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Femen et autres provocateurs : les censeurs sont de chaque côté

Publié le 10 février 2014 par Copeau @Contrepoints

Par Michel Desgranges.

Action Femen en février 2013 dans la cathédrale de Paris (Crédits : Christian Alexandru, licence Creative Commons)

Gardez-vous à droite, gardez-vous à gauche…

Une association a manifesté contre les Femen, non dimanche, jour du Seigneur, de prière, de recueillement et de visite des pâtisseries, mais ce samedi 8 février.

Ces Femen sont des jeunes femmes originaires de plaines orientales, qui offrent aux regards des passants l’agrément de leur (semi)nudité, et amusent les petits enfants en se livrant à des provocations puériles qui leur ont valu l’estime, l’amitié et le soutien du Président, de ses acolytes et des habituels laquais de presse.

Moralement, leur action peut être jugée selon un critère simple : lorsqu’elles profanent, en une comédie empruntée à des bouffeurs de curés depuis longtemps partis aux enfers, un lieu ou un meuble qui appartient à autrui, elles sont moralement coupables, mais si elles achetaient des objets de culte, que des prélats modernes, tels l’évêque de Rouen cette semaine, vendent par dégoût d’un respect aboli, elles auraient, moralement,  un droit absolu de les utiliser pour y faire les besoins que commande la nature.

La notoriété de ces Femen n’est qu’une marque de plus de la veulerie de notre société, qui ne sait partager entre ce qui est licite et illicite, loue ou condamne sans principe autre que la direction du vent, c’est donc un sujet de peu d’intérêt, en revanche, l‘association qui s’oppose à elles, sans se soucier des hommes et des femmes que leur agitation a privé de pouvoir se promener tranquillement, ou faire des courses, dans les rues envahies par un cortège bruyant, s’est fait remarquer depuis sa création en cherchant à faire censurer et interdire les propos et spectacles qu’elle juge contraire à ses opinions, ou croyances, ou sentiments – elle est une agglomération d’inquisiteurs obsessionnels, et une frénétique ennemie de la liberté humaine.

Plutôt que gaspiller mon temps, qui est un  bien rare, à énumérer ses méfaits, relevons, car cela est juste tombé sous mon regard grâce à un billet ici-même de Mme Letteron, la mauvaise action dont vient de se rendre coupable une autre association ejusdem farinae, qui partage les mêmes buts, affiche les mêmes convictions et la même volonté de nuire à son prochain.

Cette association donc, et peu importe son nom, vient d’agir en justice pour demander l’interdiction au moins de 18 ans (qui revient à empêcher toute exploitation commerciale) du film de M. Lars von Trier Nymphomaniac ; je n’ai pas vu ce film, M. Lars von Trier est un cinéaste de talent, mais qui a choisi d’exprimer obscurément par des images absconses un propos bredouillant, son œuvre ne figure pas parmi celles que je m’impatiente de regarder, et son Antéchrist dort sous une pile de dvd(s) tamouls oubliés.

Ces censeurs bénévoles, dont un précédent haut fait avait été de faire prohiber l’amusant, et un peu bâclé, Baise-moi de Mme Virginie Despentes, n’ont  cette fois obtenu des juges qu’une interdiction au moins de 16 ans, une telle interdiction n’est pas anodine car elle réduit très fortement la diffusion d’une œuvre, donc ses espoirs de recettes, elle est une mise en garde adressée à quiconque envisagerait désormais de produire une œuvre libre avec, ô horreur !,  des dames et des messieurs en tenue d’Adam et Ève (avant la grosse bêtise de cette dernière) et utilisant des organes que leur a octroyés le Créateur.

Et comment qualifier ces hérauts de la famille traditionnelle qui exigent de M. État de préserver leurs enfants adolescents de la vue de certaines images en avouant ainsi qu’ils sont incapables, ces vertueux parents, d’obtenir que leur progéniture se soumette à leurs interdits !

Plutôt que d’utiliser leur énergie à élever et éduquer leurs filles et garçons, ils la dépensent à empêcher autrui, un autrui qui ne partage pas leur puritanisme misérable, de regarder ce qu’il souhaite regarder.

Entre les professionnels subventionnés de l’antiracisme et les maniaques de la répression des joyeux plaisirs, il ne reste à l’écrivain ou au cinéaste  qu’à exprimer, non plus sa pensée, mais les mots ou les images dictés par ses persécuteurs.

À moins que l’on ne jette dans une arène censeurs-de-droite et censeurs-de-gauche, pour qu’ils s’y exterminent mutuellement.


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