnance du 18 juillet 2013. Ces nouvelles dispositions, dont il est - pour la plupart - acquis qu'elles sont immédiatement applicables aux litiges en cours, doivent cependant être maniées avec une très grande prudence par les bénéficiaires des permis en cause car elles comportent leurs propres risques.
En toute hypothèse, ces nouveaux instruments procéduraux de régularisation ne peuvent remplacer une nécessaire simplification du cadre juridique applicable notamment au développement de sources de production d'énergie renouvelable.
Arnaud Gossement
Selarl Gossement Avocats